Lavrov : les bombardements de la Serbie en 1999, «une violation flagrante» du droit humanitaire
20 ans après les frappes de l'OTAN en Serbie, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavorv a livré son analyse des événements : ces frappes ont inauguré une ère d'inversion des règles des relations internationales par les Occidentaux.
A l'occasion de la commémoration du 20e anniversaire de la campagne de bombardements de l'OTAN sur la Serbie et le Kosovo, en 1999, le ministre russe des Affaires étrangères s'est exprimé dans le cadre du documentaire Demi-tour au-dessus de l'Atlantique [en référence au demi-tour au-dessus de l'océan Atlantique du Premier ministre russe Evgueni Primakov, alors en vol pour Washington, le premier jour des frappes de l'OTAN sur la Serbie] diffusé sur la chaîne russe NTV, d'après un article de l'agence Tass en date du 22 mars.
Le chef de la diplomatie russe a notamment rappelé le contexte de l'époque, soulignant que, selon lui, le droit international n'avait pas été respecté. «L’opération de bombardement de la Serbie a été effectuée en violation flagrante de tous les principes du droit humanitaire international, parce que des objectifs purement civils ont été frappés. Par exemple, il y a eu un incident avec un train de voyageurs qui, en traversant le pont, a été bombardé par la coalition de l’OTAN», a rappelé le ministre russe, faisant référence à la frappe d'un train sur le pont de Grdelica (dans le sud de la Serbie) et à plusieurs autres «erreurs de tir» de l'OTAN, comme les qualifiait Libération en avril 1999. «Ces erreurs de tir s'expliquent par la méthode de bombardement choisie par l'OTAN, afin de limiter les risques pour les pilotes», expliquait encore le quotidien, qui tenait alors la chronique de l'intervention de l'Alliance contre la Serbie.
Sergueï Lavrov est également revenu sur le massacre de Racak, petit village du Kosovo où 45 Albanais furent exécutés le 15 janvier 1999. Une tuerie considérée comme un casus belli par la diplomatie américaine pour frapper la Serbie, mais dont le déroulement et la nature des auteurs sont controversés. «Ce n’était pas la raison, mais un prétexte artificiel. On sait depuis longtemps que c’était une provocation. On en a parlé et on l’a écrit à maintes reprises, on en a apporté les preuves. Les soi-disant "civils" tués étaient en réalité des militaires, combattants de l’armée albanaise de libération, la soi-disant "Armée de libération du Kosovo" [UCK], déguisés en civil», a développé Sergueï Lavrov dans le cadre du documentaire Demi-tour au-dessus de l'Atlantique. Et de préciser encore : «On sait depuis longtemps que c’était un "piège". Malheureusement, cette provocation a été organisée par le chef de la mission de l’OSCE [Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe] de l’époque, l’Américain William Walker qui, après être arrivé sur les lieux et avoir trouvé les cadavres qui avaient été, comme je l’ai déjà dit, soigneusement déguisés en civil, a déclaré juste là-bas, sur place, qu’il s’agissait d’un acte de génocide.»
Les Américains se sont engagés sur la voie de la destruction du droit international
Mais au-delà de ces événements dramatiques, Sergueï Lavrov, fort de son expérience à la tête de la diplomatie russe depuis 2004, voit dans le démantèlement de la Yougoslavie et dans les frappes de l'OTAN contre la Serbie un moment marquant de retournement dans les relations internationales. «A l’époque, le processus de retournement des valeurs avait été entamé et les Américains se sont engagés sur la voie de la destruction du droit international et de son remplacement par certaines règles qui sont censées être à la base de l’ordre», a-t-il analysé. Et de conclure : «La série des aventures initiées à l’époque se poursuit à ce jour. On observe le renforcement de la tendance à remplacer le droit international par des règles inventées uniquement dans l'intérêt des Etats-Unis et de leurs alliés. Il faut y faire face.»