Le Washington Post tancé pour avoir lâché Edward Snowden
- Avec AFP
Un éditorial du Washington Post appelant à refuser à Edward Snowden la grâce qu'il demande au gouvernement américain, lui vaut un déluge de critiques, y compris au sein même de sa rédaction.
L'éditorial, titré «Pas de grâce pour Edward Snowden», a été publié alors que plusieurs associations de défense des libertés ont lancé une campagne pour pousser le président Barack Obama à gracier l'informaticien.
La Maison Blanche a opposé une fin de non recevoir à cette demande et réclamé le retour d'Edward Snowden aux Etats-Unis, afin qu'il y soit jugé. Le jeune homme de 33 ans est actuellement réfugié en Russie.
L'éditorial, publié samedi, fait valoir que si certaines révélations de l'ancien consultant de l'agence du renseignement NSA ont été utiles, d'autres étaient injustifiées, voire dangereuses.
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Révélations d'utilité publique
Cette prise de position a déclenché un déluge de critiques, à commencer par celle de Barton Gellman, l'un des journalistes du Washington Post auteur d'articles sur les révélations d'Edward Snowden.
«La page opinion n'a pas d'influence sur la couverture et vient de montrer pourquoi. Les révélations de Snowden ont été d'utilité publique», a-t-il tweeté.
2/2 The opinion page has no say on news, and just showed why. @Snowden disclosures served the public. WP journalists are proud of our role.
— Barton Gellman (@bartongellman) 19 septembre 2016
Le Washington Post avait obtenu le prix Pulitzer en 2014, conjointement avec le quotidien britannique The Guardian, pour ses articles sur les informations transmises par l'informaticien.
«Ce qu'a fait Snowden a rendu service aux citoyens américains et le président des Etats-Unis devrait le gracier», a abondé Margaret Sullivan, éditorialiste du Washington Post.
"Snowden acted carefully, responsibly and courageously — and squarely in the public interest." By @Sulliviewhttps://t.co/CyDZ95ebyG
— Laura Helmuth (@laurahelmuth) 20 septembre 2016
La journaliste a écrit un éditorial, publié mardi, qui appelle à pardonner celui auquel le réalisateur américain Oliver Stone a consacré un film, sorti la semaine passée aux Etats-Unis (le 1er novembre en France).
«Il me semble qu'un organe de presse qui s'appuie sur une source, au risque de la mettre en danger, doit la soutenir», a dit, à l'AFP, Jane Kirtley, professeur de droit et d'éthique des médias à l'université du Minnesota.
«Pour moi, Snowden devrait rentrer et se présenter à la justice, mais je n'ai pas pris les fuites de Snowden pour en tapisser mon journal», a-t-elle ajouté.
Reading discussions on the Snowden / WP thing. Wonder where I'd be today if I turned sources into the Feds after a story... Jobless I think.
— Steve Ragan (@SteveD3) 21 septembre 2016
Pour elle, «s'en prendre aux sources pour des fuites en s'appuyant sur la loi sur l'espionnage est un premier pas avant d'en faire de même avec les journalistes qui ont reçu cette information».
Notably in the @WashingtonPost, @Sulliview brilliantly eviscerates the paper's Snowden editorial https://t.co/3kKYECxqMppic.twitter.com/HPwFX9M2s2
— Glenn Greenwald (@ggreenwald) 20 septembre 2016
Le Washington Post vient de devenir «le premier journal (américain) à demander dans ses colonnes que des poursuites soient engagées contre l'une de ses sources, sur le dos de laquelle elle a gagné et accepté le prix Pulitzer pour oeuvre d'intérêt général», s'est indigné Glenn Greenwald, ancien du Guardian aujourd'hui journaliste pour le site The Intercept.
Pour le spécialiste des médias du magazine Forbes, Matthew Ingram, l'éditorial du Washington Post va «pousser les futurs Snowden à réfléchir à deux fois à l'idée de contacter ce journal avec une fuite ou un tuyau, c'est quasiment certain».