La tentative d’assassinat sur le 45e président et le choix de J.D. Vance comme colistier ont assuré à Trump la victoire en novembre, estime Bradley Blankenship. Mais celui-ci ne la voit pas d'un bon œil. Explications.
Le 13 juillet, l’ex-président américain Donald Trump était victime d’une tentative d’assassinat. L’oreille éraflée, le candidat républicain a été rapidement évacué par le Secret Service, même si les critiques sur le manque apparent de sécurité lors de l’événement restent nombreuses.
Sans attendre, le candidat lui-même et d’autres faisant fructifier le spectacle avec T-shirts et produits dérivés, laissant penser que, comme toujours, ce sera Trump qui sortira vainqueur.
On peut dire sans exagérer que ce spectacle a scellé un nouveau mandat pour Trump. De nombreux experts et fonctionnaires républicains estiment que Donald Trump a une personnalité narcissique. Le narcissisme consiste notamment à jouer la victime. Si le narcissique s’empare du statut de victime, cela signifie l’équilibre entre le bien et le mal pour l’opposition. Dans le cas présent, Trump peut légitimement revendiquer ce titre, et il l’emportera vers le soleil couchant. Dans ce cas-là, le tireur a de fait donné à l’ancien président le plus beau cadeau qu’il ait jamais pu recevoir.
Sentiment victimaire, élément clé du mouvement MAGA
Il convient également de noter que le sentiment victimaire est l’un des éléments clés du mouvement MAGA. Trump et le parti républicain actuel puisent dans cette énergie, notamment la victimisation des Blancs, pour mettre en place une politique visant à mettre sur un pied d’égalité cette catégorie de Blancs ruraux jusque-là laissée pour compte, qui a perdu des opportunités du fait de la mondialisation.
La décision de Trump, le 15 juillet, de nommer le sénateur J.D. Vance représentant l’Ohio comme colistier reflète cette stratégie. Pour moi qui, comme Vance, réside depuis peu à Cincinnati, le sentiment qui règne dans la ville est palpable. Le sud de l’Ohio est un champ de bataille pour les nouvelles idées politiques et sociales.
De nombreux pans du pays souffrent de la destruction complète des valeurs communautaires et égalitaires tandis que d’autres l’adoptent, surtout la jeune génération. Au moment où les conflits raciaux et les fusillades de masse augmentent, les individus aspirent à l’innocence et à un lien avec un but supérieur.
Le parti démocrate ne correspond plus à l'esprit du temps
En choisissant J.D. Vance, Trump a bien fait comprendre sa position sur la question. La Nouvelle Droite et son aspiration à un passé idéalisé, ainsi que sa politique étrangère isolationniste, définiront l’avenir du parti républicain pour autant qu’on puisse le prévoir. Le parti démocrate, comme il aime à le faire, est coincé dans une politique qui ne correspond plus à l’esprit du temps, comme en témoigne la candidature du président sortant Joe Biden âgé de 81 ans. Son manque d’énergie, de charisme et d’inspiration générale est révélateur de l’échec de la politique démocrate actuelle, tout comme le sont vains efforts du parti pour endiguer l’émergence de son aile progressiste.
Dans les premiers jours de la course à la présidence, j’ai fait remarquer à de multiples reprises que la désunion au sein du parti républicain le conduirait à l’échec. Les républicains ont clairement corrigé ces erreurs. Le Grand Old Party a le dessus depuis longtemps en termes de ressources, d’organisation et d’unité idéologique. Il a maintenant fait naître une politique émergeante qui va une fois de plus oblitérer les conventions sociales qui font depuis longtemps la vie politique américaine. Les appels croissants au sein du parti démocrate à faire remplacer Joe Biden, même s’ils sont tout à fait justifiés, sont un signe certain qu’en réalité la course est déjà terminée.
L'Amérique sera perdante
Au global, il ne saurait y avoir de vainqueur pour l’élection de novembre. Que ce soit un narcissique vieillissant ou un libéral mollasson encore plus fossilisé qui l’emporte, l’Amérique est perdante. Le programme politique de Joe Biden n’a pas réussi à inspirer le pays suffisamment pour conjurer l’influence néfaste de Donald Trump. La fierté de Trump qui reflète celle d’une grande partie du pays aura raison de lui et entraînera des souffrances inouïes pour la nation. C’est si inévitable que l’orgueil est considéré depuis des temps immémoriaux dans les traditions chrétiennes et islamiques comme l’un des sept péchés capitaux qui mène à passer l’éternité en enfer.
Charles Bukowski écrit dans son poème Lost, qui fait partie de son livre de 1974 Brûlé dans l’eau noyé dans les flammes, que « ceux qui échappent à l’enfer, cependant, n’en parlent jamais et rien ne les dérange guère ensuite. » Il écrit que traverser l’enfer et en revenir est « la plus grande satisfaction pour l’homme. » Cette idée se reflète également dans l’archétype de l’arbre de vie, dont les racines descendent jusqu’à l’enfer, tandis que les branches touchent au ciel. Le chemin vers le salut, comme nous le dit l’exemple de la mort et de la résurrection de Jésus dans la Bible, passe par l’enfer.
Donald Trump va gagner. Cela fait peu de doute. Son orgueil, que nous pouvons considérer comme l’orgueil collectif de l’Amérique, enverra la nation en enfer. Pourtant, à la fin de cette expérience pénible, il y a l’opportunité de parvenir à un niveau meilleur et plus élevé grâce à la mort et à la renaissance symboliques de notre psyché collective. Comment cela se déroulera exactement, personne ne le sait.