Réformes et «manque de considération» : les raisons de la grève inédite des diplomates français

Emmanuel Macron en visite au Centre de crise et de soutien du ministère français des Affaires étrangères, au Quai D'Orsay, à Paris, le 3 avril 2020 (image d'illustration).© Francois Mori Source: AFP
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Emmanuel Macron en visite au Centre de crise et de soutien du ministère français des Affaires étrangères, au Quai D'Orsay, à Paris, le 3 avril 2020 (image d'illustration).
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Dénonçant notamment la suppression du corps diplomatique décidée par Emmanuel Macron, de nombreux agents du corps diplomatique se sont mobilisés sur les réseaux sociaux et pour certains, à Paris, sur l'esplanade des Invalides. Le signe d'un malaise.

«Fatigués», «en manque de considération», voire «en colère» : de nombreux diplomates français ont répondu le 2 juin à un appel inédit à la grève pour protester contre des réformes mettant en danger, selon eux, l'efficacité et le prestige de la diplomatie française. Le mouvement, rarissime dans une maison traditionnellement discrète et peu portée sur la contestation, a été lancé par six syndicats et un collectif de 500 jeunes diplomates.

Plusieurs dizaines d'entre eux se sont réunis devant leur prestigieux ministère à Paris, brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire «diplo en extinction», «service public en danger» ou encore «diplomates en grève».

Comme l'a relevé le journaliste Paul de Villepin, avaient notamment annoncé leur participation à la grève les ambassadeurs de France au Koweit, en Roumanie, en Lettonie, à Chypre ou encore en Azerbaïdjan, mais aussi la directrice Afrique du Nord Moyen-Orient, la déléguée permanente auprès de l’UNESCO ainsi que l'ambassadrice pour les droits de l'Homme.

Après une série de réformes, celle de la haute fonction publique, qui entérine la suppression du corps diplomatique au profit d’un corps interministériel unique, a été la goutte d'eau faisant déborder le vase. 

Voulue par le président Emmanuel Macron, avec l'objectif affiché de mettre fin aux «castes administratives», la réforme programme la «mise en extinction» d'ici à 2023 des deux corps historiques de la diplomatie, crée un nouveau corps de l'Etat et prévoit que les hauts fonctionnaires ne seront plus rattachés à une administration spécifique et pourront en changer en cours de carrière.

Les grévistes estiment ne pas être «interchangeables» et craignent la fin de la professionnalisation de la diplomatie française, troisième réseau mondial derrière les Etats-Unis et la Chine. 

C’est une maladie française de casser un outil qui fonctionne !

Mais la grogne montait depuis plusieurs années : «L'empilement des réformes, la baisse continue des moyens, aboutit à une fatigue et un désarroi des personnels», explique le diplomate et syndicaliste de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC), Olivier Da Silva, ici cité par l'AFP.

Des sénateurs apportent leur soutien au mouvement

«On a une charge de travail extrêmement importante, on ne compte pas nos heures, car on est très, très fier de faire ce métier. Mais il y a un sentiment de malaise, on a l'impression de ne pas être suffisamment écouté», résume quant à lui Jean-Baptiste, rédacteur de 28 ans à la direction ONU. Un discours repris par d'autres jeunes diplomates – invoquant leur devoir de réserve pour rester anonymes – ayant beaucoup investi pour apprendre le turc ou le chinois, ou travaillant «nuit et jour» sur la zone Ukraine-Russie.

Ainsi que l'a rapporté Marianne, des sénateurs comme Jean-Pierre Grand (LR) et André Vallini (PS), membres de la Commission des Affaires étrangères du Sénat et chargés d’un rapport sur l'avenir du corps diplomatique, ont apporté le 31 mai leur soutien au mouvement et entendu les craintes des syndicats et organisations représentant les personnels du Quai d’Orsay. «On comprend l’émotion des fonctionnaires qui ont choisi de consacrer leur vie à la France alors que se multiplient les crises internationales […]. C’est une maladie française de casser un outil qui fonctionne !», a déclaré le président de la Commission des Affaires étrangères, Christian Cambon, cité par le magazine et également présent lors de la mobilisation.

«On assiste depuis 2017 à une marginalisation du Quai d'Orsay au profit de l'Elysée», a de son côté analysé le journaliste Malbrunot selon qui la réforme en question participe au «déclassement» de la France.

Les syndicats seront reçus au quai d'Orsay

La précédente grève au Quai d'Orsay date de 2003. La nouvelle ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna, diplomate de carrière, recevra le 7 juin les syndicats et les représentants du mouvement, «en vue de répondre aux inquiétudes exprimées et d'examiner les moyens nécessaires à une diplomatie moderne, efficace, professionnelle, au service des Français», a indiqué le Quai d'Orsay dans la soirée du 2 juin.

«L'inquiétude est réelle, les personnels sont fatigués», reconnaît-on de source proche du dossier, soulignant que le mouvement social intervient dans un «contexte très difficile» : plus de deux années de Covid-19, successions de crises, des évacuations de Kaboul après la victoire des Taliban en août 2021 en passant par le conflit en Ukraine, les expulsions de diplomates par la Russie, la crise avec le Mali...

Environ 13 500 agents (titulaires, contractuels, recrutements locaux...) sont employés par le ministère des Affaires étrangères, selon des chiffres officiels.

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