L'Organisation des Nations unie (ONU) a salué le 26 mars la proclamation de cessez-le-feu de plusieurs pays en guerre face à la pandémie de Covid-19. En effet, coup sur coup, des cessez-le-feu ont été évoqués ces derniers jours aux Philippines, au Cameroun, en Colombie, au Yémen ou encore en Syrie.
Ces pays, parfois enlisés dans des conflits depuis plusieurs années, ont ainsi répondu favorablement à l'appel d'«un cessez-le-feu immédiat, partout dans le monde» lancé le 23 mars par le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, auquel se sont ensuite associés l'Union européenne (UE) et le pape François.
Un bref répit en Syrie
La crise sanitaire mondiale provoquée par la pandémie de Covid-19 peut également avoir quelques effets inattendus et réjouissants. Et pour cause, le 26 mars au soir, le porte-parole de l'ONU, Stéphane Dujarric, a «salué la déclaration des Forces démocratiques syriennes (SDF) du 24 mars» soutenant l'idée d'un cessez-le-feu et leur «engagement à éviter les actions militaires» dans le nord-est du pays, dans un communiqué. «Le secrétaire général appelle les autres parties au conflit syrien à soutenir son appel» à l'arrêt des combats, a-t-il également ajouté.
Quelques jours plus tard, le 31 mars, le président des Etats-Unis, Donald Trump, et le président de la Turquie, Recep Tayyip Erdogan, ont convenu, lors d'un échange téléphonique de «l'importance» pour les pays en conflit, comme la Syrie et la Libye, «d'adhérer à un cessez-le-feu» en cette période de crise sanitaire mondiale, a indiqué la Maison Blanche.
«Les présidents Trump et Erdogan sont d'accord sur le fait qu'il est plus important que jamais que les pays en conflit, en particulier la Syrie et la Libye, adhèrent à un cessez-le-feu et travaillent à une solution», a écrit l'exécutif américain dans un communiqué repris par l'AFP. Et de poursuivre : «Les deux dirigeants se sont mis d'accord pour travailler ensemble et en bonne coordination sur la campagne internationale pour vaincre le virus et soutenir l'économie mondiale.»
L'ELN déclare un cessez-le-feu
En Colombie, l'Armée de libération nationale (ELN) a annoncé le 30 mars un cessez-le-feu unilatéral d'un mois, «geste humanitaire» motivé par la pandémie de Covid-19, selon un communiqué diffusé par des sénateurs favorables à un processus de paix avec ce groupe armé.
«L'Armée de libération nationale [...] a déclaré un cessez-le-feu unilatéral actif, à partir du 1er avril et jusqu'au 30, comme un geste humanitaire envers le peuple colombien qui souffre du drame du coronavirus», a écrit l'ELN dans ce document.
Le groupe rebelle y évoque d'une part, l'appel de l'ONU à un cessez-le-feu de tous les conflits dans le monde, et d'autre part, la demande «dans le même sens» émise par des «organisations sociales et politiques de Colombie».
Le 26 mars, au lendemain du confinement total de la Colombie en raison du Covid-19, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) avait annoncé la libération par l'ELN de trois otages de nationalité colombienne enlevés il y a un mois.
«Les Socadef sont prêts à soutenir le cessez-le-feu»
«Les Socadef sont prêts à soutenir le cessez-le-feu et garantiront sécurité et libre circulation aux observateurs internationaux et aux acteurs humanitaires en Ambazonie […] conformément au droit international humanitaire», a déclaré Ebenezer Akwanga, leader du mouvement indépendantiste, dans un courrier signé à Accra, au Ghana, le 25 mars et adressé au président camerounais, Paul Biya, d'après Jeune Afrique.
Le chef des Socadef, également à la tête du Mouvement de libération des peuples africains (APLM), en a profité pour appeler les «autorités et les forces de sécurité de la République du Cameroun à répondre à l'appel du secrétaire général des Nations unies», toujours selon l'hebdomadaire panafricain. Il a également ajouté : «Nous sommes prêts à rencontrer des représentants désignés de la République du Cameroun pour une bonne application du cessez-le-feu.»
Ebenezer Akwanga s'est ainsi engagé à cesser toute hostilité à compter du 29 mars et pour une durée de 14 jours. Il a par ailleurs précisé qu'il maintiendrait ses positions afin d'être prêt à se défendre si besoin.
