Pour Snowden, on ne peut condamner Assange sans exposer tous les autres médias et journalistes
Pour le lanceur d'alerte Edward Snowden, l'extradition du fondateur de WikiLeaks pourrait avoir un impact sur les médias dans leur ensemble. Il estime à cet égard que les journalistes ne semblent pas prendre toute la mesure de cette menace.
Le lanceur d'alerte, ancien analyste de la CIA et de la NSA, Edward Snowden, ne cesse de soutenir le fondateur de WikiLeaks dont le procès se déroule actuellement à Londres. Selon lui, la volonté américaine d’extrader Julian Assange afin de le juger pour espionnage constitue une grave menace pour les journalistes du monde entier. Mais pour Snowden, nombre d'entre eux restent hostiles ou indifférents au sort d'Assange car ils ont placé la politique avant les principes, et avant même leurs propres intérêts.
Assange n'est pas la source, il est simplement un éditeur. Il dirige une organisation de presse
«Je pense que cela revient en grande partie au fait que les gens oublient quels sont les principes et pourquoi ceux-ci sont importants», a analysé Edward Snowden dans une interview accordée au podcast audio et vidéo The Joe Rogan Experience, le 15 septembre. Poussant plus loin la réflexion, il a ajouté : «Vous pouvez haïr Julian Assange, vous pouvez penser qu'il est une marionnette de la Russie, vous pouvez penser qu'il est la pire personne sur Terre – une réincarnation d'Hitler ou de Staline – et toujours réaliser que le condamner vous fait du mal.»
Rappelant que le travail de Julian Assange est identique à celui de tout journaliste, à savoir recueillir et publier des informations obtenues par des sources, Edward Snowden estime qu'inculper Assange pour son travail revient à menacer par là même tous les journalistes et tous les médias. «On ne peut pas condamner Julian Assange [...] sur la base de l'Espionage Act sans exposer le New York Times, le Washington Post, CBS, NBC, ABC, CNN, FOX, etc. sur la base des mêmes charges [...] et je pense que les gens ne prennent pas la mesure de cela», déclare-t-il.
Edward Snowden dénonce également l'invocation de l'Espionage Act pour inculper Assange. Il rappelle à cet égard, que le recours à cette loi de 1917 n'a jamais eu lieu contre des journalistes et que c'était une sorte d'«accord tacite» qui a traversé les différents gouvernements étatsuniens. «Ils rompent cet accord avec l'affaire Julian Assange. Assange n'est pas la source, il est simplement un éditeur. Il dirige une organisation de presse», éclaire Edward Snowden.
Le gouvernement américain […] essaie d'extrader ce type et de le mettre en prison pour le reste de sa vie pour lui faire payer le meilleur travail que WikiLeaks n'a jamais fourni
Rappelant que WikiLeaks a révélé au monde des dossiers compromettants pour les Etats-Unis concernant leurs guerres en Irak et en Afghanistan, Edward Snowden a également expliqué : «Le gouvernement américain […] essaie d'extrader ce type et de le mettre en prison pour le reste de sa vie pour lui faire payer le meilleur travail que WikiLeaks n'a jamais fourni… A savoir les journaux de guerre de l'Irak et de l'Afghanistan, les registres des détenus à Guantanamo Bay. Des choses qui concernent des crimes de guerre explicites et des abus de pouvoir.»
The extradition of Julian Assange is a malicious prosecution by any standard. Even critics of the man ought to condemn this as a show trial. The "crime" in question is the greatest public service @Wikileaks ever performed: exposing Iraq-era abuses.
— Edward Snowden (@Snowden) September 7, 2020
Drop the charges. #FreeAssangehttps://t.co/JhIrfro7cV
C'est grâce notamment à l'aide précieuse de WikiLeaks qu'Edward Snowden a réussi à obtenir l'asile en Russie. En juin 2013 à Hong Kong, Sarah Harrison, une proche collaboratrice de Julian Assange, a travaillé avec l'équipe de WikiLeaks pour lui obtenir un asile en négociant avec 21 pays. Elle est restée bloquée pendant 39 jours avec lui dans la zone de transit de l'aéroport international Cheremetievo de Moscou en juillet 2013, jusqu'à ce que la Russie lui accorde l'asile.