Loi interdisant l’Église orthodoxe canonique en Ukraine : l'Union européenne ferme les yeux
Au lendemain de l’adoption par le Parlement ukrainien d’un projet de loi interdisant l'Église orthodoxe liée au Patriarcat de Moscou dans le pays, les Nations unies ont déclaré analyser les dispositions législatives prises. Quant à l'Union européenne, elle pense que Kiev respectera la liberté de religion.
«Nous sommes au courant de l'adoption de cette loi par le Parlement ukrainien et sommes en train d'obtenir la loi et d'analyser ses dispositions», a déclaré ce 20 août à RIA Novosti Elizabeth Throssel, porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCDH). Elle ajouté que l'institution onusienne continuerait de surveiller la situation avec l'Église orthodoxe canonique en Ukraine.
Le 20 août, 265 députés ukrainiens ont voté en faveur de l’interdiction dans le pays de l’Église orthodoxe canonique, le minimum requis étant de 226. Les élus partisans de l’interdiction ont qualifié cette église d’être «une filière du pays agresseur».
L'Union européenne, alliée de Kiev, a quant à elle pris note de la loi liberticide adoptée par le Parlement ukrainien. Bruxelles considère comme adoptée «pour des raisons de sécurité et pour empêcher toute ingérence étrangère de la Russie», a déclaré ce 21 août le porte-parole de l'UE pour la politique étrangère Peter Stano. «L'UE espère également que Kiev respectera la liberté de religion», a-t-il ensuite précisé.
«Nous pensons que les autorités ukrainiennes veilleront à ce que ces droits soient respectés», a-t-il estimé, sans admettre les persécutions répétées menées par les autorités de Kiev depuis près d'une décennie contre l'église canonique.
Une décision «illégitime», selon l’archiprêtre Balashov
La loi entrera en vigueur dans 30 jours, et l’UOC aura neuf mois pour rompre ses liens avec l’Église orthodoxe russe.
«Il s'agit d'un acte illégal qui constitue une violation flagrante des notions fondamentales de liberté de conscience et de droits de l'homme», a réagi dans la foulée du vote le porte-parolat du Patriarcat russe.
La diplomatie russe, par la voix de sa porte-parole Maria Zakharova, a dénoncé la «destruction de la véritable orthodoxie en Ukraine» et son «remplacement par une fausse église».
L'Église orthodoxe canonique était la plus populaire en Ukraine. Elle est visée depuis plusieurs années par une intense campagne de persécution des nationalistes ukrainiens. Invoquant ses liens avec la Russie, les autorités locales de diverses régions ont annoncé l'interdiction des activités de l'Église, imposant des sanctions ou des poursuites pénales à certains représentants du clergé.
Depuis début 2022, le Service de sécurité de l'Ukraine (SBU) a ouvert des poursuites pénales contre 100 membres du clergé de l'Église orthodoxe ukrainienne canonique (UOC), et des condamnations ont été prononcées contre 26 personnes, a rapporté ce 21 août l'agence ukrainienne UNN.
En outre, des perquisitions sont menées auprès des évêques et des prêtres, dans les églises et les monastères, à la recherche de preuves d'«activités anti-ukrainiennes». Cette tendance s’est poursuivie avec la création en 2018 d'une Église orthodoxe ukrainienne «indépendante» de Moscou.
Mais l’UOC compterait encore 9 000 paroisses, contre le même nombre pour l’Église dite «indépendante». La procédure pourrait bien durer des années, l’interdiction de chaque paroisse devant être prononcée par un tribunal.