Après les émeutes de Hambourg, la classe politique allemande durcit le ton
Les émeutes lors du sommet du G20 à Hambourg ont provoqué une vague d'indignation au sein de la classe politique allemande, qui exige un changement d'attitude vis-à-vis des manifestations violentes, et notamment des mouvements d’extrême gauche.
«L'image de l'Allemagne auprès de la communauté internationale a été sévèrement endommagée par les incidents de Hambourg» a estimé Sigmar Gabriel, le ministre allemand des Affaires étrangères, dans une interview accordée au quotidien allemand Bild. Il s'exprimait sur les trois nuits d'affrontements entre les militants d’extrême gauche et la police dans la ville portuaire allemande, qui accueillait le sommet international du G20.
«Les prétendus motifs politiques de cette orgie de violence cachent en fait la vraie motivation de ces délinquants venus de toute l'Europe : la violence en elle-même » a fustigé le ministre. Ce dernier a en outre exigé la création d'un comité spécial d'investigation à l'échelle européenne, chargé de poursuivre tous les individus qui ont pris part à ces actes de violence.
«Les Etats de droit doivent manifester leur capacité à se défendre» a-t-il poursuivi.
Le ministre allemand de la Justice Heiko Maas a, lui aussi, évoqué la nécessité d'une réponse au niveau européen pour faire face aux casseurs de l'ultra-gauche. Il a notamment demandé la mise en place d'une base de données européenne, ainsi qu'un renforcement des échanges inter-Etats d'information sur les auteurs de ces actes.
«Nous faisons face à une nouvelle forme de violence, à laquelle nous devons répondre en accroissant notre coopération dans le combat contre l'extrémisme», a appelé le ministre le 10 juillet à Berlin. «Ceux qui soutiennent cette violence débridée devront aussi être poursuivis devant les tribunaux» a-t-il ajouté, d'après le quotidien Der Tagesspiegel.
Plus remonté encore, le ministre allemand de l'Intérieur Thomas de Maiziere n'a pas hésité a comparer les émeutiers d’extrême gauche à des nazis voire des islamistes. «Il s'agit d'individus violents et de criminels radicaux et non de simples manifestants» a déclaré le ministre pendant une conférence de presse, le lundi 10 juillet, ajoutant que ceux qui avaient organisé ces actes violents à Hambourg étaient «comparables à des néo-nazis ou des terroristes islamistes ».
Il a ensuite affirmé que des sommets similaires à celui du G20 continueraient néanmoins d’être accueillis dans les grandes villes allemandes, quelles que soient les menaces que feraient planer sur eux les extrémistes de tous bords. «Toute autre approche serait une capitulation de l'Etat de droit» a renchéri le ministre.
L’extrémisme de gauche minimisé en Allemagne depuis des années
De nombreuses personnalités politiques ont quant à elles regretté que la violence d'extrême gauche ait été négligée depuis trop longtemps par les autorités allemandes. Le chef du Parti libéral-démocrate allemand (FDP) Christian Lindner, a exigé que l'activité de l'ultra-gauche soit «contrôlée de beaucoup plus près» par le service allemand de sécurité intérieure, (le BfV), qui cible plus souvent les activités terroristes ou les militants d’extrême-droite.
Un membre du présidium du Parti Chrétien Démocrate (CDU) d'Angela Merkel, Jens Spahn a confié à Bild que «l'ampleur de l’extrémisme de gauche a[vait] été sous-estimé en Allemagne depuis des années», le dimanche 9 juillet.
Si des néo-Nazis avaient commis les même actes à Hambourg, l'indignation de l'opinion publique aurait été immense, à raison, d'après Jens Spahn, qui ajoute que les «fascistes d’extrême gauche, leur haine et leur violence nécessitent simplement la même réponse claire».
Le député allemand est même allé plus loin, en accusant les Sociaux démocrates, les Verts et autres partis de gauches de délibérément minimiser les faits et de «fermer les yeux» sur les violences commises par l'extrême gauche.
Ses mots ont trouvé écho auprès du secrétaire général de la CDU Peter Tauber qui a affirmé qu'«il ne viendrait à l'idée de personne de tolérer des squats d'extrême-droite» alors que «dans le cas des squats d’extrême gauche tels que la Rigaer Strasse à Berlin ou la Rote Flora à Hambourg, les gens sont souvent trop timorés», d'après Bild.
Stephan Mayer, un membre du CSU (l'allié bavarois du CDU) siégeant au Bundestag a lui aussi demandé que les autorités de Berlin et de Hambourg «ne tolèrent plus les squats de militants d'extrême gauche ainsi que les zones de non-droit à la Rigaer Strasse et la Rote Flora».
Les deux lieux sont occupés par des groupes d’extrême gauche après avoir été abandonnés il y a des années. Le directeur du bureau de la Chancellerie fédérale Peter Altmaier a, quant à lui, préditque la fermeture de ces centres d’extrême-gauche serait un «test» pour le pays.
Des centaines d'officiels de sécurité blessés durant les émeutes
Presque de 500 membres de la sécurité, dont 180 policiers fédéraux ont été blessés lors des incidents de Hambourg a déclaré Thomas de Maiziere durant sa conférence de presse du lundi 10 juillet. «Seuls deux officiers de police sont toujours à l'hôpital », a-t-il relativisé, bien que de nombreux autres ne soient pas encore totalement rétablis.
De son côté, le chef des opérations de la police de Hambourg, Hartmut Dudd, a évoqué un nombre de 476 officiers de police provenant de différents départements victimes de la violence des manifestants, lors d'une autre conférence de presse. Cette estimation a aussi été confirmée par le chef de la police de Hambourg, Ralf Martin Meyer.
Angela Merkel a, elle, rendu visite aux gardiens de la paix hambourgeois pour les remercier de leur travail.
La chancelière a également vilipendé ces actes de violence lors de son discours au sommet du G20 . «Je condamne fermement la violence débridée et la brutalité sans limite à laquelle la police a dû faire face» a-t-elle déclaré, ajoutant qu'il n'y avait «pas la moindre justification pour le pillage, les incendies volontaires et les attaques qui ont eu lieu».
Les émeutes ont duré plusieurs nuits d'affilée pendant la semaine du sommet international de Hambourg. Les piles de débris, les barricades brûlées, les magasins détruits et les vitres brisées ont transformé la ville allemande en un champ de bataille. 186 manifestants ont été arrêtés, d'après l'AFP, citant Hartmut Dudd. Les chiffres officiels concernant les manifestants blessés lors des affrontements n'ont toujours pas été publiés.