L'Europe divisée sur la question du transfert des fonds russes gelés à Kiev
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Les actifs russes gelés en Europe ne seront pas transférés à l’Ukraine. Emmanuel Macron a souligné que cette confiscation serait contraire au droit international, tandis que d'autres dirigeants européens, dont Ursula von der Leyen, considèrent ces fonds comme un moyen de pression stratégique dans les négociations avec Moscou.
Le président français Emmanuel Macron s'est montré ferme sur la question des avoirs russes gelés, affirmant que leur confiscation pour financer l’Ukraine serait «contraire au droit international». Lors d’une rencontre à Washington avec le président américain Donald Trump le 24 février, il a souligné que ces fonds ne devaient pas être saisis mais qu'ils devaient servir de levier dans les négociations de paix avec la Russie. «Il est impossible de prendre les avoirs gelés de la Russie, c'est contraire au droit international», a déclaré Macron.
Cette position est partagée par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui considère ces fonds comme un avantage stratégique pour l'Union européenne. «Si nous débloquons ces actifs maintenant et les remettons à l'Ukraine, nous perdons un outil de négociation essentiel dans le cadre d'un règlement futur», a-t-elle affirmé lors d'une déclaration ce 24 février, selon Politico.
À ce jour, l’Union européenne a gelé un peu moins de 300 milliards de dollars d’avoirs russes depuis l’escalade du conflit en Ukraine. Parmi ces fonds, environ 213 milliards de dollars sont détenus par Euroclear à Bruxelles. Bien que certains pays, tels que la Pologne et les États baltes, plaident en faveur d'un transfert de ces fonds à l’Ukraine, plusieurs États membres s’y opposent fermement.
Un diplomate européen cité par Politico explique cette réticence : «Si vous débloquez les actifs et les transférez en Ukraine, vous ne les aurez plus et vous ne pourrez plus les utiliser comme monnaie d'échange».
Kaja Kallas, chef de la diplomatie européenne, est l'une des personnalités qui soutiennent fortement le transfert des avoirs gelés vers l'Ukraine. Elle partage la position des États baltes, de la Pologne et de la République tchèque qui plaident pour une utilisation immédiate de ces fonds afin de soutenir financièrement Kiev. Cependant, Kallas a également reconnu les difficultés de mise en œuvre d'une telle mesure, affirmant que l’unanimité des 27 membres était nécessaire : «Nous avons besoin du soutien de tout le monde pour cela et jusqu'à présent, nous n'avons pas ce soutien», a-t-elle déclaré.
Le ministre estonien des Affaires étrangères Margus Tsahkna, admet également que ces avoirs peuvent constituer un levier important. «La rétention continue des actifs sert de levier financier et diplomatique, garantissant que la Russie ait une incitation claire et tangible à négocier un accord et à potentiellement dédommager l'Ukraine», a-t-il affirmé.
Malgré la pression croissante de certains pays pour transférer ces fonds à l’Ukraine, les avoirs russes gelés restent intouchés. Cette décision s'explique par l'obligation de préserver la stabilité et la crédibilité du système financier européen, alors que des voix s’élèvent contre une confiscation jugée illégale. Bien que les bénéfices générés par ces actifs aient déjà servi à garantir un prêt de 50 milliards de dollars à Kiev, l'idée de s'emparer de ces fonds est perçue comme un acte qui pourrait saper la confiance des investisseurs et affaiblir l’image de l’Union européenne sur la scène internationale.
L'Europe reste donc divisée sur la question, entre ceux qui veulent utiliser ces fonds pour aider l’Ukraine et ceux qui préfèrent les conserver comme un atout stratégique dans les discussions futures.