La France grogne contre le TAFTA et cette hostilité gagne les grands partis politiques
Le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement déchaîne les passions des deux côtés extrêmes de l'échiquier politique depuis des mois, voir des décennies. Ces derniers jours, la contestation a aussi gagné les partis de gouvernement.
Lors de l’émission Dialogues citoyens diffusée le 14 avril sur France 2, François Hollande, interrogé par un électeur Front national (FN) sur le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TAFTA), un accord de libre-échange transatlantique, a répondu : «La France a fixé ses conditions. Elle a dit: "S'il n'y a pas de réciprocité, s'il n'y a pas de transparence, si pour les agriculteurs il y a un danger, si on n'a pas accès aux marchés publics, et si en revanche les Etats-Unis peuvent avoir accès à tout ce que l'on fait ici, je ne l'accepterai pas"».
Comment en est-on arrivé à cette situation ?
En annonçant le début de négociations en vue de la mise en place de cet espace de libre-échange transatlantique en 2013, le président américain Barack Obama a fait prendre conscience au grand public que des processus en vue de sa créations avaient commencé bien plus tôt.
Pierre Hillard, ancien professeur de relations internationales à l’Ecole supérieure de commerce extérieur de Paris, a établit une chronologie des différents traités et accords qui ont préparé le terrain à ce TAFTA aujourd’hui tant décrié.
En 1990 la déclaration transatlantique a été ratifiée, suivie du Nouvel agenda transatlantique en 1995, du Nouveau partenariat transatlantique en 1998, du Conseil économique transatlantique en 2007, puis des différentes résolutions du parlement européen destinées à mettre en place ce marché transatlantique, qui est aujourd’hui l’objet de toutes les passions.
Après avoir été l’apanage de l’extrême-gauche et des altermondialistes, notamment représentés par un collectif nommé Stop-TAFTA, les problématiques liées à cet accord de libre-échange ont aussi été dénoncée par les forces patriotes situées à l’opposé du spectre politique, telles que le Front national, qui a dédié une campagne à la lutte contre ce traité, ou encore Debout la France.
Fin des négos #TAFTA? https://t.co/bSqENz11br Ce serait 1 immense victoire pour 1 lutte commencée il y a...8 ans! https://t.co/X00Bzpm2sR
— Helene Franco (@fdg_helenefr) 20 avril 2016
Si quelques membres des Républicains (LR) ont finalement émis des réserves concernant la négociation de ce texte, l’opposition au TAFTA est aujourd’hui aussi présente au sein des parlementaires étiquetés au Parti socialiste (PS). Au début du mois d’avril, une soixantaine de députés ont publié une tribune appelant à ne pas «réduire au silence le Parlement français», relevant notamment les conditions de Matthias Fekl – secrétaire d’Etat au Commerce extérieur – exigeant entre autre une transparence des négociations et une garantie de préservation «des normes sociales et environnementales».
Ce même Matthias Fekl, constant que ces conditions n’étaient pas réunies, a laissé entendre que la France pourrait cesser les pourparlers concernant l’élaboration de l’accord. Mais des critiques du gouvernement estiment que cette opposition reste une posture. L’eurodéputé écologiste Pascal Durand a notamment fait un parallèle entre cette posture et le discours du Bourget de François Hollande déclarant la guerre à la finance, son «ennemi», assurant que le président de la République pouvait très bien «faire croire qu’il défend l’intérêt national et de l’autre avancer par derrière».
Pourquoi Bruxelles brade l’Europe?Un ouvrage pour décrypter l’ac...https://t.co/h0tM7EMppW … via @bilaterals_orgpic.twitter.com/nBnJ7uCQKA
— LIBERTÉ DE LA PRESSE (@MONDE_WEB) 11 avril 2016
Pour le collectif Stop-TAFTA, «la position actuelle du gouvernement révèle la pression citoyenne à laquelle il doit faire face, mais l’exécutif s’obstine à soutenir les intérêts de quelques groupes privés en encourageant la ratification du CETA [accord entre l'UE et le Canada]». Jean-Michel Coulomb, l'un des membres de l'organisation, estime pour sa part que si le gouvernement français «veut être crédible» il doit «mettre un terme aux deux accords transatlantiques qui relèvent d’un même agenda en matière de politique commerciale et d’investissement».