Manifestations alaouites en Syrie : affrontements meurtriers avec les forces de l'ordre
© Getty ImagesDes manifestations alaouites ont dégénéré dimanche en Syrie après l’attentat contre une mosquée à Homs. Autorités et ONG s’opposent sur les responsabilités des violences, entre répression sécuritaire et actions de groupes armés. La crise ravive les craintes des minorités et relance le débat sur l’autonomie et la protection communautaire.
Deux jours après l’attentat meurtrier contre une mosquée alaouite à Homs, qui a fait huit morts le 26 décembre, des manifestations organisées par cette minorité ont dégénéré dimanche dans plusieurs villes syriennes.
Selon l’agence officielle Sana, les affrontements entre forces de sécurité et manifestants ont fait au moins trois morts et une soixantaine de blessés. Mais le déroulé exact des événements fait l’objet de versions radicalement opposées.
Des milliers de personnes sont descendues dans les rues de Lattaquié, Jablé, Tartous, Homs et d’autres villes du littoral pour dénoncer les violences visant la communauté alaouite depuis la prise de pouvoir, fin 2024, d’une coalition islamiste à Damas.
Une communauté qui vit dans la peur
À Lattaquié, l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) affirme que deux manifestants ont été tués par les forces de l’ordre lors de la dispersion d’un rassemblement, une version étayée par une source médicale locale. Les autorités, elles, démentent tout tir sur la foule et accusent des « éléments liés à l’ancien régime » d’avoir infiltré les manifestations pour attaquer à balles réelles les forces de sécurité et des civils.
Sana rapporte que les blessés admis dans les hôpitaux souffraient de plaies causées par des armes blanches, des jets de pierres et des tirs, imputés à ces groupes armés. Deux ambulances ont également été endommagées lors des heurts. Face à la montée des tensions, des blindés et des chars de l’armée ont été déployés dans les centres-villes de Lattaquié et Tartous afin de « rétablir la stabilité ».
Pour les manifestants, ces violences traduisent un climat d’impunité. « Assad est parti et nous ne le soutenons pas. Pourquoi cette tuerie ? », s’indigne un commerçant à Lattaquié au micro de L'Orient Le Jour. Le dignitaire Ghazal Ghazal, président du Conseil islamique alaouite, dénonce une « violation flagrante » de la liberté d’expression et appelle la population à rentrer chez elle pour éviter l’escalade. À l’origine de l’appel à manifester, il plaide pour un fédéralisme politique garantissant la sécurité de sa communauté.
L’attentat du 26 décembre a été revendiqué par le groupuscule extrémiste sunnite Saraya Ansar al-Sunna, qui a juré de poursuivre ses attaques contre les « infidèles et apostats ». Ces événements ravivent le souvenir des massacres de mars dernier sur le littoral, qui avaient fait plus de 1 700 morts, majoritairement alaouites. Les manifestants ont aussi réclamé la libération de détenus alaouites, alors que les autorités annoncent déjà des remises en liberté ciblées.