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Européennes : quelles listes défendent la sortie de l'OTAN ?

Si elle n'est pas directement liée à l'UE, la question de l'appartenance à l'OTAN occupe une place dans la campagne française pour les élections européennes : de nombreuses listes abordent ce sujet qui dépasse les clivages traditionnels.

Structure belliqueuse et obsolète héritée de la Guerre froide pour les uns, creuset de savoir-faire militaires et vecteur de sécurité dans le monde pour les autres, l'Alliance atlantique continue à occuper une place dans le débat public français, et le scrutin européen de 2019 ne fait pas exception. 

Avec le rafraîchissement des relations entre Washington et certains autres pays de l'organisation militaire à son sujet, l'appartenance à l'OTAN fait toujours débat parmi les forces politiques françaises. Ainsi, sur les 34 listes concourant en France au scrutin européen du 26 mai, 10, dont celle de La France insoumise (LFI), du PCF et de l'UPR, veulent que la France sorte de l'Alliance atlantique.

Certaines listes, en outre, proposent de développer une armée européenne... parallèlement à l'OTAN, ou à sa place.

Listes prônant la sortie de l'OTAN

La liste communiste portée par Ian Brossat prône la sortie de la France de l'OTAN, qu'elle accuse d'entraîner les «peuples d’Europe vers la guerre», et souhaite sa «dissolution». Le programme de la liste «Pour l'Europe des gens contre l'Europe de l'argent» prévoit par ailleurs la constitution d’un «nouvel espace de sécurité collective en Europe». 

Ian Brossat rappelait sur Twitter en décembre dernier que les communistes français avaient toujours voulu d'une France en dehors de l'OTAN, «comme De Gaulle l'a voulu en 1966».

Le programme de la liste insoumise menée par Manon Aubry pointe du doigt l’Alliance transatlantique à plusieurs reprises et exige la fin «de l’ingérence états-unienne en Europe», de même que celle d'une Europe «soumise à l’OTAN et tournée contre la Russie». Partant, elle défend la sortie de Paris de l'Alliance. Sur la question russe, le parti de gauche entend par ailleurs relancer les négociations sur le partenariat stratégique avec la Russie, «gelées depuis 2008». 

Dans le domaine de la lutte antiterrorisme, le Brexit est perçu comme un moyen de « "dés-otaniser"  et recontinentaliser » les «politiques antiterroristes et de renseignement», notamment en matière de protection «électronique». 

La liste du parti du souverainiste François Asselineau se donne comme mission principale la «sortie unilatérale de l’Union européenne, de l’euro et de l'OTAN», cette dernière constituant une tutelle géopolitique, selon l'UPR.

Cette liste dissidente du PCF n'a pas publié de programme mais le congrès fondateur du parti éponyme préconisait en 2016 la sortie de la France de l'OTAN, qualifié d'instrument «de guerre et de domination sur les peuples». 

Cette liste de l'Union des démocrates musulmans français souhaite elle aussi la sortie de la France de l'OTAN et la création d'une «puissance militaire européenne». 

«[Les guerre auxquelles] l’OTAN a participé jusqu’ici au nom de la lutte contre le terrorisme», peut-on notamment y lire, «n’ont clairement rien résolu et ont même aggravé considérablement la situation internationale en plongeant par exemple le Moyen-Orient dans des guerres sans fin». 

La Liste de la Reconquête, pour une suspension de la participation à l'OTAN

Menée par Vincent Vauclin, le chef du parti d'extrême-droite Dissidence française, la Liste de la Reconquête regroupant des «nationalistes et patriotes venus de tous les horizons» propose la suspension de la participation de la France «à l’UE, à l’euro et à l’OTAN».

Ceux qui souhaitent sortir du commandement intégré de l'OTAN

Certaines listes aux européennes critiques vis-à-vis de l'OTAN ne souhaitent pas un départ total de l'organisation otanienne mais un retrait du commandement militaire intégré de l'alliance militaire, comme cela avait été le cas après une décision de Charles de Gaulle en 1966 et jusqu'au retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN sous la présidence Sarkozy en 2009.

La liste menée par Nicolas Dupont-Aignan, souverainiste de droite opposé de longue date à l'OTAN, appelle à la sortie de la France du commandement intégré de l'Alliance transatlantique «pour retrouver notre souveraineté militaire et organiser une coordination de défense européenne coordonnée par la France». 

Cette liste se revendiquant directement des Gilets jaunes menée par Christophe Chalençon préconise la sortie du commandement intégré de l'OTAN, une «inféodation de notre nation organisée par les Etats-Unis». Très hostile à l'Union européenne actuelle sans pour autant souhaiter que la France en sorte, elle souhaite par ailleurs «refuser toute inféodation [...] à quelque entité étatique, économique, institutionnelle que ce soit».

Des listes souhaitant la création d'une armée européenne parallèlement à l'Otan 

En novembre 2018, alors que la question de l'armée européenne était au cœur de l'actualité, le secrétaire général de l'OTAN Jens Stoltenberg avait exprimé ses réserves sur le projet d'une armée européenne parallèle à l'OTAN, risquant pour lui de créer des «structures en double». «Ce ne serait pas une sage décision de la part des pays membres des deux organisations de disposer de deux ensembles de structures de commandement ou de faire double emploi avec ce que fait l'OTAN», avait-il notamment expliqué. 

Quelques mois après, cette idée continue à abreuver la classe politique française, en témoigne son apparition dans certaines listes aux européennes.

Conformément au positionnement de l'exécutif, la liste Renaissance de la majorité présidentielle propose de «construire une capacité d’action européenne» parallèle à l'Alliance atlantique. 

«Les Etats-Unis menacent pour la première fois de se désengager de la défense de l’Europe. Il est temps de construire une capacité d’action européenne, en complément de l’OTAN», peut-on lire dans le programme de la liste. 

La liste portée par Yannick Jadot avec le soutien d'Europe Ecologie Les Verts (EELV) propose elle aussi la création d'une «armée européenne commune autonome de l’OTAN».

Si cette liste «environnementaliste et social de niveau européen» critique l'Alliance transatlantique et dit ne pas soutenir son élargissement «jusqu'aux frontières de la Russie» car jugé «contre-productif pour la sécurité globale du continent européen», elle ne préconise pas d'en sortir. 

En revanche, la liste PACE propose aussi la mise en place d'une armée européenne d'ici 2050.

Cette liste fédéraliste menée par Yves Gernigon, qui a plusieurs versions dans d'autres pays d'Union européen, souhaite en Europe «une armée unique avec un commandement centralisé qui jouera un rôle central au sein de l’OTAN».

La liste de gauche menée par Benoît Hamon préconise une «défense européenne indépendante», avec un «commandement militaire européen» et souhaite «anticiper» la sortie de l'OTAN, outil jugé «inadapté au monde d'aujourd'hui». En d'autres termes, cette liste de gauche souhaite clairement, tout à la fois, la création d'une organisation de défense européenne et – à terme – la sortie de l'alliance atlantique.

La Ligne claire de Renaud Camus souhaite rendre l'OTAN «obsolète »

La liste menée par le père de la notion de «grand remplacement» souhaite rendre «parfaitement obsolète le rôle de l’OTAN» par un «partenariat stratégique» avec la Russie, devant garantir l’indépendance et la protection des Etats d'Europe de l'Est.

La liste espère par ailleurs l'essor d'une armée européenne.

Lire aussi : Trump aurait hésité à faire sortir les Etats-Unis de l'OTAN en 2018

Lucas Léger