La barbe pour un médecin... licencié pour atteinte à la laïcité
Un médecin stagiaire s'était fait renvoyer d'un hôpital de Saint-Denis à cause d'une barbe jugée religieusement ostentatoire. La cour administrative d’appel de Versailles vient de confirmer le licenciement pour manquement au respect de la laïcité.
Une décision qui peut faire jurisprudence ? Le 19 décembre, la cour administrative d’appel de Versailles a rejeté la requête du médecin stagiaire égyptien qui contestait son licenciement, daté de février 2014.
Le motif du renvoi ? Le port d'une barbe qui avait été considérée comme une «manifestation ostentatoire d'une appartenance religieuse» par son employeur, le centre hospitalier de Saint-Denis. Toutefois, si le tribunal donne raison à l'hôpital, les magistrats estiment que «le port d'une barbe, même longue, ne saurait à lui seul constituer un signe d'appartenance religieuse».
La validation du licenciement tient plutôt du contexte dans lequel le licenciement s'est effectué. En effet, dans sa décision, la cour de Versailles a considéré que les «circonstances» donnaient raison à l'hôpital.
Le port d'une barbe, même longue, ne saurait à lui seul constituer un signe d'appartenance religieuse
Les faits remontent à fin 2013. Le médecin, aujourd'hui âgé de 35 ans, effectuait un stage de spécialisation d'un an en chirurgie viscérale au centre hospitalier de Saint-Denis en Seine-Saint-Denis, dans le cadre d'une convention avec le National Liver Institute de l'université égyptienne de Menoufia.
Une barbe qui porte atteinte à la laïcité ?
Le médecin stagiaire s'était présenté au centre hospitalier, selon la direction, «avec le visage couvert d'une barbe particulièrement imposante». La direction l'a convoqué à plusieurs reprises pour lui demander de tailler sa barbe, «perçue par les membres du personnel comme un signe d'appartenance religieuse».
L'environnement multiculturel de l'établissement rendait l'application des principes de neutralité et de laïcité du service public d'autant plus importante
L’hôpital a souligné auprès du médecin que «l'environnement multiculturel de l'établissement rendait l'application des principes de neutralité et de laïcité du service public d'autant plus importante».
L'homme s'était lui «borné à invoquer le respect de sa vie privée, sans pour autant nier que son apparence physique était de nature à manifester ostensiblement un engagement religieux», selon la décision de la cour.
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Vers un pourvoi devant le Conseil d'Etat
«Dans ces conditions», la cour administrative d’appel de Versailles y a vu un manquement à ses obligations de respect de la laïcité et du principe de neutralité du service public, même si le port de la barbe «ne s'est accompagné d'aucun acte de prosélytisme». Elle a estimé que la sanction, la résiliation de la convention de stage du médecin, n'était «pas disproportionnée», confirmant le jugement rendu en première instance par le tribunal administratif de Montreuil.
On en est à débattre des centimètres de poils au menton des gens pour savoir s'il y a atteinte à la laïcité
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— RT France (@RTenfrancais) 14 mars 2017
L'avocate du médecin stagiaire, Nawel Gafsia, a signifié à l'AFP qu'elle prévoyait de se pourvoir devant le Conseil d'Etat. Elle a dénoncé une décision prise uniquement sur «l'appréciation subjective de la directrice» et basée «sur d'hypothétiques réactions, sans produire d'attestation de témoins». «On en est à débattre des centimètres de poils au menton des gens pour savoir s'il y a atteinte à la laïcité», a-t-elle ajouté, précisant qu'en l’occurrence, la barbe de son client ne mesurait à l'époque pas plus de «quatre-cinq centimètres».
Pour une affaire similaire, le conseil des prud'hommes de Bobigny rendra début janvier sa décision concernant quatre agents de sécurité de l'aéroport d'Orly licenciés pour avoir refusé de raccourcir leur barbe, juste après les attentats du 13 novembre 2015.