Donald Trump a été élu président des Etats-Unis sur fond de désespoir économique, la population ayant le sentiment que le pays est en train de perdre son prestige, selon la députée Marie-Françoise Bechtel.
RT France : Comment expliquez-vous les résultats de l’élection présidentielle aux Etats-Unis ?
Marie-Françoise Bechtel (M.-F. B.) : Je crois que c’est l’effet de la colère des peuples, en l’espèce du peuple américain. Il y a une énorme paupérisation d’une partie du peuple américain et beaucoup de craintes pour l’avenir d’une économie qu’on nous présente pourtant comme florissante. Je suis également frappée par le parallelisme avec certains peuples européens, comme le peuple français. C’est le même fond de désespoir économique et de sentiment que leurs pays perdent leur prestige.
RT France : A votre avis, quel effet l’élection de Donald Trump aura-t-elle sur les relations des Etats-Unis avec l’Europe et la France ?
M.-F. B. : C’est difficile à dire, surtout dans le cas de la France. J’ai compris que Donald Trump n’était pas dans le même état d’esprit vis-à-vis de la Russie [et de l'Europe] que les démocrates, mais je ne suis pas sûre que ce soit sa première préoccupation. Et ce n’était pas celle de Barack Obama non plus. Je parle de l’UE et pas de l’ensemble du continent européen.
Ce qui comptera sans doute sera le poids de son entourage, je ne suis pas sûre qu’il soit préparé à affronter tout cela
RT France : Pour ce qui est de la politique internationale, les Etats-Unis vont-ils être davantage impliqués dans des conflits ?
M.-F. B. : Si l’on parle du Moyen-Orient, bien sûr. C’est très difficile à dire, parce que Donald Trump a fait des déclarations extrêmement imprudentes sur le monde musulman et sur les musulmans en général. Et il ne peut probablement pas se permettre certaines actions. En même temps, peut-être y a-t-il une tentation isolationiste aujourd’hui. Quand on dit «restaurer la grandeur de l’Amérique», cela relève souvent de l’isolationnisme. Je ne le sens pas très interventionniste, mais je me trompe peut-être. Il peut très bien se replier sur le pré-carré de la grande Amérique qui, précisément, laisse le monde se débrouiller avec ses problèmes. Je ne pense pas qu’il puisse laisser la Russie avoir ce qui, à ses yeux, serait un triomphe en Syrie. Ce qui comptera sans doute sera le poids de son entourage, je ne suis pas sûre qu’il soit préparé à affronter tout cela.
Un grand Etat c’est comme un paquebot très lourd : on ne peut pas changer de direction à 90 degrés
RT France : Pensez-vous que la politique américaine va changer radicalement ? Certains disent que l'establishment a une influence importante et que Donald Trump n'aura pas une grande marge de manœuvre...
M.-F. B. : Je crois qu’effectivement le Congrès verrouille beaucoup de choses, dans le cadre de l’accord avec l’Iran, ils ont menacé directement Barack Obama. Le Congrès, l’establishment, les lobbies, tous auront leur mot à dire. Ils sont surreprésentés, effectivement. Un grand Etat c’est comme un paquebot très lourd : on ne peut pas changer de direction à 90 degrés. Ce n’est pas un petit voilier, il est composé des couches différentes des décisionnaires, des décideurs économiques, de la finance. On ne peut faire prendre un cap brutal,ce sera sans doute un enjeu pour Donald Trump. Il est possible, aussi, qu’il déçoive beaucoup tous ces petits blancs en colère qui l’ont élu.
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