La Suisse et le Royaume-Uni tentent de protéger leurs relations commerciales d'un Brexit dur
Londres et Berne ont signé un accord de libre-échange voué à prendre le relai de celui qui lie la Suisse et l'Union européenne. Cependant les relations commerciales entre les deux pays ont déjà commencé à diminuer.
Le ministre suisse de l'économie Guy Parmelin et le ministre anglais du commerce extérieur, Liam Fox, ont signé le 11 février à Berne un accord bilatéral sur le commerce.
Il doit permettre aux deux pays de poursuivre normalement leurs relations commerciales après la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE), laquelle doit en principe se produire le 29 mars. Cet accord est étendu à la Principauté de Liechtenstein, au titre de l'union douanière Suisse-Liechtenstein.
Il entrera en vigueur dès que les accords Suisse-UE cesseront d'être applicables aux relations entre la Suisse et le Royaume-Uni. En effet, le cadre réglementaire de l’UE régit non seulement les liens entre le Royaume-Uni et les 27 autres Etats membres, mais également avec les pays comme la Suisse qui ont signé un accord commercial avec l’Union européenne.
En cas de Brexit dur, l’accord commercial Suisse-Royaume-Uni instaurera un accord de libre-échange préservant, au niveau bilatéral, l’essentiel des dispositions existant avec l’Union européenne. Il entrerait en vigueur le 30 mars, au lendemain de la sortie officielle du Royaume-Uni de l’UE.
Si une période de transition commençait le 30 mars, les accords bilatéraux Suisse-UE continueraient à s'appliquer jusqu'à la fin de cette période de transition.
Un accord suspendu aux négociations UE-Royaume-Uni
Le Royaume-Uni est le sixième marché d’exportation de la Suisse. En 2017 elles ont atteint 11,4 milliards de Francs suisses (10 milliards d’euros). Les principaux secteurs sont la pharmacie, les machines-outils et l’horlogerie. De son côté, la Suisse est le cinquième marché d'exportation du Royaume-Uni en dehors de l'UE (après les Etats-Unis, la Chine, Hong Kong et les Emirats arabes unis).
Sans l’accord signé à Berne, en cas de Brexit sans accord de retrait, les relations commerciales entre la Confédération helvétique et le Royaume-Uni auraient été menacées par un vide juridique. Pour la Suisse, la stabilité des relations commerciales extérieures est un enjeu majeur. Le pays en dépend pour environ 40% de son PIB. Et avec une économie quatre fois moins importante en volume que celle de la France, la Suisse n’exporte que deux fois moins et surtout, réussit à présenter un solde systématiquement excédentaire qui a dépassé 29 milliards de Francs suisses (25,75 milliards d’euros) en 2017.
Une relation commerciale en net recul depuis 2016
Aussi, les négociations entre les deux pays ont commencé il y a deux ans et le Conseil fédéral (gouvernement suisse) a élaboré une stratégie qu’il a intitulée «mind the gap» (attention à l’espace) en référence à une recommandation de sécurité qu’on trouve dans les rames du métro londonien. Les deux pays ont déjà signé, dans ce cadre, ces derniers mois des accords sur le transport routier, le transport aérien, les assurances et la libre circulation des personnes.
Malgré tout, le recul de la part britannique dans le commerce extérieur de la Confédération est déjà une réalité. En 2016 le Royaume-Uni était le troisième marché pour les exportations suisses qui avaient atteint cette année-là près de 30 milliards de francs suisses (env. 28 milliards d’euros). Depuis, il est passé à la sixième place, et en 2018 les ventes suisses au Royaume-Uni auraient touché un plus bas depuis 30 ans, alors que l’année marque un record de dynamisme pour le commerce extérieur helvète.
Il est vrai que la croissance britannique s’est tassée à 1,4% en 2018 (France +1,5%), au plus bas depuis six ans. Et l’année précédente le produit intérieur brut (PIB) n’a crû que de 1,8%, moins que la moyenne de la zone euro (+2,4%). Depuis la victoire du Brexit lors du référendum du 23 juin 2016, le Royaume-Uni a entamé des négociations avec de nombreux pays pour signer des accords visant à assurer la stabilité de ses relations commerciales, comparables à celui signé le 11 février dans la capitale fédérale. Toutefois, à ce jour, outre la Suisse, il n’a mené à bien ses négociations qu’avec le Chili, Israël… et les Iles Féroé.
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