L'émission Dialogues Citoyens, diffusée le 14 avril sur France 2, a permis de mettre en exergue l'incapacité, le manque d’envergure et le manque de réussite de François Hollande, estime l'écrivain Dominique Jamet.
RT : Qu’est-ce qui vous a le plus interpellé dans l’intervention d’hier de François Hollande ?
Dominique Jamet : François Hollande, comme chacun sait, est dans une situation politique et personnelle plus que délicate puisque ses sondages sont au plus bas et que sa personne ne fait pas l’objet d’un respect et encore moins d’une admiration générale. Et ce qui m’a frappé hier c’est que le président de la République - puisque c’est son titre - a choisi d’assumer et il a voulu faire, cherché à faire, la pédagogie de son [mandat], à montrer qu’il avait fait beaucoup de choses. Et, effectivement, on constate - et c’est la moindre des choses - qu’en quatre années telles ou telles mesures ont été prises dans tel domaine économique, industriel, social etc. Ce qui, dans l’esprit du Président voulait dire qu’il n’est pas resté inactif, qu’il a tenu une grande partie de ses promesses, qu’on peut compter sur lui pour aller jusqu’au bout du quinquennat et continuer à reformer.
Sa formation d’énarque, son parcours d’apparatchik, son parti politique, son caractère, son manque d’imagination le rendent absolument inapte - ou très largement inapte en tout cas - à entrer dans le concret
Et en même temps, et de manière contradictoire, toutes les petites mesures de détails, toutes les réformettes, toutes les réformes minuscules qu’il a réalisées et qu’il a accumulées montrent bien qu’il n’a fait aucune grande réforme. Que sa formation d’énarque, son parcours d’apparatchik, son parti politique, son caractère, son manque d’imagination le rendent absolument inapte - ou très largement inapte en tout cas - à entrer dans le concret.
Il se perd dans des explications infinies et assez inintéressantes sur le détail de la taxe des CDD, sur le nombre de personnes qu’il faut pour qu’une PME passe de telle ou telle catégorie... Moi, voyez-vous, ce qui m’a frappé, je dirais, rétrospectivement, c’est que ce président, comme son prédécesseur, est incapable de dire des choses simples : il y a à l’heure actuelle tant d’étudiants en France qui sont mal logés, j’ai décidé la construction de logements, même provisoires, pour les loger. Il y a en France des gens qui vivent avec 500 euros par mois, ça n’est pas possible compte tenu de la réalité des prix et des difficultés de la vie en France, j’ai décidé que personne en France ne gagnerait moins de «tant» par mois. Il y a à l’heure actuelle des migrants qui sont bien malheureux puisque l’Angleterre n’en veut pas et que la France n’en veut pas non plus ; ils sont coincés à Calais, je vais résoudre le problème de telle et telle manière, soit en les expulsant vers l’Angleterre, soit en les ramenant dans leur pays d’origine ou encore en les acceptant en France. Vous voyez ce que je veux dire, ce sont trois exemples. François Hollande a pu défendre et justifier, enfin a pu essayer de défendre et de justifier, son bilan et je trouve que, à contrario, son incapacité, son manque d’envergure, son manque de réussite n’en sont apparus que plus flagrants.
Un certain nombre de gens sont tellement irrités, tellement déçus, tellement hostiles, tellement allergiques à François Hollande, qu’il est possible qu’ils aient décidé de le boycotter
RT : De quoi témoigne la faible audience de cette intervention télévisée ? Cela signifie-t-il que la population ne s’intéresse plus à son quinquennat ?
Dominique Jamet : Cela signifie trois choses, me semble-t-il. La première est que, instruits par une expérience de quatre ans, beaucoup de gens imaginaient à peu près ce que serait son intervention et estimaient qu’elle n’apporterait rien de nouveau, ni sur la personne ni sur la politique. Ensuite, c’est peut-être une impasse qu’ils ont faite sur François Hollande lui-même. Un certain nombre de gens sont tellement irrités, tellement déçus, tellement hostiles, tellement allergiques à François Hollande, qu’il est possible qu’ils aient décidé de le boycotter s’il y avait eu une campagne allant en ce sens sur les réseaux sociaux. Et enfin, tout simplement, un certain nombre de gens constatent que nous ne sommes plus qu’à un an de la fin du quinquennat, que le Président ne jouit pas d’un soutien suffisant dans l’opinion et d’un soutien suffisant au Parlement pour faire passer quoi que ce soit. Ils avaient donc prévu que rien de très concret, rien de très important ne serait annoncé.
Si nous votions demain François Hollande serait évidemment écrasé
RT : En ce qui concerne les perspectives de François Hollande pour 2017 : est-ce que tout est perdu pour lui ?
Dominique Jamet : Il y a une chose qui est certaine désormais - si l’on en doutait encore ! - c’est qu’il va se présenter. Comme la politique n’est pas une science exacte, ni dans le présent ni encore moins dans le futur, il serait bien aventureux de dire aujourd’hui ce que seront les résultats de la primaire de la droite fin novembre et ce que seront à fortiori les résultats de la présidentielle dans un an. Donc ce qui est clair, aujourd’hui, c’est effectivement qu’Hollande se présentera quoi qu’il arrive. Il fera tout pour empêcher une primaire à gauche, et sera donc le candidat des socialistes. Dans l’état actuel des choses, il est clair qu’il ne sera pas qualifié pour le second tour. Et c’est seulement un certain nombre de circonstances difficiles à prévoir mais sur lesquelles il compte, qui pourraient lui permettre de tirer son épingle du jeu. C’est-à-dire que si la sécurité est telle en France qu’on se retourne vers le chef de l’Etat, vers les pouvoirs publics en fonction, par exemple, ou si la croissance revient, si la gauche fait son union... il conserve une chance. Mais ces hypothèses ne sont pas réalisées pour l’instant, et si nous votions demain François Hollande serait évidemment écrasé.
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