Whatsapp aurait aidé les autorités américaines à espionner 7 personnes en Chine, sans justification
La DEA aurait demandé à Whatsapp de fournir les données concernant l'utilisation de l'application de sept personnes basées en Chine et à Macao, sans avoir de preuve qu'ils aient commis une infraction. Ce à quoi se serait pliée l'entreprise.
Un mandat de perquisition datant de novembre 2021 – et récemment dévoilé – montre que la Drug Enforcement Administration (DEA, l'agence fédérale en charge de lutter contre le trafic de drogue) aurait ordonné à Whatsapp de surveiller sept utilisateurs basés en Chine et à Macao, sans connaître leur identité ni avoir de preuve qu'ils aient commis une infraction.
«Le mandat révèle que la DEA ne connaissait l'identité d'aucune des cibles, mais a demandé à WhatsApp de surveiller les adresses IP et les numéros avec lesquels les utilisateurs ciblés communiquaient, ainsi que le moment et la manière dont ils utilisaient l'application», révèle le journaliste de Forbes Thomas Brewster, le 17 janvier.
New - WhatsApp can be told by US to provide data on any user, anywhere, without showing probable cause.
— Thomas Brewster (@iblametom) January 17, 2022
Feds don't even need to know the identities of WhatsApp users it’s targeting, as in an unreported investigation into Chinese opioid sellers: https://t.co/tKfYSwuk0e
Pour décider de mettre en place cette surveillance – dans le cadre d'une d'enquête sur l'importation d'opioïdes en provenance de Chine –, il aurait suffi au gouvernement américain de déclarer que «les informations susceptibles d'être obtenues [étaient] pertinentes pour une enquête criminelle en cours menée par cette agence». En d'autres termes pour émettre le mandat, il n'aurait donc pas été nécessaire de fournir la preuve qu'un quelconque crime ait été commis.
Etonnamment permissive pour les autorités, cette procédure est devenue possible à la faveur d'une loi vieille de 35 ans, le Pen Register Act, adoptée par le biais de l'Electronic Communications Privacy Act en 1986. Cette loi offre à la police la possibilité de contourner les protections normalement garanties par le 4e amendement de la Constitution contre les perquisitions et les saisies déraisonnables par le gouvernement, en permettant de ne pas avoir à fournir de cause probable pour déclencher ladite perquisition.
Et à en croire Forbes, la pratique est désormais courante : WhatsApp aurait ainsi déjà reçu dans des circonstances similaires l'ordre de surveiller quatre utilisateurs au Mexique. Preuve en est que les opérations de surveillance du gouvernement américain via la Big Tech dépassent régulièrement les frontières du pays.
Dans sa FAQ, Whatsapp ne s'en cache d'ailleurs pas, affirmant «apprécier le travail des agences chargées de faire respecter la loi pour assurer la sécurité des personnes dans le monde entier». L'entreprise se dit ainsi «prête à examiner soigneusement, valider et répondre aux demandes des organismes chargés de faire respecter la loi en fonction de la loi et des politiques applicables». L'année passée, un document du Federal Bureau of Investigation (FBI) ayant fuité avait montré que WhatsApp était l'un des services de messagerie les plus disposés à fournir des données aux autorités américaines.
Début janvier, l'armée suisse a interdit l'utilisation de WhatsApp – mais aussi de ses concurrents Signal, Telegram et d'autres services de messagerie cryptée étrangers – pour les communications officielles des militaires, soulignant la possibilité qu'avaient les autorités américaines d'accéder aux données des entreprises soumises à sa législation.