International

Washington, Londres et Ottawa sanctionnent Poutine et Lavrov : signe d'«impuissance», pour Zakharova

Les Etats-Unis, le Royaume-Uni et le Canada ont annoncé une série de sanctions visant le président et le ministre russe des Affaires étrangères. Un signe de «l'impuissance absolue» des Occidentaux, selon la porte-parole de la diplomatie russe.

En conséquence de l'intervention militaire russe en Ukraine, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et le Canada ont annoncé le 25 février la mise en œuvre d'une série de sanctions visant personnellement le président russe Vladimir Poutine et son ministre des affaires étrangères Sergueï Lavrov – en plus des sanctions prises contre d'autres personnalités, entités et entreprises russes.

La porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a réagi le même jour en déclarant à la télévision russe que ces sanctions étaient «un exemple et une démonstration de l'impuissance absolue» de la politique étrangère de l'Occident. Selon elle, Vladimir Poutine et Sergueï Lavrov n'ont d'ailleurs pas de comptes dans d'autres pays que la Russie.

Aux Etats-Unis, actifs gelés et interdiction de voyager

Le 25 février, la porte-parole de la Maison Blanche Jen Psaki a annoncé que les Etats-Unis sanctionnaient Vladimir Poutine et Sergueï Lavrov en raison de l'«invasion» russe, leur interdisant l'entrée sur leur territoire – une décision hautement symbolique, contre des dirigeants étrangers.

Ella a indiqué que l'interdiction de voyager vers les Etats-Unis sera «une partie» de ces mesures, en ajoutant que cela était «un élément habituel» des sanctions prises contre des personnalités étrangères.

Les deux hommes rejoignent ainsi une liste de dirigeants directement sanctionnés par les Etats-Unis sur laquelle figurent le leader iranien Ali Khamenei, le président du Venezuela Nicolas Maduro, le nord-coréen Kim Jong Un, ou encore le président syrien Bachar el-Assad.

Qualifiant la décision d'«extrêmement rare», le Trésor américain a ensuite dévoilé dans un communiqué les détails du mécanisme de sanctions, précisant qu'elles s'appliqueraient aussi au ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou et au chef de l'Etat-Major général des forces armées russe, Valéry Guerassimov.

L'institution a précisé que les personnalités sanctionnées verraient tous leurs actifs aux Etats-Unis gelés, et qu'il serait interdit à toute personne ou entité américaine de faire affaire avec eux. Il est néanmoins difficile d'évaluer l'impact réel des sanctions financières – qui consistent à bloquer les fonds et propriétés des personnalités concernées – faute de détails sur le montant et la nature des actifs visés. Washington a également annoncé des sanctions contre 24 personnes et organisations biélorusses, accusées d'avoir soutenu et aidé à la mise en place de l'opération militaire russe en Ukraine.

Par la suite, Jen Psaki a annoncé sur Twitter que les Etats-Unis allaient également sanctionner le Russian Direct Investment Fund, une entité publique ayant vocation à attirer des investissements américains dans l'économie russe.

La première tranche des sanctions américaines globales concerne quatre banques russes, dont les deux plus grandes du pays, Sberbank et VTB Bank. Mais face à ces mesures, la Banque de Russie et le gouvernement ont d'ores et déjà annoncé le 25 février qu'ils soutiendraient les banques sanctionnées et leur apporteraient «toute l'assistance nécessaire».

Plus de la moitié des importations technologiques de la Russie vont aussi être supprimées par Washington. Le géant de l'énergie Gazprom et d'autres grandes entreprises du pays – 13 au total – ne pourront plus pour leur part lever d'argent sur les marchés financiers occidentaux, une sanction qui avait déjà été prise contre le gouvernement russe lui-même. Les exportations vers la Russie de produits technologiques destinés aux secteurs de la défense et de l'aéronautique ont également été restreints.

