UberFiles : un ancien lobbyiste en chef d'Uber aurait aidé à récolter des fonds pour LREM
Les révélations sur les liens entre Emmanuel Macron et Uber dans la presse ont mis à jour le soutien de l’ancien lobbyiste en chef en Europe de la start-up qui aurait organisé des dîners de récolte de fonds pour lancer le parti du futur président.
Parmi les révélations des «Uber Files», un article du Monde publié le 12 juillet fait la lumière sur le rôle qu’aurait joué Mark MacGann, ancien lobbyiste en chef de la start-up en Europe dans le financement de la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron en 2017. Plus précisément, celui qui a défendu les intérêts du groupe entre 2014 et 2016 aurait aidé à la création de La République en Marche (LREM) par le biais d'organisation de dîners visant à récolter des fonds. Le Monde souligne que les différents échanges et documents consultés — dont Mark MacGann lui-même revendique la fuite — ne «suggèrent l’existence d’aucune irrégularité dans le financement ou l’organisation de la campagne d’Emmanuel Macron».
Enthousiasmé par le promoteur de la «start up nation»
Le quotidien vespéral révèle ainsi que Mark MacGann se serait mis à disposition du futur locataire de l’Elysée dès le début de l’année 2016 en marge du forum de Davos. La future campagne d’Emmanuel Macron tenait alors du secret de polichinelle, et le candidat acceptera la proposition de Mark MacGann.
Le lobbyiste n'était à l’époque plus salarié à plein temps de la start-up mais siégeait en revanche toujours, jusqu'en août, au conseil d’administration de la célèbre start-up.
Enthousiasmé par le programme économique de celui qui veut faire de la France une «start up nation», Mark MacGann aurait alors, toujours selon Le Monde, organisé de nombreux dîners visant à récolter des fonds, en France comme aux Etats-Unis. Le lobbyiste aurait notamment puisé dans son carnet d'adresse des entrepreneurs et investisseurs du milieu de la «tech», qu’il aurait achalandé en promouvant les mesures fiscales promises par Emmanuel Macron, suppression de l’ISF en tête. Chacun était alors encouragé à contribuer à la campagne à la hauteur du plafond légal, à savoir 7 500 euros par an.
Comme le souligne Le Monde après investigation, les motivations du principal intéressé relèveraient bel et bien de l’engagement politique sincère, et il n'existerait pas d’autre porosité qu’idéologique entre La République en Marche et Uber. Les financements auraient ainsi été effectués en respectant les règles de droit en la matière, ainsi que l’organisation de la campagne elle-même.
C’est toutefois le «mélange des genres» qui est épinglé. Evoquant les louanges d’Emmanuel Macron lui-même vis-à-vis du modèle Uber et de la flexibilité accrue du salariat comme des travailleurs, d’autres acteurs gravitant autour de La République en Marche semblent avoir sollicité des «coups de pouces» de l’entreprise, comme Pierre Person, ancien dirigeant du mouvement des Jeunes avec Macron, qui sollicitait en 2015 un poste chez Uber.
Mark MacGann à l'origine des «Uber Files» ?
Les «Ubers Files» sont une somme de plus d’une centaine de milliers de documents datés de 2013 à 2017, comprenant des courriels, notes, factures, etc., transmis par une source au journal britannique The Guardian. Celui-ci les a ensuite fait suivre au au Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et à 42 médias partenaires, parmi lesquels Le Monde. Ces documents, qui révèlent notamment des liens privilégiés entre Emmanuel Macron et la société de VTC, interrogent en outre sur les pratiques générales d'Uber que le Guardian accuse d'avoir «enfreint la loi, trompé la police et les régulateurs, exploité la violence contre les chauffeurs et fait pression en secret sur les gouvernements dans le monde entier».
Alors que l'opposition réclame une commission d'enquête sur cette affaire, l'Elysée a expliqué à l'AFP que Emmanuel Macron, comme ministre de l'Economie, était «naturellement amené à échanger avec de nombreuses entreprises engagées dans la mutation profonde des services advenue au cours des années évoquées, qu’il convenait de faciliter en dénouant certains verrous administratifs ou réglementaires».
Si la source de ces fuites est officiellement anonyme, Mark MacGann, lui-même en conflit avec son ancien employeur pour des motifs financiers, en a revendiqué la paternité, dans un entretien au Guardian.
«J'étais celui qui parlait aux gouvernements, poussait [le modèle Uber] dans les médias, celui qui disait aux gens qu'ils devraient changer les règles car les chauffeurs allaient en bénéficier et que les gens allaient avoir beaucoup d'opportunités économiques», raconte-t-il, confessant avoir contribué à «vend[re] un mensonge». «Comment avoir sa conscience claire si on ne s'élève pas contre la manière dont les gens sont traités aujourd'hui ?», ajoute-t-il encore.
De son côté, l'entreprise a réagi dans un email adressé à l'AFP, affirmant : «Nous comprenons que Mark a des regrets personnels sur ses années de loyauté à l'ancienne équipe de direction mais il n'est pas en position de parler avec crédibilité d'Uber aujourd'hui.» Uber lui reproche par ailleurs d'avoir «sonné l'alerte après avoir encaissé son chèque», en référence à un versement de 585 000 euros qu'il a perçu à l'issue d'une procédure portant sur les conditions de son départ.