Le Conseil constitutionnel a validé le 16 mai dans la soirée la privatisation controversée du groupe Aéroport de Paris (ADP) dans le cadre de la loi Pacte sur la croissance des entreprises.
Les Sages ont motivé leur décision, réfutant l'argument développé par les détracteurs de la privatisation, qui estimaient que le gestionnaire des aéroports de Paris était «en situation de monopole de fait». Cette donnée aurait pu poser une limite juridique à la cession. Le Conseil constitutionnel a jugé qu'il n'y avait pas de monopole car «il [existait] sur le territoire français d'autres aérodromes d'intérêt national ou international». Il a en outre statué que le gestionnaire des aéroports parisiens n'était pas en l'état un «service public national».
ADP, fleuron national et manne pour l'Etat, numéro 1 mondial en terme d'accueil de passagers, a atteint plus de 4,4 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2018. Les récentes privatisations très contestées des aéroports de Toulouse et Nice ont encore renforcé les doutes sur la pertinence de ces opérations. Pourtant, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire s'est réjoui que la voie soit libre pour la privatisation
«Les privatisations sont validées par le Conseil constitutionnel, que ce soit celle d'ADP, de la Française des Jeux, Engie. C'est la preuve que notre texte de loi était solide et que ces privatisations sont légitimes», s'est-il félicité depuis Bruxelles.
«Cette loi est une nouvelle étape dans la transformation économique du pays. Elle met en œuvre les orientations d'Emmanuel Macron en faveur de la croissance, de l'innovation et d'un plus juste partage de la valeur», a-t-il communiqué sur Twitter.
La loi Pacte doit être promulguée «d'ici au 24 mai 2019», selon Bercy.
Seul le référendum pourra faire obstacle à la privatisation d'ADP
Les nombreux parlementaires opposés au projet, de tous bords sur l'équiquier politique, n'ont désormais plus qu'une seule option pour empêcher la privatisation : poursuivre avec succès leur proposition de loi référendaire d'initiative partagée. Cette démarche inédite de consultation des Français est rendue possible depuis la réforme constitutionnelle de 2008, par l'article 11.
La semaine précédente, le 10 mai, le Conseil avait validé le principe du référendum d'initiative partagée soutenue par 248 parlementaires pour s'opposer à ce projet.
Boris Vallaud, Parti socialiste (PS), qui portait le projet de référendum, a réagi à cette décision sur La chaîne parlementaire : «Nous avons pris acte de la décision du Conseil constitutionnel. Il acte le principe de la privatisation des Aéroports de Paris, mais en même temps, il n'invalide pas la procédure de référendum d'initiative partagée.» «Maintenant cela veut dire que c'est aux Françaises et aux Français de se mobiliser pour décider que l'irrémédiable ne sera pas commis», a-t-il ajouté.
Mais rien ne garantit que cette consultation citoyenne puisse avoir gain de cause tant elle tient du parcours du combattant, et ne présente aucun caractère contraignant. Les initiateurs du référendum disposent désormais de neuf mois pour recueillir, par voie électronique, l'approbation d'au moins 10 % du corps électoral, évalué à plus de 4,7 millions de personnes.
Même si les signatures sont obtenues, l'Assemblée, qui devra débattre de l'opposition des Français à la privatisation n'est pas tenue de la respecter, même s'ils sont des millions à avoir exprimé leur avis.
Cette procédure citoyenne, qui inquiète le gouvernement, devrait retarder quoi qu'il arrive l'application de la loi de plus de neuf mois.