Le Royaume-Uni souhaite «infliger le maximum de souffrance» au Kremlin

Le 25 février également, le gouvernement britannique a annoncé avoir gelé les avoirs supposés de Vladimir Poutine et de Sergueï Lavrov. Le Trésor a indiqué avoir ajouté les deux hommes à sa liste des entités et individus ciblés par des sanctions en raison de leur rôle dans «la déstabilisation de l'Ukraine» ou «menaçant son intégrité territoriale». 

Le Premier ministre Boris Johnson avait informé ses alliés le jour même, lors d'un sommet de crise de l'OTAN, qu'il prévoyait de sanctionner «de manière imminente» le président russe et son chef de la diplomatie, après une série de sanctions décidées cette semaine visant notamment des oligarques et des banques russes. 

Qualifiant de «catastrophe» l'offensive russe et estimant que Vladimir Poutine était engagé dans une «mission revancharde pour renverser l'ordre post-Guerre froide», le dirigeant britannique a aussi exhorté ses homologues dans les pays membres de l'OTAN à «agir immédiatement» pour exclure la Russie du système bancaire Swift, «afin d'infliger le maximum de souffrance» au Kremlin, selon une porte-parole de Downing Street. 

En plus des cinq banques et de trois oligarques déjà sanctionnés le 22 février, le Royaume-Uni a imposé deux jours plus tard une nouvelle série de sanctions contre la Russie. Ces dernières interdisent la compagnie aérienne Aeroflot et ciblent le secteur bancaire, les exportations de technologies et cinq hommes d'affaires. En réaction, la Russie a notamment annoncé la fermeture de son espace aérien à tout avion lié au Royaume-Uni.

Le Canada veut «étouffer le régime russe»

Le 25 février toujours, le Premier ministre du Canada Justin Trudeau a annoncé que le pays allait mettre en place une «troisième série de sanctions concertées» visant précisément Vladimir Poutine et Sergueï Lavrov, mais aussi le gouvernement biélorusse qui a selon lui «facilité» l'intervention militaire russe en Ukraine.

«Le mépris du président Poutine pour la liberté, la démocratie, le droit international et la vie humaine doit avoir des conséquences», a déclaré en conférence de presse le chef du gouvernement canadien. Ce dernier a néanmoins noté que «le monde a réagi d'une manière sans précédent, unie et coordonnée à la grave erreur de Vladimir Poutine», l'un des hommes qui porte, selon lui, «la plus grande responsabilité des morts et destructions en Ukraine».

«Pourquoi faisons-nous cela ? Parce que nous voulons nous assurer d'étouffer le régime russe !», a quant à elle déclaré Mélanie Joly, ministre canadienne des Affaires étrangères.

Le 24 février, le Canada – qui compte la deuxième plus grande diaspora ukrainienne au monde – avait déjà sanctionné 58 individus et entités russes, et suspendu tous les permis d'exportation pour la Russie. En début de semaine, Ottawa avait annoncé une première salve de sanctions : interdiction des transactions avec les républiques populaires auto-proclamées de Donetsk et de Lougansk, sanctions contre des parlementaires et banques russes et interdiction aux Canadiens d'acheter de la dette russe. Ottawa a également suspendu les permis d'exportation pour la Russie, pour une valeur de plus de 700 millions de dollars canadiens (environ 490 millions d'euros) et visant notamment des entreprises du secteur aérospatial, minier et des technologies de l'information.

Après les tractations sans succès de ces derniers mois entre la Russie et des chancelleries occidentales sur le dossier ukrainien, l'armée russe a entamé le 24 février une intervention militaire dans le pays voisin, donnant lieu à de nombreuses condamnations sur la scène internationale. L'opération militaire vise, selon Vladimir Poutine à défendre les Républiques populaires autoproclamées de Donetsk et Lougansk (reconnues comme indépendantes par la Russie) contre Kiev, mais également à «démilitariser» et «dénazifier» l'Ukraine, selon ses termes. Elle a fait, dans des capitales occidentales mais aussi en Russie, l'objet de manifestations de contestation.