Négociations entre agro-alimentaire et distribution : la facture va encore augmenter
- Avec AFP
En février, l’augmentation moyenne des prix de l’alimentation sur un an a atteint 14,5%, bien au-delà de l’inflation. Après les négociations entre producteurs et grandes surfaces, une augmentation de 10 à 15% est à craindre pour le mois de mars.
Combien coûteront les yaourts, steaks hachés ou les pâtes dans les rayons au printemps ? Seule certitude le 2 février, quelques heures après la clôture des négociations commerciales entre les supermarchés et l'industrie agroalimentaire : la facture va grimper.
Les industriels et la Fédération du commerce et de la distribution (FCD) s'entendent pour dire que la hausse du prix payé par la grande distribution à ses fournisseurs devrait être de l'ordre de 10%.
«Je ne vais pas me hasarder à donner un chiffre», a pour sa part affirmé le ministre de l'Economie Bruno Le Maire dans la matinée du 2 mars, lors d'un déplacement au Salon de l'Agriculture à Paris. «Aujourd'hui toute hausse, quelle qu'elle soit, est très difficile à vivre pour nos compatriotes», a-t-il insisté.
Les négociations annuelles permettent de fixer le prix et les conditions auxquelles les grandes surfaces s'approvisionneront auprès des industriels. Elles ont pris fin le 1er mars à minuit, après trois mois de pourparlers particulièrement houleux cette année. En tout cas, la conclusion de ces discussions aura un impact direct sur le ticket de caisse des consommateurs qui ont déjà vu leur pouvoir d'achat dégringoler en raison d'une inflation alimentaire évaluée par l'Insee (Institut national de la statistique) à 14,5% sur un an en février.
Entre 10% et 12% de hausse attendue
Le 28 février au soir, à 24 heures de la clôture des négociations, seuls 70% des industriels de l'agroalimentaire avaient signé leurs contrats avec tous leurs clients distributeurs, signe de l'âpreté des discussions, selon la principale organisation du secteur, l'Ania. «La très grande majorité va signer par nécessité» au dernier moment sauf à perdre des clients distributeurs, relevait le jour même son président Jean-Philippe André.
Le chiffre précis de la hausse des prix obtenu par les industriels devrait être connu dans les prochains jours, le temps de réunir les contrats et de la calculer mais les industriels ont demandé «entre 10 et 12%» pour répercuter la flambée de leurs coûts de production, selon l'Ania.
Ils avaient en mars 2022 obtenu une hausse d'environ 3%, avant que l'inflation galopante, liée notamment à la guerre en Ukraine, ne conduise à la réouverture de négociations pour répercuter le coût des matières premières agricoles, des emballages, puis du gaz et de l'électricité.
Mieux rémunérer les éleveurs
«Ce que nous demandons est plus élevé que les années précédentes», a déclaré le 28 sur RMC le porte-parole du géant laitier Lactalis, Christophe Piednoël, affirmant que cette augmentation avait pour but de mieux rémunérer les éleveurs.
Inaugurant le Salon de l'agriculture le 25 février, Emmanuel Macron avait appelé les supermarchés à «participer à l'effort», estimant que l'industrie agro-alimentaire avait déjà fourni «un effort considérable ces dernières années».
La présidente du premier syndicat agricole, la FNSEA, Christiane Lambert, a tempêté contre certaines grandes surfaces qui refusent de payer «la juste part» qui permettrait aux agriculteurs de vivre de leur travail. Les enseignes, de leur côté, dénoncent l'absence de transparence sur les coûts de production et les demandes «délirantes» des industriels.
Le panier inflation, pas enterré
«Le vrai chiffre, c'est 15% de hausse qui nous sont demandés par les industriels», a dénoncé en début de semaine sur France inter le PDG de Système U, Dominique Schelcher. Quant au directeur général de la Fédération du commerce et de la distribution Jacques Creyssel, cité par l’AFP, il affirme que «quelques multinationales ont commencé à négocier très tardivement et cherchent à tirer partie de la situation inflationniste» dans le but selon d’imposer des augmentations allant jusqu'à 20%.
Le ministre de l’Economie et des Finances a par ailleurs laissé entendre que le gouvernement discutait avec les industriels et les distributeurs dans le but d’amortir le choc sur le budget des ménages, et espérait finaliser un dispositif de soutien d'ici la mi-mars.
Parmi les mesures envisagées, un panier-inflation proposé par la ministre déléguée au Commerce, Olivia Grégoire, qui a assuré le 28 février que cette proposition, objet de nombreuses critiques, n'avait pas été définitivement écartée.