Zbigniew Brzezinski, conseiller à la sécurité nationale des USA pendant la guerre froide, est décédé
Artisan du programme d’armement des moudjahidines en Afghanistan visant à renverser l’Union soviétique et fervent défenseur de l’hégémonie des Etats-Unis sur la scène internationale, le stratège américain s’est éteint à l’âge de 89 ans.
«Mon père s’est éteint en paix cette nuit», a écrit Mika Brzezinski sur Instagram le 27 mai, sans préciser les causes du décès de son géniteur, qui était âgé de 89 ans.
Armer les islamistes contre les Soviétiques
Entre autres faits d’armes, Zbigniew Brzezinski fut, sous le président américain Jimmy Carter, l’artisan du «programme afghan» (ou Opération Cyclone), lancé secrètement par la CIA en juillet 1979. Celui-ci consistait à armer les moudjahidines (combattants djihadistes) d’Afghanistan contre le gouvernement pro-soviétique, renforçant ainsi les bases de ce qui deviendrait quelques années plus tard Al-Qaïda.
«Le jour où les Soviétiques ont officiellement franchi la frontière [de l’Afghanistan, en décembre 1979], j’ai écrit au président Carter, en substance : "Nous avons maintenant l’occasion de donner à l’URSS sa guerre du Vietnam"», confiait Zbigniew Brzezinski au Nouvel Observateur en 1998.
Qu’est-ce qui est le plus important ? Les Taliban ou la chute de l’empire soviétique ? Quelques excités islamistes où la libération de l’Europe centrale ?
Quant aux conséquences en termes de montée du terrorisme, le stratège n’exprimait aucun scrupule : «Cette opération secrète était une excellente idée. Elle a eu pour effet d’attirer les Russes dans le piège afghan et vous voulez que je le regrette ? […] Qu’est-ce qui est le plus important au regard de l’histoire du monde ? Les Taliban ou la chute de l’empire soviétique ? Quelques excités islamistes où la libération de l’Europe centrale et la fin de la guerre froide ?»
@JordanSchachtel Origins must be understood. Brzezinski/OBL cooperate to drive USSR out of Afghanistan late '70's. Seemed fair at the time. pic.twitter.com/UPVZFOhwMq
— Bradford Davis (@BradfordDavis7) 26 février 2017
Visionnaire sur l’Ukraine ?
Dans son ouvrage Le grand échiquier, publié en 1997, Zbigniew Brzezinski avait par ailleurs prévu la crise ukrainienne qui devait éclater des années plus tard.
«Au cours de la période suivante (soit de 2005 à 2010), l’Ukraine pourrait à son tour être en situation d’entamer des négociations en vue de rejoindre l’UE et I’OTAN», écrivait-il, ajoutant que le pays constituait l’«enjeu essentiel» pour l’expansion de ces deux organisations.
«Cela exige une implication énergique et déterminée de l’Amérique […] pour régler des problèmes sensibles, surtout pour la Russie, tels que le statut souhaitable dans le système européen des républiques baltes et de l’Ukraine», poursuivait le stratège.
Selon lui, le contrôle de l’Ukraine permettait de rejeter la Russie à l’extrême-est de l’Europe, l’empêchant d’être un «empire en Eurasie» et la condamnant à «n'être plus, dans l'avenir, qu’une puissance régionale».
Fervent défenseur de l'hégémonie des Etats-Unis
Né à Varsovie en Pologne en 1928, Zbigniew Brzezinski a obtenu un diplôme de sciences politiques à Harvard et y a rédigé une thèse sur la formation d’un système totalitaire en URSS. Il est ensuite devenu l’auteur d’une stratégie anti-communiste mondiale et un fervent défenseur du concept d’hégémonie américaine.
«La défaite et la chute de l'Union soviétique ont parachevé l'ascension rapide des Etats-Unis comme seule et, de fait, première puissance mondiale réelle», écrivait-il dans son ouvrage Le grand échiquier en 1997.
Dans l’un de ses derniers articles publié en 2016, le diplomate, constatant que les Etats-Unis n’étaient plus «la puissance impériale mondiale», affirmait que ces derniers pourraient uniquement régler le problème de la violence au Moyen-Orient en formant une coalition incluant, jusqu’à un certain degré, la Russie et la Chine.
Dans les années 1960, Zbigniew Brzezinski fut conseiller des présidents John Fitzgerald Kennedy et Lyndon Johnson. Durant les années Carter, le diplomate, considéré comme le bras droit du président, s’est hissé au rang de conseiller à la sécurité nationale. Durant le mandat de Bill Clinton, il fut l’une des principales voix appelant à une expansion de l’OTAN à l’est.
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Louis Maréchal