Bolivie : aspergée de peinture, ses cheveux coupés, une maire humiliée par des opposants à Morales
La maire d'une ville bolivienne a été la cible de manifestants de l'opposition au président réélu Evo Morales. Ceux-ci l'ont enlevée, aspergée de peinture, lui ont coupé les cheveux et l'ont forcée à marcher pieds nus sur des kilomètres.
Le président bolivien Evo Morales a condamné le 7 novembre l'humiliation subie par une maire de son parti, couverte de peinture rouge et forcée à marcher pieds nus sur plusieurs kilomètres par une foule hostile au chef de l'Etat, dont la réélection est contestée par l'opposition. Les bourreaux ont également coupé les cheveux de l'édile et lui ont fait signer une lettre de démission improvisée, rapporte le New York Times.
«Toute ma solidarité avec notre sœur, la maire de Vinto, Patricia Arce, kidnappée et offensée cruellement pour avoir exprimé et défendu ses idées et les plus pauvres», a écrit sur Twitter Evo Morales à propos de cet incident survenu la veille.
Toda mi solidaridad con nuestra hermana alcaldesa de Vinto, Patricia Arce, secuestrada y vejada cruelmente por expresar y defender sus ideales y los principios de los más pobres. Condenamos las acciones violentas que causan luto y dolor en la familia boliviana.
— Evo Morales Ayma (@evoespueblo) November 7, 2019
«Cela n'était jamais arrivé en démocratie, cela s'appelle le fascisme. Attaquer des femmes, les agresser à cause de leur condition ethnique. La Bolivie fait face à une vague de fascisme», a ajouté le vice-président Alvaro Garcia Linera, également membre du Mouvement vers le socialisme (MAS), actuellement au pouvoir.
La scène est survenue le 6 novembre après-midi à Vinto, ville du département de Cochabamba, dans le centre du pays. Des manifestants au visage dissimulé ont fait irruption dans la mairie, ont sorti de force la maire Patricia Arce de son bureau et ont mis le feu au bâtiment public.
Je n'ai pas peur [...] Pour ce processus de changement, je donnerai ma vie
Ils ont ensuite recouvert la femme de peinture rouge, coupé une partie de ses cheveux, et l'ont forcée à marcher pieds nus sur près de cinq kilomètres sous les insultes et les menaces, comme le montrent les images circulant sur les réseaux sociaux et les médias locaux et régionaux.
[#VIDEO] Manifestantes de la oposición boliviana pasearon pintada a la alcaldesa de Vinto, Patricia Arce https://t.co/KGaQHWrm0epic.twitter.com/rx19NIgVnA
— NTN24 Venezuela (@NTN24ve) November 8, 2019
Ce n'est qu'au bout de plus d'une heure que l'édile a été secourue par les forces de l'ordre. Juste après l'incident, toujours dans le même état physique, Patricie Arce s'est exprimée devant de nombreux médias. «Je n'ai pas peur de dire ma vérité, je suis dans un pays libre. Je ne vais pas me taire, s'ils veulent me tuer, qu'ils me tuent. Pour ce processus de changement, je donnerai ma vie», a-t-elle notamment déclaré.
#Bolivia la dignidad es una mujer!
— Manel Márquez (@manelmarquez) November 8, 2019
"No tengo miedo por decir mi verdad. Y estoy en un país libre. Y no voy a callar y si quieren matarme que me maten... Por este proceso de cambio voy a dar mi vida" Patricia Arce, Alcaldesa de Vinto atacada por la derecha!pic.twitter.com/IDS75CnKGB
La maire était le lendemain en train de «se remettre» de cet incident, ont fait savoir ses services au quotidien local Los Tiempos.
La ville de Vinto est secouée, comme une partie du pays, par des incidents depuis la réélection contestée, le 20 octobre, du président indigène à un quatrième mandat. Evo Morales a pourtant remporté le scrutin avec plus de 47% des voix, dépassant son principal rival de plus de 10 points. De ce fait, il a été élu dès le premier tour comme le prévoit la constitution bolivienne.
L'humiliation de la maire a été largement dénoncée au delà des frontières du pays. «Les Nations unies déplorent la violence et le traitement inhumain subi par la maire de la localité de Vinto, ainsi que les agressions visant d'autres femmes, hommes et enfants», a déclaré la représentation bolivienne de l'ONU dans un communiqué.
Les manifestations qui secouent la Bolivie depuis le 20 octobre ont fait trois morts et quelque 200 blessés dans les deux camps.
Meriem Laribi
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