Corse : deux jours après l'inauguration de la collectivité unique, Talamoni bande déjà les muscles
La fusion des deux départements corses et la concentration des pouvoirs ne semblent pas suffire aux indépendantistes. Jean-Guy Talamoni, président fraîchement élu de l'Assemblée corse, semble de nouveau être dans la confrontation avec Paris.
Y a-t-il, d'entrée de jeu, un malentendu entre Paris et Ajaccio, de nature à créer, un jour, une situation comparable à celle de la Catalogne ? A peine inaugurée la nouvelle collectivité unique corse basée à Ajaccio, laquelle consacre la fusion des deux départements de l'île et de la Région, les nationalistes, forts de leur victoire aux élections territoriales en décembre 2017, multiplient les déclarations visant Paris.
Dans tous les pays du monde, lorsqu'un conflit est terminé, eh bien on tourne la page avec une loi d'amnistie
Jean-Guy Talamoni, élu président de l'Assemblée corse le 2 janvier 2017, a ainsi utilisé le champ lexical de la guerre, évoquant les années de terrorisme du Front de libération nationale corse (FLNC). «La question des prisonniers doit être traitée prioritairement», a-t-il plaidé ce 3 janvier sur Europe 1. «Ce serait déjà une bonne manière d'envoyer un signal positif que de rapprocher les prisonniers en Corse, comme la loi le permet. Ce serait un début, puis l'amnistie bien sûr doit suivre», a insisté le dirigeant nationaliste, deux jours avant la visite, le 5 janvier, dans l'île de Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l'Intérieur chargée du dossier corse au gouvernement.
Elections territoriales : large victoire pour la coalition nationaliste en #Corse
— RT France (@RTenfrancais) 10 décembre 2017
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«Dans tous les pays du monde, lorsqu'un conflit est terminé, eh bien on tourne la page avec une loi d'amnistie», a-t-il déclaré. «La France a eu recours à la loi d'amnistie plusieurs fois au cours du XXe siècle, après la Seconde Guerre mondiale pour les collaborateurs, ou après la guerre d'Algérie pour des faits épouvantables», a-t-il ainsi argumenté, soulignant que, d'après lui, une telle décision permettrait de construire des «relations apaisées [...] entre la Corse et la France».
Dialogue de sourds
Mais à Paris, la Corse fait toujours partie de la métropole. Deux jours après la victoire des nationalistes aux élections du 10 décembre, Edouard Philippe avait donné un autre sens au résultat, considérant l'île de Beauté comme une région parmi les autres. «Il me paraît que la Corse peut être un terrain d'application privilégié de la logique que nous voulons engager avec les collectivités territoriales», avait alors analysé le Premier ministre, cité par l'AFP.
Et Edouard Philippe d'ajouter, écartant de facto une officialisation de la langue corse et une réforme de la Constitution française : «Dès lors que des initiatives sont prises et conformes au cadre constitutionnel.» Ce à quoi le président indépendantiste du conseil exécutif corse Gilles Simeoni, tout en réitérant son attachement au dialogue, a rétorqué le 2 janvier : «Si une Constitution ne permet pas de reconnaître un peuple, c'est à la Constitution de changer, pas au peuple.»
.@Gilles_Simeoni : "Si une Constitution ne permet pas de reconnaître un peuple, c'est à la Constitution de changer, pas au peuple" #Corse#le79inter@ndemorand
— France Inter (@franceinter) 2 janvier 2018
En dépit des déclarations de bonnes intentions de part et d'autre, le malentendu semble bien persister.