«L'écosystème russophile» sur Twitter derrière la propagation de l'affaire Benalla ?

«L'écosystème russophile» sur Twitter derrière la propagation de l'affaire Benalla ?
llustration ©Kacper Pempel/Reuters
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Révélée par Le Monde, l'affaire Benalla mobilise la presse tout entière depuis près de trois semaines, enflammant aussi les réseaux sociaux. Une ONG pro-UE attribue l'ampleur de ce phénomène à une influence de la twittosphère «russophile».

Décidément, l'influence russe supposée se retrouve partout. Avec l'aide étonnante des médias dominants. «L’affaire Benalla, premier scandale du mandat d’Emmanuel Macron, pourrait devenir un cas d’école du "gonflage numérique" sur Twitter» : telle est la conclusion, relayée par le site internet de BFMTV, d'une ONG basée à Bruxelles, dénommée EU DisinfoLab, appellation que l'on pourrait décoder comme : laboratoire de l'Union européenne [contre la] désinformation. Créée en 2017, EU DisinfoLab s'est notamment illustrée lors de la «publication des MacronLeaks» le 5 mai 2017, deux jours avant le second tour de l'élection présidentielle française, en retraçant la diffusion sur les réseaux sociaux des e-mails de l'équipe de campagne du candidat Macron.

4 millions de tweets, c'est du jamais vu en France

Cette fois, l'ONG s'est penchée sur la diffusion de l'affaire Benalla sur Twitter, et sur son ampleur. «4 millions de tweets, c'est du jamais vu en France», note Alexandre Alaphilippe, directeur exécutif du EU Disinfo Lab, interrogé par BFM. «Pour #Balancetonporc, lancé à la suite du scandale Harvey Weinstein, nous étions autour de 780 000 tweets. Pourtant, environ 250 000 comptes se sont exprimés sur le sujet dans les deux cas», détaille-t-il.

Une confirmation de la portée de l'affaire Benalla ? Pas vraiment pour EU Disinfo Lab, qui y voit l'empreinte de comptes «pro-russes». Usant d'un concept métaphorique, le fondateur de l'ONG, Nicolas Vanderbiest affirme reconnaître l'influence d'un «écosystème russophile».

«4 millions de tweets, mais 1% des utilisateurs ont publié 44% des contenus. 25% sont en corrélation avec des comptes russes», affirme l'ONG qui utilise un outil d'analyse, Visibrain, qui permet de transformer des pans de la twittosphère en nuages de comptes selon leurs relations (abonnements, retweets...).

Ce qui laisse tout de même plus de 2,6 millions de tweets qui auraient échappé à l'influence supposée de prétendus admirateurs de la Russie. Sur Twitter, précisément, EU DisinfoLab est allé un peu vite en évoquant des comptes russes, précisant a posteriori, mais ne se citant pas exactement : «Correction, des comptes pro-russes, c'est-à-dire des comptes identifiés comme relayant des messages du Kremlin et pro-russes.» Ce 3 août, Alexandre Alaphilippe, chercheur au sein de EU Disinfo Lab, a cependant souligné que des «comptes pro-Macron» avaient eux aussi abondamment tweeté sur l'affaire Benalla.

«Est-ce dans l'intérêt des Russes ?»

Interrogé par RT France, Eric Verhaeghe, essayiste et fondateur de Tripalio, un site en ligne d'information sociale, estime que l'affaire Benalla «n'est pas de nature à renforcer ou à affaiblir [Emmanuel Macron] dans un sens qui serait favorable aux Russes». Car cette séquence «affaiblit Emmanuel Macron» et «diminue sa légitimité de réformateur», poursuit l'essayiste. «Or, est-ce dans l’intérêt des Russes ?», se demande-t-il. «Je crois au contraire que la Russie a tout intérêt à avoir une France réformée, et donc la moins indépendante possible des Etats-Unis», précise Eric Verhaeghe.

