LREM pris à son propre piège du «renouvellement permanent» à l'Assemblée
La majorité se retrouve dans l'embarras après les promesses de renouvellement à l'Assemblée nationale faites en 2017. Alors que la date butoir approche, LREM réunit le 9 mai un bureau politique qui pourrait aller jusqu'à changer les règles du parti.
Le «nouveau monde», mis en avant depuis des mois par les membres du parti présidentiel, ressemble à s’y méprendre à l’ancien. En juin 2017, juste après l’accession au pouvoir d’Emmanuel Macron, Richard Ferrand, à l’époque président du groupe La République en marche (LREM), devenu, depuis septembre 2018, président de l’Assemblée nationale, militait pour que le «renouvellement permanent» devienne la norme dans l’enceinte du palais Bourbon. Ainsi, LREM ajoutait, dans l’article 5 de son règlement intérieur, l’idée qu’«en raison d’une exigence de renouvellement, pour la seconde moitié de la législature, les membres du groupe élus au bureau de l’Assemblée nationale ne peuvent se présenter au même poste».
Mais alors que la date fatidique approche, prévue pour décembre, les membres de LREM se réunissent le 9 mai en bureau politique, afin d’examiner la possibilité pour les sortants de pouvoir de nouveau concourir aux mêmes responsabilités. Le «renouvellement permanent» aurait-il pris du plomb dans l’aile ?
60 postes à renouveler
Première justification avancée par la majorité : l’expérience. Ainsi, Anne Brugnera, «whip» (personne chargée de faire passer les consignes de vote en commission) des affaires culturelles déclare à LCP qu’elle pensait que ce renouvellement constant serait «une bonne idée» mais tempère en précisant que «la politique ça s’apprend». Aurait-elle pris goût à ses nouvelles prérogatives ? La député du Rhône juge que «deux ans, c'est trop court pour occuper pleinement sa fonction», toujours sur LCP.
La chaîne de l’Assemblée nationale cite une autre élue qui «craint» pour son poste : «Ça donne l'impression que le groupe est en train de regarder son nombril. C'est un très mauvais signal, alors que l'on va dévoiler en même temps notre programme pour les européennes.» Effectivement LREM a présenté, le 8 mai, son programme pour les élections dont le scrutin se tiendra le 26 mai. Même son de cloche chez Gilles Le Gendre, président du groupe à l’Assemblée et député de Paris, repris par L’Express : «La mi-mandat absolue c'est décembre, ce n'est pas une très bonne période pour faire ce genre de changement […] Je trouve que si on partait en vacances avec cette question réglée, ce serait vraiment une très bonne idée.»
Quoi qu’il en soit, ce remaniement ne sera pas complet. C'est ainsi que Richard Ferrand, élu au perchoir en lieu et place de François de Rugy, devenu ministre de la Transition écologique et solidaire, devrait conserver son poste. La question se pose en revanche pour Gilles Le Gendre, selon un article du Monde datant du 7 mai. L’ancien journaliste pourrait effectivement payer sa petite phrase prononcée, le 3 avril, sur Europe 1, quand il jugeait «pas absolument indispensable» d’ouvrir le débat sur le recul de l’âge légal de départ à la retraite. Autre ombre au tableau, l'ancien président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations s'est placé, début avril, au cœur d’une polémique après la nomination de sa femme, Raphaële Rabatel, à la tête de la communication de la Française des jeux, alors que le groupe allait être privatisé dans le projet de loi Pacte.
Outre ces deux postes, si LREM respectait son règlement intérieur en l’état, le parti devrait remplacer les présidents de six commissions permanentes, sur huit, ainsi que deux questeurs sur trois. Au total, en prenant en compte les présidents, vice-présidents et rapporteurs, ce sont près de 60 postes qui devraient être renouvelés… à moins que le règlement ne soit modifié avant la date limite.