John Kiriakou a passé deux ans dans une prison fédérale pour avoir dévoilé des programmes illégaux de torture de la CIA. Le lanceur d'alerte partage avec RT les techniques qui l’ont aidé à survivre en prison.
«J'ai tiré 20 leçons de vie lors de mes années d'entraînement à la CIA, certaines étant un peu ironiques, comme "Ne rien admettre. Nier tout. Faire des contre-accusations". Mais d'autres sont plus sérieuses, comme par exemple "Lorsque le calme n'est pas à votre avantage, le chaos est votre ami". Ou bien "Recrutez des espions pour voler des secrets ou toute autre chose dont vous avez besoin". L'objectif final étant de rester en sécurité et au-dessus de la meute en prison».
La CIA s'est opposée autant qu'elle l'a pu à la publication de son nouveau livre, Doing time as a spy, en utilisant ses propres tactiques de complications bureaucratiques, raconte John Kiriakou.
«S'ils n'aiment pas ce que vous écrivez, ils vont corriger votre texte, et ils feront appel, encore et encore. La Commission d'examen de la publication a, selon la loi, 30 jours pour examiner le manuscrit. Ils ne respectent jamais ce délai de 30 jours, et ils savent qu'on ne peut rien y faire».
Son propre livre est en fait devenu un récit édifiant contre la pratique, selon lui.
«Il leur a fallu huit mois pour me répondre, ils m'ont envoyé une lettre m'informant qu'il avaient besoin d'un an de plus. J'ai dit que cela ne marchait pas comme ça, vous avez 30 jours, je vais l'envoyer à l'éditeur. Une semaine plus tard ils sont revenus en disant que tout était clair. Ils ont rédigé une phrase que j'ai été heureux d'omettre», raconte John Kiriakou.
Vingt-trois mois de prison ont enseigné à John Kiriakou qu'il était «beaucoup plus patient, débrouillard et impitoyable» qu'il l'avait imaginé.
«Lors de mon tout premier jour en prison, le gardien m'a dit que si quelqu'un entrait dans ma cellule sans y être invité, il s'agissait d'un acte d'agression, et que je devrais me défendre. Après seulement 40 minutes, deux Aryens sont entrés dans ma cellule, l'un d'eux avec une énorme croix gammée qui couvrait tout le devant de son cou.»
John Kiriakou était donc prêt à se défendre, quand «les Aryens», comme il les appelle, lui ont demandé s'il était homo, indic ou pédophile, et quand il a répondu par la négative aux trois questions... ils l'ont invité à s'asseoir avec eux à la cafétéria.
Plus tard il a rencontré un Italien – dans ce cas cela voulait dire «un membre de la famille du crime organisé» – qui lui a dit, avec beaucoup de gravité, qu'il devait dès lors s'asseoir avec les Italiens.
«C'est parce que j'ai été capable de tisser des liens avec une variété de groupes, y compris les Italiens, qu'ils ont fini par me faire confiance et apprécier ma compagnie et mes conseils.»
Quand on lui a demandé s'il n'y avait jamais eu de moments plus difficiles que les autres pendant la durée de sa détention, qui lui faisaient regretter de s'être élevé contre la CIA, John Kiriakou a répondu qu'il était en effet passé par des moments compliqués.
«Deux gardiens, agents pénitentiaires, ont essayé de me persuader par la ruse de faire du mal à un autre prisonnier, me disant qu'il avait reçu l'ordre de me tuer en prison. En réalité, ils avaient dit à l'autre gars que j'avais reçu l'ordre de le tuer. Cela a été une journée difficile à vivre.»
John Kiriakou a été condamné à passer 30 mois au centre pénitentiaire fédéral de Loretto, près de Pittsburgh, en Pennsylvanie. Sa peine a commencé le 28 février 2013 et devait se terminer en août 2015.
John Kiriakou a pour la première fois évoqué le programme de torture de la CIA, y compris les techniques de simulation de noyade, en 2007, lors d'une interview à ABC News. L'enquête qui a finalement mené à sa condamnation a été ouverte en 2009.
John Kiriakou a été libéré le 3 février 2015, mais a du néanmoins purger les trois mois restants de sa peine à son domicile d'Arlington, en Virginie.
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