Gilets jaunes : liberté de la presse ? Des journalistes pris pour cible par les forces de l'ordre
La veille de la mobilisation des Gilets jaunes du 8 décembre, la secrétaire d'Etat Marlène Schiappa affirmait que les journalistes devaient «exercer librement leur métier». Sauf que plusieurs journalistes ont dénoncé leurs conditions de travail.
Des affrontements entre Gilets jaunes, casseurs et forces de l'ordre ont eu lieu dans plusieurs villes le 8 décembre pour l'acte 4 de la mobilisation des Gilets jaunes. Au milieu de tout cela, les journalistes ont tenté, tant bien que mal, de couvrir l'événement. Malheureusement, plusieurs d'entre eux ont mentionné avoir été victimes de certaines actions des forces de l'ordre. France Info a d'ailleurs relayé plusieurs messages de journalistes et reporters dénonçant «la confiscation par les policiers du matériel de protection de plusieurs photographes, équipés de casques, masques à gaz et lunettes». La reporter-photographe Véronique de Viguerie a par exemple écrit un premier tweet où elle s'offusquait du «vol par les CRS» de casques et masques de protection «parce qu'[elle prenait] une photo».
Casques et masques de protection volés par les CRS parce que je prenais une photo
— veroniquedeviguerie (@vero2v) 8 décembre 2018
Peu après, elle écrit s'être fait «gazer», sans protection. «Merci les CRS», a-t-elle ironisé.
Voilà je me fais gazer et j ai aucune protection. Merci les #crs#police#giletsjaunes
— veroniquedeviguerie (@vero2v) 8 décembre 2018
Des journalistes indépendants ont également dénoncé la saisie de leur matériel de protection.
Dès contrôles a répétitions, 2 membres du collectif viennent de se faire saisir entre 100 et 150€ de protections chacun
— LaMeutePhotographie (@LaMeutePhoto) 8 décembre 2018
Super @prefpolice j viens de me faire confisquer tout mon matos alors que je suis journaliste. Aucun n agent n avait son matricule #8decembre#giletjaunepic.twitter.com/dMr63EIcz2
— BOBY START UP & CIE (@OdieuxBoby) 8 décembre 2018
Interrogé par France Info, le photographe de Libération Boris Allin a assuré que c'était la première fois que ce genre de choses lui arrivait en «4-5 ans» de couverture de manifestations. Il a décrit s'être fait confisquer son casque de moto, son masque à gaz et ses lunettes de protection à Bastille. Il a attesté avoir donné aux CRS les mails prouvant qu'il était bel et bien envoyé par Libération, leur demandant au passage leur matricule «pour récupérer [s]on matériel». Les CRS l'auraient alors «menacé» d'une garde à vue...
Des journalistes blessés par des actions policières
Vidéo à l'appui, la reporter de l'agence Line Press Stéphanie Roy a dénoncé l'envoi par les CRS d'une une grenade en direction de la presse, «pourtant clairement identifiée». Sur les images, un individu portant le casque «presse» est apparu blessé.
#Paris Un homme bras en l'air reçoit un tir de flash ball quasiment à bout portant. Dans le même temps une grenade est envoyée sur la presse pourtant clairement identifiée.#GiletsJaunes#ChampsÉlysées#Acte4#Insurrection#8decembre2018#8decembre2018pic.twitter.com/CKQWuzWb2U
— Stéphanie Roy (@Steph_Roy_) 8 décembre 2018
France Info a également repris des messages de journalistes confirmant s'être fait blesser. Par exemple, Paul Conge, reporter à Explicite, a expliqué, photo à l'appui, qu'il avait été touché à une cuisse par «un plot de grenade desencerclante».
Un plot de grenade desencerclante, résultat sur ma cuisse, à travers le jean : #8decembrepic.twitter.com/LBoUmlJqLV
— Paul Conge (@paulcng) 8 décembre 2018
Deux journalistes du Parisien auraient également été la cible d'un tir de flash-ball.
— Yann Foreix (@yannforeix) 8 décembre 2018
Un policier vient de me tirer dessus au flash-ball alors que j’avais mon brassard de presse en évidence. Ça pique mais tout va bien. Consœurs, confrères soyez prudents sur les Champs-Élysées ! #GiletsJaunespic.twitter.com/xfFARavByZ
— Boris Kharlamoff (@BorisKharlamoff) 8 décembre 2018
La secrétaire d'Etat à l'Egalité femmes-hommes Marlène Schiappa avait pourtant rappelé la veille de la manifestation du 8 décembre son attachement à la liberté de la presse : «Samedi, comme tous les autres jours, les journalistes doivent pouvoir exercer librement leur métier sans être insultés, menacés ou frappés.» Elle avait d'ailleurs agrémenté son tweet d'un hashtag #StopViolences.
La liberté de la presse est une condition sine qua non de la démocratie.
— 🇫🇷 MarleneSchiappa (@MarleneSchiappa) 7 décembre 2018
Samedi, comme tous les autres jours, les journalistes doivent pouvoir exercer librement leur métier sans être insultés, menacés ou frappés. #StopViolences
Après les manœuvres contre la presse le 8 décembre, certains reporters se sont évidemment souvenus de cette belle intention de Marlène Schiappa. Le photo-reporter Louis Witter a ainsi adressé un tweet lapidaire à la secrétaire d'Etat : «Tu diras ça à tes flics qui confisquent casques et matériel de protection, tirent au flashball sans retenue et mutilent aussi bien journalistes que manifestants avec leurs grenades.»
Tu diras ça à tes flics qui confisquent casques et matériel de protection, tirent au flashball sans retenue et mutilent aussi bien journalistes que manifestants avec leurs grenades. Merci. https://t.co/N3UeSsM1mx
— Louis Witter (@LouisWitter) 8 décembre 2018