Qu’il y ait un discours de fond complotiste qui vise à expliquer que le débat politique français serait parasité par la Russie, c’est certain. Mais ceux qui dénoncent ce complotisme sont les premiers complotistes

D'ailleurs, «l’affaire Benalla vient de sources policières françaises visant plutôt à torpiller les réformes de la fonction publique. Elle a été dévoilée par des medias (Le Monde par exemple) qui se distinguent plutôt par des positions anti-russes», fait-il remarquer. En outre, «les medias se nourrissent comme ils peuvent en cette période de faible actualité», estime le fondateur du blog «Jusqu'ici tout va bien». «Qu’il y ait un discours de fond complotiste qui vise à expliquer que le débat politique français serait parasité par la Russie, c’est certain. Mais ceux qui dénoncent ce complotisme sont les premiers complotistes.», fait-il encore savoir.

La machine médiatique française lancée à plein régime sur l'affaire Benalla

Alors que conclure de cette étude, de sa méthodologie, apparemment subjective, si ce n'est que Twitter est bel et bien le réseau social de prédilection des internautes intéressés par la politique ? Et que dire du «gonflage» de l'affaire Benalla par la presse traditionnelle, désormais tout aussi «numérique» que les réseaux sociaux, qu'elle se trouve alimenter ?

Le 18 juillet au soir, Le Monde lançait l'affaire Benalla, identifié sur une vidéo tournée plus de deux mois plus tôt. Alexandre Benalla, chargé de mission de l'Elysée, y est vu molestant une personne, en marge de la manifestation du 1er mai. Après deux semaines de révélations dans la presse, il est apparu que l'Elysée, la préfecture de police ainsi que le ministère de l'Intérieur étaient au courant de l'existence de la vidéo dès le 2 mai. Avec un timing qui reste à expliquer alors que certains cercles étaient déjà au courant de l'affaire, Le Monde a ainsi consacré pas moins de sept unes entre le 20 et le 27 juillet. Outre le quotidien du soir, TF1 et le JDD ont offert une tribune à Alexandre Benalla.

BFMTV a également accordé une très large couverture à l'affaire, apportant ses propres révélations. La chaîne a largement retransmis les auditions des commissions d'enquête et accordé une large part au commentaire éditorial, notamment ceux de Christophe Barbier, étrillant la gestion de l'affaire Benalla par l'exécutif. «Non, il n'est pas convaincant [...] Tout de même on aimerait comprendre ce qui s'est passé exactement», a ainsi lancé l'éditorialiste sur le plateau de BFMTV le 27 juillet dernier, à l'adresse d'Emmanuel Macron.

Dans le même temps, l'exécutif tentait de minimiser l'intérêt du grand public pour l'affaire. «Les gens, est-ce qu'ils parlent de ça ?», s'était ainsi interrogé Emmanuel Macron en visite sur le tour de France le 25 juillet. «Ça fait le buzz sur Twitter, le réseau social du microcosme parisien, mais sur Facebook, où sont tous les Français, ça ne prend pas plus que ça», aurait également affirmé un collaborateur du Premier ministre, Edouard Phillipe, cité par Le Parisien

Là encore, la presse souligne l'intérêt des Français pour l'affaire, et au-delà de la seule plateforme Twitter. FranceInfo relève ainsi que sur Google, «les recherches autour du terme "Benalla" dans la catégorie "Actualités" rattrapent presque celles opérées sur "Coupe du monde" réalisées le soir de la finale». Le site d'information avance aussi les données de SocialBakers, un concurrent de Visibrain qui analyse aussi les réseaux sociaux : la page Facebook du Monde aurait ainsi enregistré une augmentation de 67% de ses interactions sur ses contenus relatifs à l'affaire Benalla. De là à conclure que Le Monde alimenterait «l'écosystème russophile»...

Alexandre Keller

Lire aussi : Demi-réponses, mystères et dénégations : ces zones d'ombre qui subsistent dans l'affaire Benalla

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