RDC : le ministère public requiert 10 ans de travaux forcés contre l’ancien ministre de la Justice

Constant Mutamba encourt une lourde peine assortie de sanctions politiques et civiles, dans le cadre d’une affaire de détournement présumé de 19 millions de dollars américains qui devaient servir à un projet de construction d’une prison à Kisangani.
Lors d’une audience publique de la Cour de cassation de la République démocratique du Congo (RDC) le 13 août, le procureur général a pointé, lors de sa plaidoirie contre l’ancien ministre de la Justice Constant Mutamba, son recours à une procédure de gré à gré, illégale dans le pays, dans un appel d’offres pour un projet de construction d’une prison à Kisangani, dans la province de la Tshopo.
Ce projet s’inscrit dans le cadre du plan national de modernisation carcérale. Le ministère public affirme que l’accusé a contourné les institutions compétentes, et notamment le Secrétariat général à la Justice, et a conclu un contrat avec la société Zion Construction, une « entreprise de façade » qui n’aurait aucune existence juridique, selon l’accusation.
10 ans de travaux forcés assortis de sanctions politiques et civiles
Dans la Grande Salle Marcel Lihau du tribunal, l'avocat général Sylvain Kalwila a présenté son réquisitoire, requérant une peine de 10 ans de travaux forcés, avec une interdiction de voter ou de se porter candidat pendant dix ans après la fin de la peine, une privation du droit à la libération conditionnelle et à la réhabilitation, ainsi qu’une interdiction définitive d’accéder à des fonctions publiques, quel qu’en soit le niveau.
Sylvain Kalwila a d’ailleurs rappelé que les fonds avaient été directement virés sur le compte d’une société fictive, qui ne disposait ni de siège social, ni de personnel, sans garantie bancaire et surtout sans avis de non-objection préalable. Violant les procédures en vigueur, le marché aurait été exécuté sans l’aval du Conseil des ministres ni celui de la Première ministre.
D’un point de vue juridique, selon l'avocat général, l’infraction s’est constituée au moment où l’argent a été viré du compte du Fonds de réparation et d’indemnisation des victimes des activités illicites de l’Ouganda en RDC (FRIVAO) du ministère vers celui de Zion Construction. Enfin, pour l’accusation, la qualité de juriste expérimenté de Constant Mutamba le plaçait dans une position où il ne pouvait ignorer les lois en vigueur, d’où la preuve d’une intention frauduleuse manifeste.
Une défense axée sur la bonne foi de l’accusé
Pour les avocats de la défense, la bonne foi de Constant Mutamba est prouvée par le fait qu’il ait copié l’ordre de paiement à l’Inspection générale des finances et à d'autres organes de contrôle pour suivre le mouvement des fonds virés sur le compte de l’entreprise de construction.
Pour sa part, l’ancien ministre de la Justice a fait prévaloir son éducation et ses convictions chrétiennes, qui ne pouvaient lui permettre de détourner les fonds publics. Il a aussi rappelé ses « loyaux services à la République » durant son mandat ministériel. Il a estimé que la procédure en justice n’avait pour but que de l’écarter du gouvernement.
Il convient de noter que le procès contre Constant Mutamba fait suite à la résolution de l'Assemblée nationale ordonnant la poursuite judiciaire contre l'ancien ministre de la Justice. L’arrêt de la Cour devrait être rendu le 27 août prochain.