Un prestataire de Monsanto accusé d'avoir envoyé une fausse journaliste à un procès sur le Roundup
Les méthodes d'un prestataire de Bayer-Monsanto sont pointées du doigt après qu'une de ses employées s'est fait passer pour une journaliste pour soutirer des informations à d'autres journalistes lors d'un procès sur le Roundup aux Etats-Unis.
Le cabinet de conseil et de relations publiques FTI Consulting, qui compte parmi ses clients la société Monsanto-Bayer, se voit reprocher le comportement de l'une de ses employées. En effet, celle-ci aurait usurpé son identité en se faisant passer pour une journaliste, lors d'un des procès du groupe devant un tribunal fédéral de San Francisco (Californie) en mars dernier.
Au cours du procès intenté à Monsanto par Edwin Hardeman, un retraité américain atteint d'un cancer qu'il attribue à l’utilisation pendant 25 ans du désherbant au glyphosate Roundup de la compagnie, une jeune femme d'une trentaine d'années a échangé avec plusieurs journalistes présents au tribunal. Les discussion s'effectuaient de façon informelle, pendant les délibérations, sans jamais préciser qu'elle possédait un lien avec l'une des parties. Le procès s'est achevé sur une condamnation de Bayer-Monsanto à verser au plaignant 81 millions de dollars (environ 72 millions d’euros), le géant de l'agrochimie ayant fait appel dans la foulée de la décision du tribunal.
«Elle a été présente chaque jour du procès [intenté par Edwin] Hardeman. Elle s’est liée d’amitié avec tous les journalistes, en donnant des récits différents à chacun sur son parcours», a déclaré une blogueuse présente au procès auprès du Parisien.
Le cabinet de relations publiques, qui emploie plus de 4 600 personnes, s'est défendu en déclarant que «la mission donnée à l'employée en question était d'assister au procès et son but était expressément et uniquement de prendre des notes sur les débats» et qu'un «examen interne» devrait déboucher sur des «mesures nécessaires».
La société FTI Consulting présente cette femme sur son site internet comme «ancienne reporter "tech"», «excellente rédactrice et tacticienne [qui] donne vie à beaucoup de nos campagnes», elle même se présente comme «consultante et journaliste freelance» sur le réseau social professionnel LinkedIn.
FTI Consulting a déjà essuyé des accusations similaires. En février, l'ONG de défense de l'environnement EarthRights a affirmé que «des consultants payés par Exxon», employés de FTI Consulting, avaient contacté son conseiller juridique en «se faisant passer pour des journalistes».
Ces deux employés de FTI se seraient présentés comme travaillant pour le site westernwire.net, qui est en réalité une émanation de la Western Energy Alliance (WEA) représentant l'industrie pétrolière et gazière. FTI a qualifié à l'AFP ces accusations de «fausses et trompeuses», renvoyant à un communiqué de Western Wire qui assure «n'avoir jamais caché être une publication pro-industrie».
Le groupe Bayer-Monsanto plombé par les procès
Visé par plus de 13 000 procédures à différents stades aux Etats-Unis, le groupe Bayer-Monsanto accumule les condamnations. Le 13 mai, un jury d'Oakland (Californie) a contraint la société à payer la somme astronomique de 2 milliards de dollars de dommages-intérêts à un couple. Depuis août 2018 et sa première condamnation, l'action de la société a chuté de près de 40%, soit une perte de près de 30 milliards de dollars de capitalisation.
Pour se défendre et rassurer ses actionnaires, Bayer-Monsanto répète à l'envi qu'aucun régulateur n'a conclu à la dangerosité du glyphosate depuis sa mise sur le marché au milieu des années 1970. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), une émanation de l'OMS, considère cependant le glyphosate comme «probablement cancérigène».
En avril dernier à Bonn (Allemagne), lors de la réunion des actionnaires de Bayer, le dirigeant du groupe Werner Baumann a affirmé «miser sur les cours d'appel» pour rendre des «décisions différentes », basées selon lui sur «l'analyse scientifique et non sur l'émotion».