Interpellé en marge d'une manifestation, un journaliste de France 3 reçoit «un rappel à la loi»
- Avec AFP
Alors qu'il filmait la fin de la manifestation contre le projet de loi sur la sécurité globale, un journaliste de France 3 a été 12 heures en garde à vue. Aucune charge n'a été retenue contre lui, mais il a reçu «un rappel à la loi».
Un journaliste de France Télévisions a été placé en garde à vue alors qu'il filmait des interpellations à la fin de la manifestation contre la proposition de loi «sécurité globale» le 17 novembre au soir, déplore le groupe qui «condamne cette restriction des droits de la presse». «Identifié par sa carte de presse, il a été néanmoins arrêté et remis en liberté aujourd'hui en tout début d’après-midi. Aucun autre motif de garde à vue et l’affaire a été classée sans suite», précisait le groupe audiovisuel dans un communiqué le 18 novembre.
Un journaliste de France 3 en garde à vue après avoir filmé une manifestation, mardi à Paris!
— SNJFTV (@SNJ_FTV) November 18, 2020
Communiqué du SNJ France Télévisions: https://t.co/EbS2xkUBBE#libertédelapresse#nonàlaPPLSécuritéGlobale@SNJ_national@EFJEUROPE@FrancoisDesnoy1@laurentguimierpic.twitter.com/22micNbgju
En milieu de soirée, la préfecture de police de Paris (PP) a fait valoir dans un communiqué qu'«un groupe de manifestants ayant tenté de partir en cortège sauvage et ne respectant pas les gestes barrières a été stoppé [...] par les forces de l'ordre».
Restriction des droits de la presse et l’obstruction au bon exercice du droit d’informer
«Après avoir réitéré plusieurs fois les sommations réglementaires pour appeler [...] à la dispersion [...], les forces de l'ordre ont effectué 33 interpellations», explique le communiqué. Parmi eux, ce journaliste a été «placé en garde à vue, sous le contrôle des magistrats du Parquet, pour participation à un attroupement non armé, en application des règles de droit en vigueur», a ajouté la PP, selon qui il a écopé d'un rappel à la loi.
France Télévisions condamne une «obstruction au bon exercice du droit d’informer»
Le journaliste travaillait pour France 3 Paris-Ile-de-France et filmait avec son téléphone portable. Il a passé plus de 12 heures en garde à vue et a écopé d'un «rappel à la loi». Sur le site de France 3, l'intéressé témoigne : «Les policiers m’ont reproché de ne pas m'être "dispersé après sommation" lorsqu’ils tentaient de disperser la manifestation. Mais comme je suis arrivé sur les lieux une heure après la dispersion du mouvement, on ne m’a au final jamais fait de sommation. Et tous les policiers que j’avais croisés m’ont laissé passer. J’étais au mauvais endroit au mauvais moment.»
«Aucun fait annexe n’a été reproché au gardé à vue. Ni rebellion, ni violence, ni quoi que ce soit», explique Dominique Tricaud, l'avocat du journaliste.
Arrestation abusive et arbitraire d’un journaliste dans l’exercice de son travail
Dans son communiqué, la direction de France Télévisions a «condamné cette restriction des droits de la presse et l’obstruction au bon exercice du droit d’informer» en «se réserv[ant] l'éventualité de toutes suites utiles». De son côté, la direction de France 3 Paris Ile-de-France «condamne avec la plus grande fermeté cette arrestation abusive et arbitraire d’un journaliste dans l’exercice de son travail».
Un rassemblement contre la proposition de loi «sécurité globale»
Des centaines de personnes se sont rassemblées le 17 novembre après-midi près de l'Assemblée nationale à l'appel notamment de syndicats de journalistes et d'associations de défense des droits de l'homme pour protester contre la proposition de loi «sécurité globale», qui empêcherait selon eux les journalistes et citoyens de filmer les forces de l'ordre durant les manifestations.
Le rassemblement vise l'article 24 de cette proposition de loi portée par LREM et son allié Agir, dont l'examen démarrait le même jour. «Plusieurs reporters, travaillant pour différents médias, ont également été molestés ou interpellés lors de cette manifestation», a déploré le Syndicat national des journalistes (SNJ) dans un communiqué, alors que la préfecture de police a fait état de 33 interpellations après des échauffourées à la fin du rassemblement.
Le syndicat appelle à un nouveau rassemblement le 21 novembre après-midi, place du Trocadéro à Paris et «dans de nombreuses autres villes». «Les graves incidents du 17 novembre doivent tous, journalistes, dirigeants de presse et citoyens, nous rappeler que la liberté d'informer est menacée», a regretté dans un autre communiqué le SNJ de France Télévisions.