Fabienne Boulin-Burgeat, fille de Robert Boulin, a réagit auprès de RT France aux nouveaux témoignages révélés ce 9 juin dans la presse concernant la mort de son père en 1979. Depuis 36 ans, elle est persuadée que celui-ci a été assassiné.
RT France : En quoi ces nouveaux témoignages sont-ils importants dans le cadre de l'enquête ?
Fabienne Boulin-Burgeat : Le premier témoignage de ce médecin du SAMU. Les deux motards ont découvert le corps à 8h45, l'un d'entre eux est resté, et l'autre est allé héler le premier camion de pompier qu'il ait vu. Ils sont donc arrivés sur les lieux avant que tout autre autorité ne soit là, et ce médecin du SAMU avec trois pompiers ont vu le corps qui avait la tête hors de l'eau, donc manifestement pas noyé. Ces gens sont restés 20 minutes, et alors les autorités sont arrivées sur place et leur ont demandé de partir. Il est absolument extravagant que ces personnes là ne fassent pas partie du dossier judiciaire. Ils n'ont jamais été interrogés par un juge jusqu'à récemment.
Le deuxième témoin est un homme de la région, qui affirme avoir croisé la voiture dans un passage étroit à Monfort L'Amaury, où les deux voitures ne pouvaient pas passer de front en même temps. Lui s'est arrêté pour laisser passer la voiture de mon père, dont il décrit la couleur et la marque qui correspondent, et a vu mon père qui n'était pas assis au volant mais à la place du passager. Le conducteur était un homme jeune, et un autre homme se trouvait derrière. Ces deux éléments sont très importants car ils montrent qu'il y a eu non seulement assassinat mais aussi mise en scène de la part des autorités.
RT France : Comment expliquez-vous que ces témoignages n'aient pas été récoltés ou même pris en compte à l'époque ?
Fabienne Boulin-Burgeat: Ils ont été délibérément écartés. C'est comme cela que notre démocratie dysfonctionne très largement. Il y a des gens qui sont bien placés et qui ont de l'autorité sur d'autres qui y sont soumises, il y a aussi la veulerie et la poltronnerie – les gens qui n'osent pas dire ce qu'ils savent –, mais aussi la paresse intellectuelle, les gens qui ne travaillent pas le dossier par le bout du nez par une petit clique qui a le droit à l'impunité depuis quarante ans.
C'était un homme qui gênait cette petite clique qui veut profiter des richesses nationales pour leur intérêt personnel et celui de leurs amis.
RT France : Qu'entendez-vous par «petite clique» ? Pourquoi aurait-ils voulu s'en prendre à votre père ?
Fabienne Boulin-Burgeat: Mon père était un homme qui avait fait la résistance. Il avait été ministre sous le général de Gaulle, sous Giscard et Pompidou, c'était quelqu'un qui avait de la bouteille, qui était très estimé par ses collègues et qui avait de l'autorité. Valéry Giscard d’Estaing l'a reconnu, il allait être nommé Premier ministre. C'était un homme qui gênait cette petite clique qui veut profiter des richesses nationales pour leur intérêt personnel et celui de leurs amis. Il était très droit et n'aurait pas accepté certaines choses. Donc tout d'abord ils ont décidé de monter cette fausse affaire des terrains de Ramatuelle, et comme mon père a réagit fortement, comme un homme honnête et qu'il s'est bagarré, et bien ils ont peut être été obligés de monter d'un cran. Ça sera au juge de décider s'il s'agissait d'un assassinat ou d'un meurtre, mais ce qui est certain c'est qu'ils ont pris la décision de déguiser cet acte en suicide, et de nous tenir à l'écart du dossier, de nous mettre la pression.
Les freins de ma voiture ont été trafiqués deux fois
RT France : Voulez-vous dire que vous avez été l'objet de d'actes d'intimidation ?
Fabienne Boulin-Burgeat: Les freins de ma voiture ont été trafiqués deux fois, alors que j'habitais dans une rue très pentue, le chien de ma mère a été tué de deux balles dans la tempe, et elle-même a été agressée physiquement... De «bons amis» viennent vous voir pour vous dire de ne pas bouger, que l'on est sur de la nitroglycérine ; des gens viennent en affirmant qu'ils vont réparer votre ligne téléphonique mais vous vous rendez compte qu'ils mettent en place un dispositif d'écoute. Il y a toute une ambiance particulière qui fait que j'ai bien compris que ce n'est qu'avec le temps que je gagnerai face à ces gens bien organisés.
Il y a encore beaucoup de témoins qui attendent d'être interrogés par le juge d'instruction. Ils auraient pu le faire dès le départ si le juge les avaient interrogés. Or, beaucoup ont été écartés dès le départ. C'est donc bien une volonté délibérée de ne pas faire éclater la vérité sur cette affaire, j'espère que nous partons maintenant sur des bases plus démocratiques.
Je sais depuis toujours que ce dossier est un assassinat
RT France : L'affaire rouverte en septembre dernier peut-elle arriver à des conclusions que vous estimez justes ?
Fabienne Boulin-Burgeat : Nous avons déposé une nouvelle plainte qui est cette fois instruite à Versailles, et nous ne dépendons plus d'un procureur général qui est nommé en conseil des ministres et qui peut subir toutes les pressions politiques comme ce fut le cas pendant si longtemps, mais d'un juge d'instruction qui a eu le courage de rouvrir cette affaire en toute indépendance. Je suis optimiste car je sais depuis toujours que ce dossier est un assassinat, et qu'il faut juste que la justice regarder avec objectivité et sérénité les différents éléments ainsi que d'entendre les individus qui n'attendent que de pouvoir confier les éléments dont ils ont été témoins, pour s'en rendre compte.
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