Les soignants indignés par la vente de masques en grande surface
La Fédération du commerce et de la distribution a annoncé disposer de masques pour la vente dès le 4 mai. Une information qui n'a pas manqué de susciter l'indignation des soignants qui subissent la pénurie depuis le début de la pandémie.
Les professionnels de la santé voient rouge. Dans un communiqué titré «Les masques tombent» et publié le 30 avril, les présidents des sept Ordres nationaux des professions de santé (médecins, infirmiers, pharmaciens, sages-femmes, kinésithérapeutes, podologues et dentistes) ont manifesté leur amertume et leur incompréhension à l'égard des annonces des grandes surfaces, qui se disent prêtes à commercialiser des centaines de millions de masques dès le 4 mai.
225 millions de masques chez Carrefour, 170 millions chez Leclerc
Quand Carrefour déclare disposer de 225 millions de masques, dont 70 millions destinés à son personnel, les soignants s'interrogent : «Où étaient ces masques quand […] tous nos personnels en prise directe avec la maladie tremblaient et tombaient chaque matin ?» Le réseau Leclerc dit avoir «sécurisé» 170 millions de masques et en prévoit «bien davantage» à terme. Pour le président de Système U, les chiffres annoncés n'étaient pas des stocks, mais des livraisons à venir.
Notre profession a eu l'autorisation le 24/4 de vendre des masques chirurgicaux à compter du 04/5. Depuis le 24, nous faisons des achats dans le monde entier qui seront livrés progressivement. Les quantités annoncées cette semaine n'étaient pas en stock.https://t.co/0j1SSmg0Ho
— Dominique Schelcher (@schelcher) May 1, 2020
Le 29 avril, la Fédération du commerce et de la distribution (FCD) avait cependant précisé les conditions commerciales des enseignes dans cette vente de masques : «Elles vendront les masques avec une marge minimale. Le prix de base d’un masque grand public sera de l’ordre de 2 à 3 euros, soit un coût à l’usage de 10 à 30 centimes selon le nombre de lavages et de réutilisations possibles. Le prix d’un masque à usage unique sera inférieur à 1 euro, en cohérence avec leurs prix d’achat à l’étranger.»
Là encore, les représentants des soignants dénoncent des «profiteurs de guerre» qui ne se cachent pas, voire s'affirment à «grand renfort de communication tapageuse des chiffres sidérants de masques».
Leur attribuer les difficultés d’approvisionnement est donc faux et malhonnête
Un communiqué au vitriol que la FCD n'a pas laissé passer : «Les enseignes de la grande distribution ne sont pas, et n’ont jamais été, en charge de l’achat et de la fourniture de masques pour les soignants […] Leur attribuer les difficultés d’approvisionnement est donc faux et malhonnête.» La fédération fait valoir dans un communiqué publié le 1er mai que la grande distribution a remis ses stocks de masques FFP2 aux professionnels de la santé dès le début de la crise, et effectué de nombreux dons aux hôpitaux. De même, jusqu'à récemment, les enseignes n'avaient pas le droit de vendre de masques. Pour Jacques Creyssel, délégué général de la FCD et membre du bureau du Medef, «cette polémique n’est pas digne».
Cette polémique n’est pas digne. Pharmacies et distribution ont été chargés par le Gvt, il y a quelques jours, de fournir des masques «grand public» aux Français pour le déconfinement. Nous sommes fiers de cette nouvelle mission de service public, faite sans marge. https://t.co/5KvGngaFqdpic.twitter.com/RPNowoLnPt
— Jacques Creyssel (@JacquesCreyssel) May 1, 2020
Les soignants assurent de leur côté : «Nous allons poursuivre notre mission de professionnels de santé, car c’est notre engagement. Avec néanmoins l’amertume de se dire que la responsabilité n’est pas la mieux partagée de toutes les vertus.»