Dépassement de limite d'uranium : la Russie appelle l'Iran à «ne pas céder à l'émotion»
Alors que l'Iran a annoncé avoir dépassé les seuils d'uranium enrichi prévu par l'accord de 2015 – dont les Etats-Unis se sont retirés unilatéralement – Moscou et Pékin ont pressé Téhéran de faire volte-face, tout en tenant Washington responsable.
Fait plutôt rare, Moscou et Pékin ont conseillé de concert à l'Iran de revenir sur son dépassement de la limite imposée à ses réserves d'uranium enrichi annoncé la veille. Cette limite était prévue par l'accord de 2015 sur le nucléaire iranien, dont les Etats-Unis ont décidé de se retirer unilatéralement. Par la voix de son chef de la diplomatie, Sergueï Lavrov, Moscou a ainsi appelé ce 2 juillet l'Iran à «ne pas céder à l'émotion».
«Nous appelons nos collègues iraniens à la retenue, à ne pas céder à l'émotion et à respecter les dispositions essentielles de l'accord [signé à Vienne en 2015]», a-t-il fait savoir. Dans le même temps, le ministre russe des Affaires étrangères a également invité les Européens à «remplir leurs promesses, leurs obligations et à tout faire pour que le mécanisme qu'ils ont créé [pour permettre aux entreprises européennes de continuer de travailler avec l'Iran malgré les sanctions] soit réellement opérationnel».
«Sans cela, il sera très difficile de mener un dialogue constructif et productif sur le sauvetage de l'accord», a-t-il encore estimé. La veille, la Russie avait déjà dit «regretter» le dépassement de la limite des 300 kilos d'uranium faiblement enrichi par Téhéran, tout en appelant à «ne pas dramatiser» cette première entrave au texte de 2015. Moscou avait aussi dénoncé la «pression sans précédent» à laquelle l'Iran est soumis par les Etats-Unis depuis la décision de Donald Trump de se retirer unilatéralement de l'accord sur le nucléaire en mai 2018.
L'Iran souhaite obtenir des garanties permettant de contrer les effets du retrait américain du pacte
Ce même jour, Pékin a également dit déplorer le dépassement par l'Iran de la limite à ses réserves d'uranium faiblement enrichi. «La Chine déplore les mesures prises par l'Iran. Dans le même temps, nous avons souligné à maintes reprises que la pression maximale des Etats-Unis est la source des tensions actuelles», a déclaré Geng Shuang, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.
«Nous appelons toutes les parties à voir la situation dans une perspective globale sur le long terme, à faire preuve de retenue et à faire respecter [l'accord], afin d'éviter une nouvelle escalade», a-t-il en outre déclaré au cours d'un point presse régulier. Le gouvernement iranien avait annoncé la veille, comme il avait menacé de le faire, avoir dépassé cette limite. L'Agence internationale de l'énergie atomique a confirmé le franchissement.
Le président américain Donald Trump avait accusé dans la foulée l'Iran de «jouer avec le feu», sur fond de tensions déjà vives entre les deux pays, faisant craindre un embrasement dans la région stratégique du Golfe. Le chef du gouvernement israélien, grand rival de l'Iran, Benjamin Netanyahou, avait lui appelé les Européens à «agir».
La France, l'Allemagne, le Royaume-Uni, la Russie et la Chine cherchent à maintenir ce texte signé à Vienne.
Or l'intensification des sanctions américaines contre l'Iran (qui sont en vigueur depuis la Révolution islamique de 1979 qui mettait fin au gouvernement du Shah soutenu par Washington) touche durement l'Iran, lui faisant perdre la quasi-totalité de ses acheteurs de pétrole. Dans ce contexte, le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, a redit le 1er juillet la détermination de son pays à continuer de se désengager progressivement de l'accord, tant qu'il n'obtiendrait pas les garanties qu'il demande aux autres parties – notamment aux Européens – afin de contrer les effets du retrait américain du pacte.