Le rythme accélère à droite où, dans la même journée du 26 août, Michel Barnier et Eric Ciotti déclaraient leur candidature à l'élection présidentielle de 2022, tandis que Laurent Wauquiez annonçait renoncer à s'y présenter. Le 5 juillet dernier, ce dernier avait signé avec Valerie Pécresse – elle aussi candidate – Hervé Morin et Bruno Retailleau, une tribune publiée dans Le Figaro plaidant pour une primaire ouverte afin de désigner le candidat de leur famille politique.
Une proposition qui se concrétisera probablement malgré les réticences de la direction de Les Républicains (LR) si aucun candidat ne se détache dans les semaines à venir ; un congrès avec vote des militants étant prévu le 25 septembre pour décider d'un processus de départage. Cependant, l'ancien LR Xavier Bertrand – qui devance ses rivaux dans les sondages sans écraser le match – exclut catégoriquement de participer à toute primaire.
Xavier Bertrand, candidat sans passer par la primaire
Ayant officialisé sa candidature dès mars avec un temps d'avance sur ses rivaux, Xavier Bertrand a enchaîné les déplacements cet été, et n'organisera pas de rentrée. «Ce n'est pas mon affaire, je veux un contact direct avec les Français», a-t-il répété le 23 août sur Europe 1.
Le 6 juillet, celui qui venait d'être réélu président du conseil régional des Hauts-de-France après que sa liste a récolté 52,73% lors du second des élections de juin dernier avait déjà confirmé qu'il serait candidat à l'élection présidentielle de 2022 sans passer par une primaire de la droite et du centre. «Depuis le premier jour, j'ai joué la carte de la vérité et de la transparence en indiquant que si j'étais élu à la tête de ma région, je serais candidat à l'élection présidentielle, et donc en cohérence je ne serai pas candidat à une primaire», avait prévenu l'homme âgé de 56 ans qui fut ministre de Nicolas Sarkozy, en justifiant sa décision par le fait que «la primaire n'[ait] pas laissé que des bons souvenirs à droite» et qu'elle ait «été source de divisions».
Sans citer l'ancien maire de Saint-Quentin, Laurent Wauquiez a regretté que «certains candidats expliquent qu’ils se présenteront sans accepter de règle commune». Michel Barnier a estimé que le processus interne des LR était est pourtant «une question de loyauté et de confiance réciproques». «S'il y a deux candidats à droite, ce n'est même pas la peine d'y aller, il n'aura aucune chance», a quant à lui averti Eric Ciotti, tout en restant confiant quant au fait qu'«à la fin, il y aura un seul candidat».
Valérie Pécresse en lice pour devenir la première femme à l'Elysée
Valérie Pécresse – elle aussi réélue à la tête de la région Ile-de-France avec 45,92% des suffrages exprimés le 27 juin dernier – s'est lancée le 22 juillet dans la course à la présidentielle.
Celle qui fut également ministre de Nicolas Sarkozy a annoncé dans un entretien au Figaro sa candidature à l'élection présidentielle pour «restaurer la fierté française». Défendant une droite «ferme sur le régalien, laïque mais aussi écologiste, libérale, pro-entreprise, féministe et sociale», Valérie Pécresse avait pris ses distances avec LR dès 2017 en créant le mouvement Libres!, en opposition au président du parti de l'époque, Laurent Wauquiez, jugé trop «populiste».
«Sur la sécurité, sur l'ordre sur la justice sur l'immigration, le "en même temps" ça ne marche pas», a affirmé sur TF1 l'élue de 54 ans, en se présentant comme «plus réformatrice qu'Emmanuel Macron» et comme ayant «plus d'autorité que Marine Le Pen».
Valérie Pécresse, pour qui la primaire est la «seule solution démocratique», a affirmé au Figaro qu'elle n'en a «pas peur» et qu'elle «fera tout pour gagner et rassembler». «Je suis vaccinée contre les divisions de la droite [qui] nous ont fait suffisamment souffrir», a-t-elle déclaré sur TF1.
Philippe Juvin, le «candidat des services publics» prêt à soutenir Xavier Bertrand
Le 26 juillet, c'était au tour du médecin et maire de La Garenne-Colombes (Hauts de Seine) Philippe Juvin d'annoncer sa candidature à l'Elysée. Agé de 57 ans, le chef des urgences de l'hôpital Pompidou à Paris a acquis une certaine renommée médiatique à la faveur de ses nombreuses interventions pour commenter l'épidémie de Covid-19.
Dans un entretien publié sur par Le Figaro, l'ex-eurodéputé s'est exprimé en ces termes : «En cinq ans, Emmanuel Macron a dressé les Français les uns contre les autres. La communication a remplacé la recherche de solutions. [...] Des solutions de bon sens existent. Je les défendrai dans une primaire de la droite et du centre». Se présentant comme le «candidat des services publics», il propose d'engager trois chantiers s'il était élu : «Une baisse d’impôts massive, un plan d’égalité des territoires – pour 1 euro versé aux villes, il faut 1 euro pour les campagnes – et le transfert de nouveaux pouvoirs aux collectivités locales, notamment en matière de santé et de sécurité».
