Mali : la junte annonce une transition de trois ans «pour revoir les fondements de l'Etat malien»
- Avec AFP
Après son coup d'Etat militaire le 18 août, la junte désormais au pouvoir au Mali a annoncé une transition de trois ans «avec un gouvernement en majorité composé de militaires» et donné son accord pour «libérer le président [Ibrahim Boubacar] Keïta».
Après avoir annoncé le 23 août au soir une transition de trois ans dirigée par un militaire, la junte, au pouvoir depuis une semaine au Mali, et les émissaires ouest-africains de la Communauté des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) se sont séparés, ce 24 août, après trois jours de négociations sans accord sur les conditions d'un transfert du pouvoir aux civils.
La junte a par ailleurs accepté de libérer le président déchu Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), qu'elle détient depuis le 18 août. Mais son rétablissement (exigence initiale de la Cédéao) n'est désormais plus à l'ordre du jour, le chef de l'Etat ayant affirmé aux émissaires ne plus vouloir gouverner.
Trois ans de transition
«La junte a affirmé qu'elle souhaite faire une transition de trois ans pour revoir les fondements de l'Etat malien. Cette transition sera dirigée par un organe présidé par un militaire, qui sera en même temps chef de l'Etat», a fait savoir à l'AFP une source au sein de la délégation de la Cédéao, à l'issue du deuxième jour de négociations avec la nouvelle équipe au pouvoir à Bamako.
Un membre de la junte a confirmé à l'AFP «les trois ans de transition avec un président militaire et un gouvernement en majorité composé de militaires».
Selon la même source de la Cédéao, la junte a donné son accord pour «libérer le président [Ibrahim Boubacar] Keïta qui pourra repartir à son domicile» de Bamako. Et de préciser : «Et s'il souhaite voyager pour des soins, il n'y a pas de problème.»
Quant au Premier ministre Boubou Cissé, arrêté en même temps que IBK et détenu dans le camp militaire de Kati, dans la banlieue de la capitale, «nous avons obtenu de la junte qu'elle accepte qu'il soit dans une résidence sécurisée à Bamako», a ajouté ce responsable ouest-africain. Toutes ces informations ont été confirmées par la source de la junte.
La deuxième journée de négociations avait débouché sur des avancées sans accord complet. «Nous avons pu nous entendre sur certains points mais pas sur l'ensemble des points de discussion», a déclaré à sa sortie de plusieurs heures de réunion le chef de la délégation ouest-africaine, l'ancien président nigérian Goodluck Jonathan, mandaté par la Cédéao pour tâcher de rétablir «l'ordre constitutionnel» au Mali.
Le président IBK avait été contraint d'annoncer sa démission dans la nuit du 18 au 19 août après avoir été arrêté par des militaires.
Le 22 août, plusieurs envoyés de la Cédéao ont pu rencontrer le chef d'Etat déchu. «Nous avons vu le président [Ibrahim Boubacar] Keïta», a confirmé Goodluck Jonathan, qui a précisé à son propos : «Ça va.»
Auparavant, la délégation de la Cédéao avait été reçue pendant une trentaine de minutes par les membres du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) mis en place par la junte, dont le nouvel homme fort du pays, le colonel Assimi Goïta.
Les pays voisins du Mali ont réclamé le «rétablissement» d'IBK
Le président de la Commission de la Cédéao, Jean-Claude Kassi Brou, qui espère «pouvoir tout finaliser d'ici lundi [24 août]», a souligné la «volonté de vraiment aller de l'avant» des militaires.
«Il faut des résultats parce que le 26 août, les chefs d'Etat de la Cédeao se réunissent pour dire s'ils renforcent les sanctions contre la junte ou si on desserre l'étau», a expliqué un membre de la délégation.
Les pays voisins du Mali, réunis en sommet extraordinaire, avaient réclamé le 20 août le «rétablissement» du président Ibrahim Boubacar Keïta et décidé d'envoyer cette délégation à Bamako, la quatrième de l'ancien président Goodluck Jonathan depuis le début de la crise qui ébranle le Mali suite aux législatives contestées du printemps.
Elu en 2013 et réélu en 2018, le président IBK était fortement contesté dans la rue, à l'appel d'un mouvement d'opposition hétéroclite qui réclamait sa démission.
Dénoncé par la communauté internationale, le coup d'Etat militaire n'a suscité aucune opposition notable à Bamako. Les Maliens ont repris leurs activités dès le lendemain du putsch et la télévision nationale, l'ORTM, poursuit ses programmes.
Les militaires au pouvoir ont promis de mettre rapidement en place une «transition politique». Ils ont été acclamés le 21 août par des milliers de personnes dans le centre de Bamako.