Le porte-avions successeur du «Charles-de-Gaulle» sera nucléaire, annonce Emmanuel Macron
- Avec AFP
A l’occasion d’une visite du chef de l’Etat au Creusot, l’Elysée a dévoilé les contours du nouveau porte-avions français qui doit être mis en service en 2038. Il sera à propulsion nucléaire et de dimensions plus importantes que son prédécesseur.
Emmanuel Macron a annoncé le 8 décembre que le futur porte-avions français serait nucléaire.
Le choix de ce mode de propulsion est plus coûteux à construire que le diesel mais permet davantage d'autonomie, et surtout, de maintenir des compétences dans les réacteurs embarqués, essentiels à la dissuasion, comme le précise l'AFP.
Le Charles-de-Gaulle – seul porte-avions français en activité – entré en service en 2001, arrivera au terme de son activité en 2038. Le futur porte-avions devra, lui, «être à la mer pour ses premiers essais en 2036» afin de pouvoir lui succéder, selon la ministre des Armées Florence Parly. Il sera construit par Naval Group et les Chantiers de l'Atlantique à Saint-Nazaire, seul chantier naval en France à pouvoir bâtir un navire de cette taille.
Depuis le retrait du service du Clemenceau et du Foch, la question d'un deuxième porte-avions revient de manière lancinante. Il permettrait d'assurer une permanence à la mer du groupe aéronaval mais la question a sans cesse été repoussée pour raisons budgétaires.
Quelles sont les avantages et inconvénients de la propulsion nucléaire ?
Les chaufferies nucléaires offrent une autonomie accrue et permettent un gain de place en soute : le Foch et le Clemenceau utilisaient en effet chacun 800 tonnes de carburant par jour et la question du ravitaillement se posait tous les deux ou trois jours.
Cela imposait «une interruption de l'activité aérienne pendant plusieurs heures ainsi qu'une route de ravitaillement déterminée par les conditions météo du moment, ce qui était un renseignement de choix pour un adversaire potentiel», explique l'amiral Edouard Guillaud, ancien chef d'état major interarmées, dans une note de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS).
Le Charles-de-Gaulle n'a lui besoin d'être ravitaillé en carburant d'aviation, vivres et munitions que tous les dix jours. Plus coûteux que la propulsion diesel, le nucléaire impose de son côté une indisponibilité de près de deux ans tous les dix ans pour changer le combustible.
Pourquoi le choix du nucléaire ?
Le choix de la propulsion nucléaire n'est pas «pas tant justifié par la question de l'autonomie du porte-avions que par la question de la filière nucléaire et la dissuasion», selon une source ministérielle qui s'exprimait avant l'annonce présidentielle.
Il s'agit de maintenir les compétences en matière de réacteurs embarqués, indispensables à l'autonomie et à la discrétion acoustique des futurs sous-marins, fers de lance de la dissuasion nucléaire.
«En matière de conception, le cycle actuellement considéré pour conserver des bureaux d'étude au niveau suffisant est de l'ordre de 15 à 20 ans [...] Au-delà, les équipes d'ingénieurs et de techniciens se délitent et l'effort pour les reconstituer est énorme, souvent difficilement atteignable», justifie l'amiral Guillaud.
«Si on en est là avec l'EPR aujourd'hui [le réacteur civil dont la construction accumule retards et surcoûts], c'est parce qu'EDF a perdu la compétence et si on veut que ça n'arrive pas dans la défense, il faut préserver la compétence», explique le sénateur Cédric Perrin. Les deux chaufferies du futur porte-avions, conçues par TechnicAtome, seront une évolution, plus puissantes, de celles embarquées dans le Charles-de-Gaulle.
A quoi ressemblera-t-il?
Le futur porte-avions sera beaucoup plus massif que l'actuel. Il fera 75 000 tonnes pour environ 300 mètres de long, contre 42 000 tonnes pour 261 mètres pour le Charles-de-Gaulle, soit davantage que les deux porte-aéronefs britanniques, moins que les onze porte-avions américains.
Il sera en effet amené à embarquer 30 futurs avions de combat Scaf, plus gros et plus lourds que les Rafale auquel ils succèderont. Son équipage sera composé de 2 000 marins. Dépendante des Américains dans ce secteur, la France devrait elle aussi adopter les catapultes électromagnétiques, plus longues que les actuelles et capables de propulser des avions plus lourds.
Le navire devra en outre disposer de réserves d'espace, pour accueillir éventuellement de nouveaux armements, notamment des armes à énergie dirigée, et des drones.
Combien coûtera-t-il ?
Le coût de développement et de construction «sera très certainement supérieur à cinq milliards d'euros», selon les sénateurs Olivier Cigolotti et Gilbert Roger, auteurs d'un rapport sur la question en juin.
Si le coût de construction du porte-avions demeure opaque, la Direction générale de l'armement (DGA) a précisé dans un rapport du Sénat que «quel que soit ce coût, il doit être rapporté à la durée du programme : un coût annuel de 450 M€ représenterait 1,5 % du budget de défense et 0,02 % du PIB (pendant au moins 10 ans)».