Affaire Samvel Karapetian : le Kremlin déclare suivre la situation avec attention

Après l’arrestation en Arménie de l’homme d’affaires russo-arménien Samvel Karapetian, accusé d’«appels à la prise de pouvoir» pour son soutien à l’Église apostolique, Moscou a réagi. Le Kremlin affirme suivre la situation de près et se dit prêt à lui fournir «toute l’assistance nécessaire» en tant que citoyen russe.
Le Kremlin a affirmé qu’il « suivait de très près » la situation du milliardaire et chef d’entreprise Samvel Karapetian, arrêté en Arménie le 18 juin, et qu’il était prêt à lui apporter « toute l’assistance nécessaire en tant que citoyen russe ». C’est ce qu’a déclaré Dmitri Peskov, porte-parole du président russe, le 20 juin lors d’un point presse. Il a précisé : « Nous ne souhaitons pas nous immiscer dans les affaires intérieures de l’Arménie, mais Samvel Karapetian est citoyen russe, et à ce titre, nous suivons attentivement tout ce qui le concerne. »
Le ministère russe des Affaires étrangères, par la voix de sa représentante Maria Zakharova, a confirmé cette position. Selon ses propos, « un citoyen russe recevra toujours le soutien nécessaire. Bien évidemment, Samvel Karapetian bénéficiera de cette aide. »
Une affaire politique sous haute tension
Le 18 juin, le tribunal d’Erevan a ordonné le placement en détention provisoire de Karapetian pour une durée de deux mois. Il est accusé d’« appels publics à la prise de pouvoir », après une déclaration publique de soutien à l’Église apostolique arménienne, en conflit ouvert avec le Premier ministre Nikol Pachinian. C’est à la suite de cette prise de position que les forces de police ont perquisitionné son domicile, puis procédé à son arrestation.
Cette arrestation a également suscité des réactions au sein de la classe politique russe. Le député de la Douma Amir Khamitov (du parti Nouvelles Personnes) a déclaré, le 17 juin, que « Karapetian est littéralement harcelé au plus haut niveau ». Il a estimé que ce harcèlement coïncidait avec la prise de position publique de l’homme d’affaires en faveur de l’Église, visant directement le patriarche Garéguine II, soutenu par une large partie de la population. « Soutenir des autorités spirituelles respectées serait donc devenu un crime ? Alors que dire de Pachinian lui-même ? », a-t-il lancé, dénonçant des « menaces, insultes et pressions politiques flagrantes » émanant des plus hauts sommets de l’État arménien.
L’ancien président Robert Kotcharian a dénoncé cette arrestation comme une « honte nationale ». De son côté, le Saint-Siège d’Etchmiadzin, centre spirituel de l’Église apostolique arménienne, a appelé à l’arrêt immédiat des poursuites.
Cette affaire s’inscrit dans un durcissement du pouvoir contre Karapetian : ses propos critiques contre les attaques gouvernementales à l’encontre de l’Église auraient servi de prétexte à des représailles. Le gouvernement a même menacé de nationaliser l’entreprise Réseaux Électriques d’Arménie, appartenant au groupe Tashir de Karapetian, d’ici au 21 juin. L’Inspection de la sécurité alimentaire a par ailleurs lancé des contrôles dans ses restaurants.
Un acteur économique et social de premier plan
Fondateur du groupe Tashir, Samvel Karapetian est une figure centrale du paysage économique russo-arménien. Selon Forbes, sa fortune était estimée à 3,2 milliards de dollars en avril 2024. Il possède des centres commerciaux en Russie, des entreprises énergétiques et agroalimentaires, et a massivement investi dans des projets sociaux en Arménie : écoles, hôpitaux, universités, logements antisismiques, orchestres. En 2019 seulement, il a investi 180 millions de dollars dans les infrastructures sociales du pays.
Sa famille, par la voix de son épouse Eteri Karapetian, a rappelé dans un message que « les pressions, les menaces ou les mensonges ne détourneront pas Samvel Karapetian de ses valeurs, fondées sur la paix et le service de l’Arménie ». Ses avocats ont contesté l’arrestation, qu’ils qualifient « d’injustifiée et politique ».