Si la commutation de la sentence de Chelsea Manning est un pas dans la bonne direction, elle mérite nettement plus, explique Melinda Taylor, avocate de Julian Assange, s'inquiétant de l'avenir des lanceurs d'alertes.
RT : Tous les regards sont fixés maintenant sur Julian Assange qui avait dit être prêt à l’extradition aux Etats-Unis, si Chelsea Manning était graciée. Est-il vraiment prêt à faire ce pas ?
Melinda Taylor (M. T.) : Julian Assange est prêt à faire tout ce qu’il a annoncé. Mais la décision qui a été prise pour l’affaire de Chelsea Manning est en dessous de ce qu’elle mérite : sa peine a été commuée, mais elle n’a pas été graciée, elle n’avait même jamais été reconnue coupable.
RT : Quel avenir attend maintenant Chelsea Manning, après ces sept années passées en prison ?
M. T. : Elle ne sera pas libérée avant le mois de mai, et j’appelle les organisations à l'aider à trouver un emploi. On ne peut que saluer son courage, et c’est en l’aidant que l’on peut le faire.
La décision concernant Chelsea Manning est un premier pas dans la bonne direction
RT : Pourra-t-il y avoir des poursuites contre elle après le mois de mai ?
M. T. : Je crois que la décision de commuer la sentence ne laissera aucune raison pour engager de nouvelles poursuites fondées sur les mêmes accusations.
RT : Que va faire Julian Assange après le mois de mai ?
M. T. : La raison pour laquelle Julian Assange est depuis cinq ans détenu de façon illégale, c’est le risque qu’il pourrait subir des poursuites judiciaires et être jugé injustement aux Etats-Unis. La décision concernant Chelsea Manning est un premier pas dans la bonne direction, mais les avocats devront évaluer si cela va assez loin pour garantir ses droits fondamentaux.
RT : Y-a-t-il une sorte de contrat derrière tout cela, un stratagème via lequel Barack Obama essayerait de changer quelque chose pendant les derniers jours qui lui restent au pouvoir ?
M. T. : Il essaie certainement de répondre aux critiques incessantes qui sont exprimés à son égard à cause de sa manière de traiter les lanceurs d’alerte. Mais il n'en fait pas assez. C’est une tentative assez faible de régler le problème. Espérons que la nouvelle administration mettra fin à cette guerre injuste avec les lanceurs d’alerte et qu'elle assurera une protection réelle et efficace à ceux qui révèlent les crimes de guerre et les violations des droits de l’homme.
Nous espérons qu’une nouvelle page va s’ouvrir, et que les précédents de l’administration de Barack Obama ne seront pas appliqués
RT : Qu’attendez-vous de la politique de la nouvelle administration de Donald Trump à ce sujet ?
M. T. : C’est évidemment l’arrivée d’un ensemble de nouveaux facteurs et d'une nouvelle politique. De nouveaux standards pourraient être appliqués aux lanceurs d’alerte. Nous espérons qu’une nouvelle page va s’ouvrir, et que les précédents de l’administration de Barack Obama ne seront pas appliqués, parce que ces précédents-là étaient faux, injustes, contraires à la démocratie.
Nous espérons que la nouvelle administration va apprécier le rôle que jouent des organisations comme WikiLeaks, qui ont eu assez de courage pour publier de vraies informations sur ceux qui ont le pouvoir.
Il y a certainement un sentiment de frustration, car on ne voit pas de lumière au bout du tunnel
RT : Parlez-nous de Julian Assange et de son sort à l'heure actuelle.
M. T. : Il est toujours détenu de façon arbitraire, ce qui est extrêmement injuste. Le groupe de travail sur la détention arbitraire a publié une décision il y a presque un an, et, pourtant, le Royaume-Uni et la Suède n’ont pas réussi à prendre la moindre mesure pour la mettre en œuvre. Il y a certainement un sentiment de frustration, car on ne voit pas de lumière au bout du tunnel. Espérons que l’année 2017 mette fin à cette impasse.
Ce qu’il fait maintenant, c’est ce qu’il fait toujours : il continue de publier, c'est un éditeur. Wikileaks continue à fonctionner, quoi qu'il arrive, à publier une quantité énorme d’informations.
RT : Qu’en est-il aujourd’hui des accusations de la part de la Suède ?
M. T. : Ce ne sont que des accusations. Julian Assange n’est jamais passé devant un juge. L’année dernière il a été interrogé. C’est une victoire, il a dû attendre plusieurs années pour avoir l’opportunité de blanchir son nom. Mais il a fallu tant de temps... le procureur suédois aurait pu l’interroger il y a cinq ans.
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