Le 26 août, Philippe Juvin a confié au Huffington Post qu'il souhaitait «un accord politique avec Xavier Bertrand». «Il ne va pas à la primaire, c'est son choix, il faut le respecter. Mais nous ne pouvons pas avoir deux candidats au premier tour. Si je gagne la primaire, je passerai un accord politique avec lui», a déclaré le professeur de médecine, avant d'ajouter qu'il «soutiendra» le président des Hauts-de-France s'il est devant dans les sondages, et réciproquement.
Eric Ciotti, le candidat qui ne s'«excuse pas» d'être de droite
Dans la matinée du 26 août, c'est le député LR Eric Ciotti qui a créé la surprise en se déclarant sur BFMTV et RMC candidat «pour que la France reste la France» avec «un projet pour plus d'autorité, plus de liberté, plus d'identité».
Cet élu de 55 ans tenant de la fermeté sur les questions d'immigration – ce qui lui attire des soupçons de proximité idéologique avec le RN – a aussi plaidé pour «qu'on revienne sur le droit du sol au profit du droit du sang, car l'âme française se délite», ainsi que pour «l'inscription dans la Constitution de nos origines chrétiennes».
«Je suis de droite, je ne m'excuse pas de l'être», a martelé Eric Ciotti, patron de la plus grosse fédération LR, celle du département des Alpes Maritimes, dont il fut également président du conseil général.
Michel Barnier, le négociateur du Brexit souhaitant un moratoire sur l'immigration
La même journée, Michel Barnier déclaré également déclaré sa candidature à la magistrature suprême affirmant au Figaro vouloir être «un président qui respecte les Français et qui fait respecter la France».
Michel Barnier, 70 ans, a été député et sénateur, a siégé dans plusieurs gouvernements de droite dans les années 1990 et 2000 en tant que ministre de l'Environnement, des Affaires étrangères, des Affaires européennes, et enfin de l'Agriculture. Il a aussi été commissaire européen à deux reprises de 1999 à 2014, avant de piloter les négociations du Brexit à partir de 2016.
Parmi les axes de son projet, il a plaidé sur TF1 pour «limiter l'immigration et la maitriser» en répétant son idée de moratoire sur le sujet, et promis de «rétablir l'autorité de l'Etat», d'œuvrer pour une «justice qui [soit] efficace», de «remettre le travail, le mérite au centre de notre société», sans oublier la lutte contre «le changement climatique qui va tout bouleverser».
Pour Laurent Wauquiez, «le moment n'est pas venu»
Deux heures avant l'annonce de Michel Barnier, Laurent Wauquiez annonçait en revanche qu'il renonçait à se présenter, estimant sur Twitter que «le moment n'est pas venu» pour lui.
Alors que sa décision faisait l'objet de toutes les spéculations, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes a expliqué ne pas vouloir «ajouter de la division à la division», en s'inquiétant que «les candidatures à la présidentielle à droite se multiplient de façon inquiétante». Il a assuré qu'il s'emploierait désormais à œuvrer «pour l’unité d'une candidature à droite» et à «veiller à ce que la droite assume clairement et fortement ses convictions».
Laurent Wauquiez, 46 ans, s'était astreint à une cure de silence médiatique depuis son départ de la tête des Les Républicains en 2019, à la suite de mauvais résultats aux élections européennes. Comme Xavier Bertrand et Valérie Pécresse, il a également été réélu à la tête de sa région Auvergne-Rhône-Alpes, sa liste ayant obtenu 55,20% des voix au second tour après avoir obtenu 43,85% au premier tour.
Le paysage se précise donc, à la veille d'un week-end riche en rentrées politiques : Valérie Pécresse à Brive et Eric Ciotti dans l'arrière-pays niçois, tandis Philippe Juvin et Michel Barnier seront à La Baule. De son côté, le président du groupe LR au Sénat, Bruno Retailleau a annoncé qu'il renonçait à se présenter à la présidentielle, estimant ne pas être «le mieux placé pour battre Emmanuel Macron».
A huit mois du scrutin présidentiel, une autre inconnue persiste à droite : la candidature du journaliste Eric Zemmour, dont la rumeur enfle depuis plusieurs mois. Une pétition avait d'ailleurs été lancée par l'association Les amis d'Eric Zemmour – agréée début juillet pour financer une organisation politique du même nom – afin de soutenir l'éditorialiste, dont le dernier ouvrage sortira mi-septembre. En cas de candidature, reste à savoir si Eric Zemmour souhaitera participer à la primaire de la droite et du centre et, le cas échéant, s'il y sera autorisé par les instances organisatrices.