Le russe Rosatom exclu d’un appel d’offres en République tchèque sur fond de crise diplomatique
Le gouvernement tchèque a annoncé en début de semaine l’exclusion du géant russe du nucléaire d’un appel d’offres pour l’extension d’une de ses centrales. Une entreprises chinoise avait été exclue quelque temps auparavant.
Le ministre tchèque de l’Industrie Karel Havlicek a annoncé, le 19 avril que la société russe d'ingénierie nucléaire Rosatom ne serait pas invitée à participer à l’appel d’offres international pour la rénovation de la centrale nucléaire de Dukovany située à quelque 200 kilomètres au sud-est de la capitale Prague.
Le maître d’ouvrage, la société tchèque de services publics majoritairement contrôlée par l'Etat CEZ, n'enverra le questionnaire d'évaluation de sécurité préalable à la participation à l’appel d’offres qu’aux trois candidats restants d'ici le 30 avril : le Français EDF, le Sud-Coréen HNPK et l’Américano-Canadien Westinghouse.
S’adressant aux médias et cité par l’agence Reuters le ministre a précisé que les fournisseurs de technologies et de matériaux sensibles ne pouvaient être qu'une «entité de Union européenne ou d'un pays de l'OTAN», ce qui exclut le russe Rosatom de ce chantier qui doit être livré en 2036 et dont le montant est évalué à 7 milliards d’euros. Mais la Corée du Sud, dont est originaire HNPK, n’est pas non plus membre de l’Otan, en dépit d’une coopération engagée en 2005.
Cette décision a pour contexte une dispute diplomatique en cours entre Prague et Moscou qui a suivi la décision du gouvernement tchèque d’expulser 18 diplomates russes. Le gouvernement tchèque affirme que des agents du renseignement militaire russe ont été impliqués dans un incident concernant un dépôt de munitions dans le village de Vrbetice, à environ 330 kilomètres au sud-est de Prague, en 2014.
Le bâtiment, loué à l’armée par une entreprise privée avait été détruit par une série d'explosions au cours desquelles deux employés ont été tués. Les autorités tchèques ont depuis affirmé que le personnel de l'ambassade de Russie pourrait également avoir joué un rôle dans cette affaire, Moscou dénonçant des accusations absurdes forgées uniquement pour complaire à Washington. La Russie a également expulsé 20 diplomates tchèques dans une mesure de réciprocité.
La Chine également exclue
«Je ne peux pas imaginer être contacté par Rosatom dans le cadre d'un diagnostic de sécurité après les derniers incidents», a précisé le ministre tchèque ajoutant qu'aucun des… candidats ne réussirait l'évaluation en collaboration avec «un fournisseur de Rosatom». Auparavant, Prague a déjà exclu de l’appel d’offres le chinois General Nuclear.
Il y a un mois encore, Karel Havlicek qualifiait encore la Russie de «partenaire énergétique clé». Inaugurée en 1995, la centrale nucléaire de Dukovany couvre environ un cinquième de la consommation électrique de la République tchèque. Elle a été assemblée par l’entreprise industrielle nationale Skoda et utilise quatre réacteurs de fabrication soviétique de la technologie VVER d’une puissance installée totale de 2 000 MWe. Dans le cadre du projet de rénovation, estimé à plus de 7 milliards de dollars, la centrale recevra une nouvelle unité de puissance de 1 200 mégawatts.
Le constructeur russe actif dans une cinquantaine de pays a réagi le jour même par un communiqué mis en ligne sur son site, jugeant que son exclusion de l'appel d'offres pour l'extension de la centrale nucléaire de Dukovany était une décision «contraire aux principes d’économie de marché, et politiquement biaisée». Rosatom actif dans une cinquantaine de pays ajoute que sa proposition prévoyait l'implication de centaines d'entreprises tchèques et européennes et qu’ «en excluant Rosatom de l'appel d'offres, les autorités tchèques excluent, tout d'abord, leur industrie nationale».