Pour Poutine, le nouveau président ukrainien est «un bon comédien»
Le président russe a participé ce 7 juin à la séance plénière du Davos russe, le Forum économique de Saint-Pétersbourg. Interrogé sur le nouveau président ukrainien, il a réservé son diagnostic dans l'attente de ses choix politiques.
«Incarner quelqu'un c'est une chose. Etre quelqu'un, c'en est une autre», a jugé, à fleurets mouchetés, Vladimir Poutine, interrogé au Forum économique de Saint-Pétersbourg à propos de Volodymyr Zelensky, nouveau président ukrainien et comédien de profession. Ce chef d'Etat succède à Petro Porochenko, dont le quinquennat a été marqué par des relations conflictuelles avec la Russie.
Ce Davos russe, la plus grande réunion économique de l’année dans le pays, a accueilli pendant deux jours dans l’ancienne capitale impériale 17 000 participants venant de 75 pays. Le président russe s'y est vu demander s'il comptait rencontrer son homologue ukrainien,
«J'espère que nous nous rencontrerons un jour», a souhaité Vladimir Poutine.
Pas de jugement prématuré
Evoquant à la pince-sans-rire le passé de comédien du président ukrainien, Vladimir Poutine a précisé les qualités indispensables d'un politique : «Pour jouer, il faut du talent, pour se réincarner, mais pour faire des affaires publiques, il faut de l’expérience, des connaissances. Il faut être capable de voir les problèmes principaux et de trouver des outils pour les résoudre. De bâtir une équipe de gens compétents, faciliter leurs relations et leur donner l’occasion de penser et de prendre des décisions en toute liberté, d’expliquer à des millions de personnes les motivations de son comportement lors de la prise de décisions. Et surtout, il faut avoir le courage et la moralité d’assumer la responsabilité des conséquences de ses décisions.»
Volodymyr Zelensky a surtout dû sa victoire du 21 avril à sa notoriété acquise à la télévision ukrainienne et sur les réseaux sociaux en tant qu'acteur ou humoriste, et ne peut se prévaloir d'un quelconque parcours politique.
Pour jouer, il faut du talent pour se réincarner, mais pour faire des affaires publiques, il faut de l’expérience, des connaissances
«Je ne dis pas que M. Zelensky n'a pas ces qualités», a poursuivi Vladimir Poutine. «Probablement les a-t-il. Peut-être manque-t-il d'expérience, mais comme on dit chez nous, on peut l’acquérir, et vite. Pour le moment, elles ne se sont pas manifestées. Actuellement, nous entendons des déclarations contradictoires : avant les élections, il disait une chose, après, d'autres. On verra ce que la vie nous réservera. Je ne dis pas qu'il a dégradé la situation sans même avoir commencé à faire quoi que ce soit, nous verrons», a déclaré le chef d'Etat russe.
Lors de ses rares déclarations de politique étrangère, Volodymyr Zelensky s'est notamment dit confiant dans la recherche d'une solution pacifique, diplomatique avant tout, au conflit dans le Donbass, où les républiques autoproclamées de Lougansk et Donetsk tiennent toujours tête à l'armée régulière de Kiev. «Nous allons poursuivre le processus de Minsk, nous allons le relancer», a-t-il déclaré dès sa première conférence de presse après le deuxième tour de l'élection présidentielle. Parmi les intentions paradoxales mentionnées par Vladimir Poutine peuvent figurer la volonté du chef d'Etat ukrainien de négocier avec le président russe, tout en souhaitant voire revenir les territoires dans le giron ukrainien.
Lors de la campagne de la présidentielle ukrainienne, Volodymyr Zelensky s'était déclaré convaincu de pouvoir «casser le système». S'il réussit à tourner la page de la présidence Porochenko, il lui faudra ensuite s'attaquer à son bilan : une économie ruinée sous perfusion du Fonds monétaire international(FMI), et une quasi-sécession du Donbass.