«Nation souveraine» vs «civilisation ouverte» : Le Pen, Macron, deux visions de la France
Les deux candidats en lice pour remporter l'élection présidentielle se sont affrontés dans un débat souvent houleux, durant lequel se sont opposées deux visions de la France et de sa place dans le monde.
Entre invectives et accusions de mensonge de part et d'autre, Emmanuel Macron et Marine Le Pen ont confronté leurs projets de société – radicalement différents – lors du débat présidentiel du 3 mai.
La philosophie du projet présidentiel
La candidate du Front national (FN) a dénoncé la philosophie de son adversaire, estimant que, pour lui, tout était à vendre et à acheter. «La France que vous défendez, c'est une salle de marché», a-t-elle lancé avant de qualifier Emmanuel Macron de candidat de la mondialisation sauvage, de l'Uberisation, de la précarité, de la brutalité sociale ou encore du communautarisme.
«Vous ne voyez les rapports humains que par rapport à ce que ça rapporte», a-t-elle dénoncé, se plaçant en opposition franche à cette vision : «Tout ne fait pas l’objet d’un poids financier, de statistiques financières, la France c’est bien autre chose que ça». «Je crois que la France est une nation, avec une culture, avec un peuple», a-t-elle martelé.
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L'ancien ministre de l'Economie a défendu pour sa part l'idée d'une «civilisation ouverte avec des principes généreux», ajoutant à l'endroit de sa rivale : «Ça n’est pas la xénophobie, ça n’est pas la vision de la famille que votre père portait il y a quelques jours, celle que vous avez constamment menée au Parlement européen.»
Il a reproché à Marine Le Pen de porter «un esprit de défaite», selon lequel la mondialisation serait trop dure. «Face à cet esprit de défaite, je porte un esprit de conquête français», a-t-il clamé, notant que la France avait toujours réussi dans le monde, en prenant pour illustration sa langue, globale. «Ce qui fait [la] force [de la France], c’est qu’elle rayonne partout», a-t-il déclaré, alors que le projet de la candidate frontiste représente, selon lui, le repli, et donc la guerre.
La place de la France dans le monde
Sur les questions internationales, Emmanuel Macron a souhaité une France «qui sache construire la paix». Il a assuré qu'il proposerait à Donald Trump de continuer le travail de coopération avec les Etats-Unis dans la lutte contre le terrorisme islamiste.
En ce qui concerne Vladimir Poutine, il s'est dit prêt à travailler avec lui sur la résolution de la crise syrienne tout en expliquant qu'il ne serait pas soumis à ses «diktats». «C'est ce qui me distingue de Marine Le Pen», a-t-il précisé.
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La candidate du FN a quant à elle considéré que la France serait respectée si elle redevenait ce qu'elle était jadis. «Elle doit retrouver son indépendance, ce que le général de Gaulle avait imposé à de nombreuses reprises», a-t-elle expliqué.
Elle a déclaré ne pas vouloir d'une France qui se soumette «à l'impérialisme des uns et des autres», mais souhaite que Paris respecte toutes les nations, leurs cultures et leurs organisations politiques. «Nous devons être à équidistance des Etats-Unis et de la Russie», a-t-elle en outre expliqué, ajoutant qu'elle ne voyait aucune raison d'entrer dans une guerre froide avec la Russie.
La place de la France dans l'UE
Concernant l'Union européenne (UE), Marine Le Pen a émis le souhait que la France retrouve sa souveraineté. Elle voudrait que l'UE laisse place à une «alliance de nations souveraines». «Les peuples conserveront la liberté de décider pour eux-mêmes, auront la maîtrise de leurs frontières, de leur monnaie», a-t-elle appelé de ses vœux, précisant : «Les Français auront une monnaie nationale et il y en aura une autre qui servira aux banques centrales et aux grandes entreprises afin de commercer entre elles.»
Elle a en outre rappelé qu'Emmanuel Macron défendait les accords de libre-échange, comme le CETA et le TAFTA, et lui a reproché de se soumettre aux exigences de l'UE et à la concurrence européenne déloyale. «Vous n'avez pas d'esprit national, vous ne pensez pas à l'intérêt supérieur de la nation. Vous défendez des intérêts privés», lui a-t-elle lancé, ajoutant que de tous les candidats, il était le plus extrémiste dans la soumission au fédéralisme européen.
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Pour Emmanuel Macron, la question de la monnaie européenne est «fondamentale» et la vision qu'il en a diamétralement opposée à celle de sa rivale. «Une grande entreprise ne pourra pas payer en euros d’un côté et en francs de l’autre. C’est le grand n’importe quoi du projet de Marine Le Pen», a-t-il assuré. «Pour moi, sortir de l’euro, c’est dangereux», a-t-il jugé, proposant au contraire de construire «un euro fort et une politique européenne forte».
«Je suis le candidat d'une France forte dans une Europe qui protège», a lancé l'ancien pensionnaire de Bercy.
La lutte contre le terrorisme
«[Le lendemain de l'attentat sur les Champs-Elysées], vous avez dit : "je ne vais pas inventer dans la nuit un programme contre le terrorisme"», a relevé la candidate du Front national, à l'adresse de son concurrent. «Non seulement vous n'avez pas de projet, mais en plus vous avez une complaisance pour le fondamentalisme islamiste», a-t-elle poursuivi.
La candidate FN a également avancé ses propositions en matière de lutte contre le djihadisme : «Pour tous les doubles-nationaux [en lien avec les fondamentalistes] : déchéance de nationalité. Tous les fichés S qui sont en lien avec les fondamentalistes : dehors.»
«11 000 fichés pour fondamentalisme. C'est le bilan de votre gouvernement. C'est une honte», a-t-elle lancé à l'attention de son adversaire.
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«Vous êtes constamment dans l'invective», lui a rétorqué le candidat d'En Marche!, l'accusant de semer les graines du conflit. «Je serai intraitable et je mènerai la lutte sur tous les plans, mais le piège [que les fondamentalistes] nous tendent, c'est celui que vous portez, c'est la guerre civile», a-t-il affirmé.
Emmanuel Macron a soutenu que la lutte contre la menace terroriste serait sa priorité. «Les fichés S, ce sont des fichiers de renseignement [donc] tous les mettre en prison ou hors des frontières n'aurait pas de sens», a jugé le leader d'En Marche!. La clé est de renforcer le renseignement, a-t-il prôné, estimant que la fermeture des frontières ne servait à rien en ce domaine.
«Ce que vous proposez c'est de la poudre de perlimpinpin, nous avons besoin d'une plus grande coopération entre pays européens», a plaidé Emmanuel Macron.
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