Sénégal : le FMI dévoile une «dette cachée» de 7 milliards de dollars sous l’ancien président Macky Sall

Une partie de la dette publique du Sénégal a été «cachée» entre 2019 et 2024 sous l'ancien président Macky Sall, soulevant un défi de taille pour la nouvelle administration. Qu’est-ce que cette «dette cachée» ? Le FMI évoque des «manipulations comptables». Des analystes y voient des «falsifications» visant à donner une image plus positive du pays.
Le Fonds monétaire international (FMI) a révélé l'existence d'une «dette cachée» du Sénégal entre 2019 et 2024 sous l'administration de l’ancien président Macky Sall. Selon un audit de la Cour des comptes sénégalaise, cette dette non déclarée s'élève à environ 18 558 milliards de FCFA (soit environ 7 milliards de dollars), portant la dette publique totale à 99,67% du PIB, bien au-delà du chiffre officiel de 74,41% précédemment annoncé par le gouvernement.
Cette situation découle de manipulations comptables, notamment l'exclusion de certaines dépenses et la sous-estimation du déficit budgétaire, qui aurait atteint 12,3% du PIB en 2023 au lieu des 6% annoncés. Des prêts auraient été contractés en dehors des circuits officiels, et des dépenses extrabudgétaires ont été effectuées via des comptes bancaires non déclarés, ce qui viole les règles de gestion publique.
Le FMI a signalé que cette falsification des données économiques pourrait retarder les négociations pour un nouveau programme d’aide financière, d'un montant de 1,8 milliard d'euros, jusqu'à ce que les autorités sénégalaises identifient les mécanismes ayant permis de dissimuler la dette et mettent en place des mesures correctives pour éviter que cela ne se reproduise.
Une restructuration de la dette ou un rééchelonnement n’est pas exclu, mais le FMI estime qu’il est trop tôt pour tirer des conclusions définitives. Le FMI décidera «dans les semaines à venir» si le Sénégal bénéficiera d'une dérogation ou devra rembourser les sommes déjà prêtées avant de pouvoir reprendre un nouveau programme d'aide.
Redorer l’image du pays ?
Il est fort probable, selon des analystes locaux, que le gouvernement de l'époque ait dissimulé une partie de la dette pour donner une image plus positive de l'économie sénégalaise et de la situation financière du pays. En présentant une dette publique plus faible et un déficit budgétaire maîtrisé, le gouvernement pouvait rassurer les investisseurs étrangers et les bailleurs de fonds, comme le FMI et la Banque mondiale, sur la stabilité économique du Sénégal.
Cependant, cette stratégie s'est retournée contre le pays, car la révélation de la «dette cachée» pourrait compliquer les négociations avec les créanciers et peser lourdement sur l'économie sénégalaise. Cette révélation suscite un vif débat au Sénégal, notamment sur la gestion économique du pays et les conséquences potentielles pour la nouvelle administration.
D’inspiration «panafricaniste de gauche», le programme du nouveau président Bassirou Diomaye Faye et de son premier ministre Ousmane Sonko vise à garantir la souveraineté tant politique qu’économique et sociale du Sénégal. Les deux jeunes dirigeants ont initié plusieurs réformes souverainistes et actions marquantes dans les domaines politique, économique et social, mais aussi militaire et diplomatique. Ils devront faire face désormais à ce défi hérité de l’ère Macky Sall.