Dénonçant un esprit de «toxicité» chez Amazon, un vice-président claque la porte avec fracas
L'informaticien et vice-président d'Amazon, Tim Bray, a démissionné avec fracas du poste qu'il occupait depuis plus de cinq ans. Il s'est fendu au passage d'une longue diatribe contre la multinationale américaine.
Le vice-président d'Amazon Tim Bray a annoncé sa démission le 1er mai d'Amazon Web Services, pour protester contre le licenciement de plusieurs employés aux Etats-Unis qui avaient dénoncé leurs conditions de travail en période de Covid-19. Le cadre dirigeant affirme avoir protesté par les canaux officiels de la société, sans vouloir donner plus de détails sur ces échanges.
Rester un vice-président d'Amazon aurait signifié, de fait, avaliser des actions que je méprisais
«Ceci étant fait, rester un vice-président d'Amazon aurait signifié, de fait, avaliser des actions que je méprisais. Alors j'ai démissionné», a justifié l'ingénieur, soulignant avec humour que quitter ce poste lui coûterait probablement plus d'un «million – hors impôt – de dollars, sans parler [de perdre] le meilleur boulot que j'ai jamais eu».
Parmi les noms de salariés licenciés cités, figurent ceux d'Emily Cunningham et Maren Costa, membres de l'organisation Amazon Employees For Climate Justice (AECJ), un groupe d'employés engagés sur des questions climatiques. Les deux militantes avaient dénoncé, en mars sur Twitter, la mise en danger des salariés d'Amazon par manque de mesures de sécurité en période de crise du Covid-19.
L'entreprise a, selon le site DataNews, justifié ces licenciements non pas pour les prises de position des deux femmes, mais pour non-respect du règlement intérieur, sans donner davantage de détails.
Here're some things we're hearing form Amazon warehouse workers.
— Emily Cunningham (@emahlee) March 27, 2020
Crowded together, hundreds of Amazon warehouse workers pass by each other at the end of their shift.
2/https://t.co/dzYdHi3AVr
«Les motifs [de licenciement] étaient risibles», estime l'ancien vice-président de la multinationale, pour qui «il était clair pour n'importe quel observateur» que ces salariés avaient été licenciés pour avoir «donné l'alerte». «Je suis sûr que c'est une coïncidence que chacun d'eux soit une personne de couleur, une femme ou les deux. Vrai ?», ironise-t-il plus loin en égrenant une liste plus longue de salariés licenciés.
«Tirer sur les lanceurs d'alerte n'est pas seulement un effet secondaire des forces macroéconomiques, ni intrinsèque à la fonction du libre marché. C'est la preuve d'une veine de toxicité qui traverse la culture de l'entreprise. Je choisis de ne pas servir ni boire ce poison», justifie-t-il plus loin.
Jeff Bezos, le fondateur d'Amazon, a de son côté vanté l'augmentation aux Etats-Unis des embauches (175 000 salariés supplémentaires) et l'augmentation des salaires des opérateurs à 17 dollars de l'heure pendant la crise.
En France, la sécurité sanitaire des salariés d'Amazon en temps de pandémie a également fait polémique, sous la pression notamment des syndicats. L'entreprise a préféré fermer ses entrepôts dans l'Hexagone jusqu'au 5 mai inclus, après une décision de justice l'obligeant à restreindre ses livraisons aux biens de première nécessité sous astreinte de 100 000 euros par infraction constatée. Depuis le 16 avril, une grande partie des salariés de l'entreprise restent donc chez eux, payés à plein salaire aux frais d'Amazon. Le géant d'internet a de surcroît essuyé un refus concernant une demande de chômage partiel pour 10 000 employés.