Caricatures : les islamistes auraient obtenu d'Islamabad un boycott officiel des produits français
Le mouvement islamiste Tehreek-e-Labaik a appelé à cesser les manifestations anti-françaises au Pakistan car le gouvernement lui aurait donné gain de cause en approuvant le boycott des produits français et le renvoi de l’ambassadeur de France.
Le mouvement islamiste pakistanais Tehreek-e-Labaik («Je suis là») a lancé le 17 novembre un appel à l’arrêt des manifestations contre la publication en France des caricatures de Mahomet, ce en échange d'un boycott officiel des produits français et de la rupture des relations diplomatiques avec Paris.
«Nous renonçons à nos manifestations après la signature par le gouvernement d’un accord en vertu duquel il approuvera officiellement le boycott des produits français», a ainsi déclaré à Reuters Ejaz Ashrafi, porte-parole du Tehreek-e-Labaik, joint par téléphone.
Aucun représentant du gouvernement pakistanais n’a pu être contacté, mais les signatures de deux ministres figurent sur une copie de l’accord que le mouvement a fournie à Reuters. Il prévoit en outre que le parlement demande l’expulsion de l’ambassadeur de France dans les trois mois.
Tous les membres et les dirigeants du Tehrik-i-Labaik arrêtés lors des manifestations doivent par ailleurs être libérés, selon son porte-parole, qui s’est exprimé après avoir lui-même bénéficié de cette mesure.
Manifestations anti-françaises à répétition
Des heurts avaient éclaté la veille entre partisans du mouvement et forces de l’ordre à Islamabad lors d’une de ces marches anti-françaises qui ont lieu depuis plusieurs semaines : à l'appel du chef du Tehreek-e-Labaik Khadim Hussain Rizvi, un millier de manifestants s'étaient massés devant un barrage routier formé par les forces de l'ordre pour empêcher les protestataires d'accéder à la capitale, où ils comptaient défiler, provoquant des embouteillages monstres. Le 15 novembre, un rassemblement à Rawalpindi, ville-garnison accolée à la capitale, avait attiré quelque 5 000 personnes, selon des photographes de l'AFP.
A l’occasion de l’ouverture du procès de l’attentat qui a fait douze morts dans ses locaux en janvier 2015 après la première publication des caricatures de Mahomet, l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo les avait republiées en septembre 2020. Une initiative condamnée par les autorités pakistanaises. Après les déclarations d'Emmanuel Macron défendant le droit à la caricature au nom de la liberté d'expression, le Premier ministre pakistanais Imran Khan avait accusé fin octobre le président français d'«attaquer l'islam» et l'ambassadeur de France au Pakistan avait été convoqué afin d'entendre les griefs des autorités contre la «campagne islamophobe systématique sous couvert de liberté d'expression [du président français]».
Après l'attentat du 25 septembre devant les anciens locaux de Charlie Hebdo ayant fait deux blessés graves, l'homme affirmant être le père de l'auteur de l'attaque avait déclaré depuis son village au Pakistan être «très fier» des actes de son fils, celui-ci ayant «protégé l'honneur du prophète».