Coronavirus : l'Etat enjoint d'assurer l'hébergement d'urgence de jeunes migrants
- Avec AFP
Une juge des référés a rendu une décision dans laquelle elle somme la préfecture des Hautes-Alpes d'assurer l'hébergement de 23 jeunes migrants occupant un squat à Gap. Selon elle, cette mission fait partie des prérogatives de l'Etat.
La préfecture des Hautes-Alpes devra assurer l'hébergement d'urgence de 23 jeunes migrants logeant dans un squat à Gap et soumis à un risque d'exposition au Covid-19, a décidé en référé le tribunal administratif de Marseille, le 3 avril 2020. L'instance avait été saisie par trois associations, le Mouvement citoyen tous migrants, Réseau hospitalité et Médecins du monde, qui dénonçaient les carences de l'Etat pour protéger ces jeunes vivant dans un squat «avec 70 personnes dans des conditions sanitaires déplorables».
Ces jeunes migrants sont originaires d'Afrique de l'Ouest, et parmi eux se trouvent des Guinéens, des Maliens et des Ivoiriens, a indiqué à l'AFP Dominique Rougier de l'association Réseau Hospitalité. Les associations, défendues par les avocats Vincent Brengarth et William Bourdon, demandaient que l'Etat «organise la mise à l'abri immédiate des 23 mineurs isolés dans des locaux adaptés à leurs besoins spécifiques […] de façon à permettre le respect des règles de prévention de la pandémie liée au Covid-19».
Une «carence dans l'accomplissement par les services de l'Etat», selon la juge
«Il est enjoint au préfet des Hautes-Alpes, dans un délai de huit jours à compter de la présente ordonnance, d'assurer l'hébergement d'urgence des 23 jeunes gens jusqu'à ce que le juge des enfants ait statué sur leur minorité réelle, ou si elle intervient antérieurement, jusqu'à la fin officiellement déclarée de l'état d'urgence sanitaire en France», a tranché la juge des référés dans la décision, dont l'AFP a consulté une copie.
Les conditions d'hébergement de jeunes dans un squat, «notamment la promiscuité dans laquelle ils vivent […] caractérisent une carence dans l'accomplissement par les services de l'Etat de leur obligation d'hébergement d'urgence», poursuit la juge.
En revanche, celle-ci n'a pas prononcé d'astreinte financière en cas de non-respect de cette décision. La préfecture des Hautes-Alpes contestait le caractère d'urgence invoqué par les associations de soutien aux migrants.
«Par cette décision forte, le juge administratif rappelle l'obligation pesant sur les pouvoirs publics, et dédoublée en temps de crise sanitaire, de tout mettre en œuvre pour protéger les personnes les plus vulnérables», a estimé de son côté Vincent Brengarth auprès de l'AFP. Il a rappelé que quatre associations avaient déposé un recours plus large devant le Conseil d'Etat, via une question prioritaire de constitutionnalité, afin de contester les bases constitutionnelles de «l'Etat d'urgence sanitaire» décrété en France en raison du coronavirus. Selon l'avocat, ce texte ne définit pas «de cadre légal et contraignant» pour la protection des plus démunis.