Troubles en Ethiopie : le chef d'état-major et un président de région tués
- Avec AFP
Deux hauts responsables éthiopiens ont été tués dans une tentative de renversement du gouvernement d'une des neuf régions autonomes du pays. La nouvelle intervient alors que des tensions interethniques resurgissent depuis plus d'un an.
Le chef d'état-major de l'armée éthiopienne et un dirigeant régional ont été tués dans une tentative de renversement du gouvernement d'un grand Etat du nord-ouest. Dans la soirée du 22 juin, «une tentative orchestrée de coup d'Etat s'est produite contre l'exécutif du gouvernement régional de l'Amhara», une des neuf régions autonomes d'Ethiopie, a déclaré le bureau du chef du gouvernement dans un communiqué sur Twitter.
Le président de la région, Ambachew Mekonnen, et un de ses conseillers «ont succombé aux blessures» infligées lors de l'attaque dirigée par le chef de la sécurité de l'Amhara, le général Asaminew Tsige, selon le communiqué. Un autre haut responsable régional a été grièvement blessé. La porte-parole du gouvernement, Billene Seyoum, avait auparavant déclaré que le «commando de tueurs» avait visé une réunion de hauts responsables locaux.
«En relation avec la tentative de coup d'Etat dans la région d'Amhara», le chef d'état-major des forces armées éthiopiennes, le général Seare Mekonnen, a été tué par son garde du corps à son domicile d'Addis Abeba, la capitale fédérale, selon les services du Premier ministre. Un général à la retraite qui lui rendait visite a également été abattu. Le garde du corps a été arrêté ainsi que de nombreux participants à l'attaque contre le gouvernement de l'Amhara, tandis que des opérations se poursuivaient pour retrouver le reste du commando.
Selon d'autres sources, le chef de la sécurité locale est toujours en fuite. Le général Asaminew Tsige avait été amnistié et libéré de prison en 2018 après avoir été arrêté pour un présumé complot remontant à 2009. «La situation dans la région d'Amhara est actuellement totalement sous le contrôle du gouvernement fédéral en coopération avec le gouvernement régional», a assuré le bureau du Premier ministre.
Volonté de réforme
Le 2 juin au soir, le gouvernement éthiopien avait dénoncé une tentative de «coup d'Etat» perpétrée par un «groupe armé» en Amhara, la deuxième région la plus peuplée du pays. Selon un journaliste présent à Bahir Dar, la capitale régionale, des coups de feu y ont été entendus pendant plusieurs heures. L'ambassade des Etats-Unis à Addis Abeba a recommandé à son personnel de se mettre à l'abri après des informations sur des tirs dans la capitale et des violences en Amhara. En outre, Internet était coupé en Ethiopie et peu d'informations étaient disponibles.
Mais pour les observateurs, ces événements illustrent la crise qui secoue le pays longtemps gouverné de manière autoritaire, où le Premier ministre Abiy, arrivé au pouvoir l'an dernier, a entrepris des réformes, sans qu'on puisse encore bien expliquer ces derniers troubles.
Deuxième pays le plus peuplé du continent avec une centaine de millions d'habitants, l’Ethiopie possède l'économie la plus dynamique d'Afrique de l'Est tout en restant l'un des pays les plus pauvres au monde.
Tensions interethniques
Les Amharas y représentent le deuxième groupe ethnique après les Oromos et ces deux ethnies ont été à l'avant-garde de deux ans de grandes manifestations qui ont provoqué la chute de l'ancien Premier ministre, Hailemariam Desalegn. Son successeur, Abiy Ahmed, un Oromo, au pouvoir depuis avril 2018, s'est efforcé de démocratiser le pays.
Il a notamment légalisé des groupes dissidents, amélioré la liberté de la presse et limité les atteintes aux droits de l'homme en faisant arrêter des dizaines de responsables de l'armée et des services de renseignement. Il a également lancé un programme de réformes économiques et fait la paix avec l'Erythrée voisine après plus de vingt ans de conflit.
Mais cette libéralisation a aussi permis l'expression de mécontentements, notamment des tensions interethniques généralement liées à la possession des terres et à l'utilisation des ressources. Plus d'un million de personnes ont été déplacées en raison de ces violences, que les analystes attribuent également à l'affaiblissement du Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (EPRDF), le parti au pouvoir autrefois tout-puissant, et à divers groupes qui profitent de la phase actuelle de transition politique pour essayer d'imposer leurs intérêts. En juin 2018, une attaque à la grenade contre un meeting auquel participait Abiy Ahmed avait fait deux morts. Le procureur général avait incriminé un officier du renseignement non identifié.
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