L'incident avec l'avion israélien qui, selon certaines sources, serait abattu par les forces syriennes, montre que la Syrie dispose d'un armement sophistiqué pour répondre désormais à toute attaque israélienne, estime le politologue Bassam Tahhan.
RT France : La Syrie et Israël ont des versions différentes de l’incident du 17 mars. La Syrie affirme avoir abattu un avion israélien, Israël réfute. Que s'est-il passé, selon vous ?
Bassam Tahhan (B. T.) : On peut dire que, avec ses menaces contre Damas, Avigdor Lieberman cherche à obtenir des Etats-Unis plus d’avions. Alors qu'ils en ont déjà offert deux à Israël. Ce qui vient de se passer montre que la renommée des forces aériennes israéliennes, prétendument invincibles, est erronée. Quelle est la bonne version ? Israël a très bien pu cacher la vérité pour ne pas affoler sa population. On peut aussi imaginer que cet avion bombardier israélien soit tombé dans une zone tenue par des rebelles qui bénéficieraient de la bienveillance d'Israël et qui auraient nié avoir vu l’avion israélien être touché. Cela met en doute la toute-puissance d’Israël : la Syrie a «osé» envoyer des missiles contre les avions israéliens.
Quand Avigdor Lieberman menace et hausse le ton, il joue avec le feu
RT France : Pourquoi un tel incident survient-il maintenant, alors même que cela fait six ans que cette guerre dure ?
B. T. : Pour mieux comprendre la motivation israélienne, il faut voir que l’armée syrienne du côté de Palmyre a eu des succès, et qu’Israël vient peut-être là en aide à certains rebelles. D’autre part, les Israéliens ont voulu un peu tester l’attitude russe au cas où ils interviendraient en Syrie. Les Russes n’ont pas activé leurs S-400 et S-300 contre les quatre avions israéliens. C’est l’armée syrienne qui a répondu avec ses propres moyens de défense anti-aérienne. Cela prouve que les Syriens ont désormais l’intention de répondre à toute attaque israélienne. La Syrie se montre donc de plus en plus ferme avec son voisin. Quand Avigdor Lieberman menace et hausse le ton, il joue avec le feu. Ensuite, l’attitude russe : l’ambassadeur israélien à Moscou a été convoqué, ce qui montre que les Russes sont mécontents de l’opération israélienne et veulent faire comprendre que ce n’est pas en s’attaquant la Syrie qu’Israël peut se préserver contre le Hezbollah. Enfin, ce que cherchait Israël : s’attaquer à des installations militaires de fabrication de missiles et stopper l’avancée de l’armée syrienne.
RT France : Que cela signifie-t-il pour la région ?
B. T. : Ces incidents montrent qu'Israël veut l'aide des Etats-Unis pour contrer les présences russe et iranienne dans la région. Car on commence à parler d'un accord syro-iranien qui consisterait à donner à Téhéran une base militaire maritime entre Lattaquié et la frontière syro-turque.
Pour la première fois Israël se retrouve en position de faiblesse au niveau militaire dans la région
Je crois qu'Israël joue avec le feu. Si, vraiment, le système israélien Arrow a abattu le missile syrien, ce système ne peut pas sauvegarder Israël d'une attaque d'une centaine de missiles, d'une attaque qui pourrait venir du Hezbollah, des Syriens ou des Iraniens. Pour la première fois Israël se retrouve en position de faiblesse au niveau militaire dans la région. Toutes les fanfaronades de Lieberman sont destinées à la «consommation locale» et servent à rassurer son peuple. Mais les responsables militaires ne sont pas aussi sereins.
La Syrie dispose à l'évidence d'un armement sophistiqué pour répondre à toute attaque israélienne. Et le message de Moscou est clair : il faut que Tel Aviv compte sur la présence russe pour échapper à tous les dangers qui l'entourent. S'il devait y avoir une nouvelle frappe en Syrie de la part de son armée, Israël risquerait gros.
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