TVA triplée, allocations supprimées : l'Arabie saoudite joue l'austérité, contre la crise pétrolière

- Avec AFP

TVA triplée, allocations supprimées : l'Arabie saoudite joue l'austérité, contre la crise pétrolière© BANDAR AL-JALOUD / SAUDI ROYAL PALACE Source: AFP
L'homme fort du régime saoudien, le prince Mohammed ben Salmane, au 40ème sommet du Conseil de coopération du Golfe, à Riyad, en décembre 2019.
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Coronavirus, écroulement du prix du pétrole, guerre au Yémen : face à l'une des pires conjonctures économiques de son histoire, le royaume saoudien annonce un triplement de la TVA et la fin des allocations mensuelles à ses citoyens.

L'Arabie saoudite a annoncé ce 11 mai un plan d'austérité prévoyant un triplement de la taxe sur la valeur ajoutée et la fin des allocations mensuelles à ses citoyens, en réaction à la chute historique du prix du pétrole et aux diverses conséquences de la pandémie de Covid-19. Premier exportateur de brut au monde, le royaume espère engranger 100 milliards de riyals (24,61 milliards d'euros) à la faveur de ces mesures, qui pourraient toutefois susciter un mécontentement dans l'opinion.

«Il a été décidé la fin du versement de l'allocation de vie chère à partir de juin 2020 et que la TVA passerait de 5% à 15% à compter du 1er juillet», a déclaré le ministre des Finances, Mohammed al-Jadaan, cité par l'agence de presse publique SPA. Par ailleurs, le gouvernement «annule, étale ou reporte» les dépenses liées aux grands projets de développement destinés à moderniser l'économie et la rendre moins dépendante des exportations de pétrole.

Le ministre a affirmé que la décision avait été rendue nécessaire par la «baisse sans précédent» de la demande mondiale d'or noir et la «forte baisse des recettes pétrolières». Il a également cité deux autres «chocs» pour l'économie saoudienne : le ralentissement de l'activité en raison du confinement et les dépenses publiques «non prévues» dans le secteur de la santé. L'Arabie saoudite est le pays arabe du Golfe le plus touché par la pandémie, avec plus de 39 000 cas d'infection et 246 décès, selon les derniers chiffres officiels.

Dans le sillage de l'annonce du ministre des Finances, le géant saoudien de l'énergie Aramco a annoncé à compter de ce 11 mai une réduction de moitié du prix de l'essence, dans un geste visant manifestement à contrebalancer les mesures d'austérité.

Pour Pierre Conesa, spécialiste de l'Arabie saoudite et ex-haut fonctionnaire au ministère de la défense interrogé par RT France, le royaume saoudien est «un pays qui vit au dessus de ses moyens et qui est mono-producteur». De plus, «il reste la guerre au Yémen dont Mohammed Ben Salmane n'arrive pas à se défaire», remarque Pierre Conesa, ajoutant : «La guerre se poursuit, elle coûte cher, tous les facteurs se conjuguent.»

Des mesures «douloureuses» et «drastiques»

La semaine dernière, Mohammed al-Jadaan avait averti que des mesures «douloureuses» et «drastiques» pour le budget du pays seraient nécessaires. Comme d'autres pays du Golfe, l'Arabie saoudite n'avait introduit une TVA qu'en date du 1er janvier 2018, en démarrant avec ce taux de 5%, sur fond de baisses des prix du pétrole depuis 2014. Pour compenser la hausse du coût de la vie pour les moins favorisés, elle avait alors créé une allocation mensuelle de 1 000 riyals (près de 250 euros), qui représente des milliards de dollars de dépenses publiques chaque année.

Selon les estimations, Ryad pourrait perdre la moitié de ses recettes fiscales liées au pétrole, lesquelles assurent 70% de l'enveloppe totale. Tandis que les premiers effets économiques de la pandémie se faisaient sentir en mars, l'Arabie saoudite s'était lancée dans une guerre des prix avec la Russie en augmentant sa production et en abaissant le coût de la livraison pour ses clients, dans l'espoir de préserver voire d'augmenter ses parts de marché. Cette stratégie risquée a divisé les cours du pétrole saoudien par trois environ depuis le début de l'année.

Le 11 mai, le ministère de l'Energie a annoncé avoir demandé à Aramco de réduire sa production d'un million de barils par jour à partir de juin, afin de soutenir les cours du pétrole. Le royaume prévoit d'emprunter près de 60 milliards de dollars sur l'année pour financer son déficit budgétaire. Après avoir longtemps été excédentaire, le budget de l'Etat a constamment été dans le rouge depuis 2014. Le Fonds monétaire international (FMI) projetait en avril une contraction de 2,3% du Produit intérieur brut (PIB) en 2020.

Il est peu probable que les économies réalisées grâce à ces mesures d'austérité comblent l'énorme déficit budgétaire, qui, selon les prévisions du groupe saoudien Jadwa Investment, pourrait atteindre le chiffre record de 112 milliards de dollars cette année. «Les citoyens saoudiens commencent à ressentir concrètement l'impact économique du virus», observe Yasmine Farouk, spécialiste de l'Arabie saoudite au think tank basé à Washington Carnegie Endowment for International Peace. «Les difficultés [économiques] s'accompagneront d'un contrôle plus important des dépenses de l'Etat, notamment les millions dépensés pour [...] des événements de divertissement», estime-t-elle.

Depuis plusieurs mois, l'homme fort du royaume, le prince héritier Mohammed ben Salmane, tente de redorer le blason international d'un royaume wahhabite accusé de nombreuses violations des droits de l'homme, tant à l'extérieur de ses frontières (dans le cadre de la guerre au Yémen) qu'à l'intérieur (exécutions par décapitation voire crucifixion, droit embryonnaire des femmes etc). Mais le financement de son ambitieux programme de modernisation et de diversification de l'économie dépend fortement, à court terme, du pétrole. L'un de ses projets emblématiques, la construction d'une mégalopole futuriste sur les côtes de la mer Rouge (nord-ouest), paraît compromis.

Outre son coût faramineux de 500 milliards de dollars, une résistance inattendue a vu le jour parmi la population locale, dans un pays pourtant peu enclin aux voix discordantes. En avril, la fronde a abouti à la mort d'un membre de la tribu Houweitat, tué dans une fusillade avec les forces de sécurité car il refusait de céder ses terres.

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