L’année dernière, Kiev aurait pu empêcher le crash du MH17en fermant son espace aérien, a estimé le spécialiste en matière de sécurité Charles Shoebridge dans l’émission «In the now» sur RT, comme l’ont montré les conclusions du rapport néerlandais.
RT : Quelle est votre point de vue général après la présentation des conclusions du Bureau néerlandais pour la sécurité sur la catastrophe du MH17 ?
Charles Shoebridge (C.S.) : Bien sûr, il est important de se rappeler ce que Tjibbe Joustra a répété plusieurs fois lors de son discours, à savoir qu’il ne revient pas à cette enquête de porter des accusations. Par conséquent, cette enquête s’est arrêtée dès qu’elle a identifié les raisons techniques de cet incident, mais aussi rassemblé assez d’informations pour édicter des recommandations afin que ce genre d’incidents ne se répètent pas à l’avenir. Les enquêteurs ont conclu, par exemple, qu’il était question d’un missile russe, c’est-à-dire un missile de fabrication russe BOUK – ce qui a permis aux rédacteurs occidentaux de mentionner un «missile russe» dans leur titres – et cela n’est pas contesté.
L’enquête a donné des détails supplémentaires sur le fait que trois simulations avaient été réalisées pour essayer d’établir d’où ce missile avait été tiré, sans parvenir à aucune conclusion sur ce point. Nous sommes donc dans une situation où trois parties distinctes, l’équipe d’enquête, le gouvernement ukrainien et le gouvernement russe, avec l’aide du constructeur de ce missile qui a présenté son propre rapport ce matin de manière autonome, sont arrivées à des conclusions différentes sur l’endroit d’où ce missile a été tiré.
Le rapport ne répond pas non plus à la question de savoir à qui appartenait ce missile. Par exemple, d’où il a été lancé dans la zone rebelle ? Cela aurait pu être un missile pris aux forces gouvernementales ukrainiennes, transmis par les forces gouvernementales ukrainiennes ou même fourni par la Russie, comme certains experts occidentaux l’ont supposé. Tout cela fait l’objet d’enquêtes supplémentaires.
De plus, l’enquête néerlandaise a clairement indiqué que, du point de vue des enquêteurs, l’Ukraine avait eu tort, au vu des informations dont disposait le gouvernement ukrainien à ce moment, de ne pas avoir fermé son espace aérien. Cela laisse présumer que l’Ukraine aurait dû fermer son espace aérien, ce qui pourrait avoir des répercussions sur les plaintes qui sont en cours contre les autorités ukrainiennes au motif de leur éventuelle négligence pour ne pas avoir fermé cet espace. Moi-même, moins d’une heure après le crash, j’ai twitté : «Comment un avion de ligne a-t-il pu être autorisé à survoler une zone de combat ?» En bref, on a aujourd’hui éclairci certains points, l’enquête a planché sur différents scénarios mais il faut encore répondre à de nombreuses questions. C’est certainement l’enquête criminelle toujours en cours qui y répondra, si elle le peut, bien sûr, d’ici quelques mois.
RT : Almaz-Antei, le fabricant russe des missiles a révélé des informations sensibles. Pourquoi n’avons-nous pas vu le même niveau d’ouverture chez les autres parties, en Ukraine, par exemple ?
C.S. : Ce point va certainement devoir être éclairci dans les jours ou même les heures qui viennent. Je ne sais pas si l’on pourra poser des questions lors de cette conférence de presse, ça me paraît peu probable. Les Etats-Unis, par exemple, n’ont pas publié de photos satellite ou infrarouges détaillées qui pourraient faire la lumière sur le lieu exact du tir, cela a été laissé, en Occident, à des amateurs qui ont spéculé à des degrés de crédibilité divers, sur l’emplacement exact du site de lancement de ce missile BOUK. Bien sûr, tout cela est crucial pour savoir à qui imputer la responsabilité de ce crash, ce qui n’était, bien évidemment, pas le but de cette enquête mais qui sera déterminé dans le futur.
Il vaut la peine de se souvenir du contexte. S’il a été tiré par les forces rebelles pro-russes dans l’est de l’Ukraine, se pose alors la question de l’intention, comme dans toute enquête criminelle. Rappelons-nous qu’en 1998, même les Etats-Unis avaient abattu un avion de ligne iranien, tuant des centaines de personnes accidentellement dans une situation de combat. De la même façon, l’Ukraine a abattu un avion d’une compagnie sibérienne en 2001.
Ces accidents se sont produits et, bien sûr, lorsqu’un accident survient, on cherche à déterminer quelle était l’intention des personnes qui tiré. Il s’agit d’une zone de combat et, à l’époque, les rebelles pro-russes étaient attaqués par des avions militaires ukrainiens, raison pour laquelle, si ce cas était avéré, ils auraient utilisé leurs armes.
Beaucoup de questions restent encore en suspens. Bien sûr de nombreux titres occidentaux ne parleront que d’une version de cette histoire, comme ce fut le cas au lendemain du crash du MH17, beaucoup de journaux en Grande-Bretagne et au Royaume-Uni avaient titré «Le missile de Poutine» ou «La Russie a tué mon fils» sans qu’il n’y ait eu aucune enquête. Au moins maintenant nous disposons d’une enquête qui semble avoir été menée de manière rigoureuse et dont les conclusions ont été présentées de manière très professionnelle. Elle a bien sûr répondu à certaines questions mais il faut encore répondre à de nombreuses autres.
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— RT France (@RTenfrancais) 13 Octobre 2015
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