«Nous accueillons favorablement le cessez-le-feu temporaire annoncé le 25 mars par les Forces de défense camerounaises du sud (Socadef)», a déclaré pour sa part à New York le porte-parole de l'ONU, Stéphane Dujarric, selon l'AFP.
Une accalmie au Yémen et aux Philippines.
Dans un communiqué du 26 mars, Martin Griffiths, l'émissaire de l'ONU au Yémen, pays ravagé par la guerre depuis plus de cinq ans, a salué les «réponses positives» des rebelles Houthis et du gouvernement yéménite en faveur d'un cessez-le-feu afin de mieux lutter contre le Covid-19 et de permettre une pause humanitaire. «J'attends des parties qu'elles se tiennent à leurs paroles et mettent l'intérêt du peuple yéménite avant tout», avait-il ajouté, réclamant une «réunion urgente» avec elles pour mettre en pratique le cessez-le-feu.
Toutefois, la coalition militaire dirigée par l'Arabie Saoudite qui intervient au Yémen en soutien aux forces gouvernementales a mené le 30 mars de multiples frappes aériennes sur Sanaa, la capitale aux mains des rebelles Houthis qui ont revendiqué de récentes attaques de missiles sur Ryad.
Quelques jours avant, le porte-parole de l'ONU, Stéphane Dujarric, s'était déjà félicité du cessez-le-feu temporaire annoncé le 24 mars par le Parti communiste des Philippines avec le gouvernement de ce pays.
«L'heure est venue de laisser les conflits armés derrière nous»
Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, avait lancé le 23 mars un appel «à un cessez-le-feu immédiat, partout dans le monde» afin de préserver, face à la «furie» de la pandémie de Covid-19, les civils les plus vulnérables dans les pays en conflit.
«La furie avec laquelle s'abat le virus montre bien que se faire la guerre est une folie», avait-il souligné lors d'une brève allocution au siège de l'ONU sans citer de pays en particulier. «Si les combats se poursuivent, nous pourrions avoir une extension absolument dévastatrice de l'épidémie», avait-il mis en garde. Et de continuer : «L'heure est venue de laisser les conflits armés derrière nous pour concentrer nos efforts sur le véritable combat de nos vies.»
Mettons un terme au fléau de la guerre et luttons contre la maladie qui ravage notre monde. Cela commence par l’arrêt des combats. Partout. Tout de suite
«Déposez les armes, faites taire les canons, mettez fin aux frappes aériennes», avait-il exhorté en soulignant que c'était «essentiel» pour «établir des couloirs d’aide humanitaire qui sauveront des vies». Et d'insister : «Mettons un terme au fléau de la guerre et luttons contre la maladie qui ravage notre monde. Cela commence par l’arrêt des combats. Partout. Tout de suite.»
Après la sollicitation lancée par Antonio Guterres à la solidarité avec les pays pauvres et vulnérables afin d'éviter des «millions» de morts, les Nations unies avaient prévu de lancer le 25 mars un plan de réponse humanitaire mondial à la pandémie de coronavirus, avec un appel à financements à hauteur de 2 milliards de dollars pour un fonds dédié à cette lutte.
De son côté, le pape argentin François s'était associé le 29 mars à l'appel lancé par l'ONU en faveur d'un cessez-le-feu immédiat et mondial. Enfin, l'UE appelait également le 29 mars à un cessez-le-feu dans toute la Syrie pour aider à mettre sur pied une meilleure réponse à la pandémie de coronavirus.
Toutefois, même en pleine pandémie, les Etats-Unis restent sourds aux demandes de suspension des sanctions qui frappent des pays gravement touchés par la crise sanitaire, comme l'Iran, voire renforcent leurs mesures punitives. L'Iran, la Russie, la Chine, le Venezuela, la Corée du Nord, le Nicaragua, Cuba et la Syrie ont demandé, dans une lettre adressée au secrétaire général de l'ONU et rendue publique le 26 mars, de faire pression sur les Etats-Unis pour qu'ils lèvent leurs sanctions qui s'opposent, selon eux, à une lutte mondiale et efficace contre le Covid-19. Une attitude qui provoque l'incompréhension de nombre d'observateurs.